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Coopération (2 janvier 2002)

 

Mission en Guinée Conakry

Entre les patients et les agents de santé :

la mutuelle

Cela fait deux ans qu'"ils se frottent", comme on dit là-bas. Qu'ils explorent ce qu'ils pourraient bien faire ensemble. "Ils", c'est l'organisation non gouvernementale guinéenne "DynamiC mutualiste" et chez nous, c'est la mutualité chrétienne de la région de Waas & Dender, implantée à Sint-Niklaas.

 

Des membres de Dynam sont déjà venus en Belgique à deux reprises et attendaient impatiemment la venue de leurs partenaires pour leur faire découvrir les réalités, surtout dans le domaine de la santé et des mutuelles, de leur pays. Ce vœu s'est réalisé lors d'une mission du 2 au 12 novembre 2002 de quatre représentants de la mutualité belge.

Avant de partir en Afrique, tout voyageur prudent consulte les guides de voyage ou les sites internet qui indiquent les mesures préventives à prendre en matière de santé. Il fera les vaccins nécessaires et emportera un minimum de médicaments dans sa valise car il aura certainement lu un avertissement du style "Les soins médicaux de base ne sont pas assurés. Les voyageurs dont l'état de santé dépend de certains médicaments ont intérêt à en emporter un stock suffisant. Il peut aussi être utile d'avoir son propre matériel de pansements et des seringues à usage unique."

Et les Guinéens, comment font-ils, eux, pour se soigner ? Pour la grande majorité de la population, se soigner par la médecine moderne est un luxe inaccessible. Chacun se débrouille pour se soigner comme il le peut en fonction de ses disponibilités financières, de ses croyances, de ses habitudes.

Le système de santé guinéen dispose d'un réseau de postes et centres de santé, d'hôpitaux préfectoraux, régionaux et de deux hôpitaux nationaux. Mais on ne peut qu'être frappé par le dénuement en matériel et en médicaments de la plupart de ces infrastructures. Des cabinets, cliniques et officines privés ainsi que de nombreux tradipraticiens (ceux qui pratiquent la médecine traditionnelle) viennent compléter l'offre de soins de santé.

Ainsi, par exemple, dans l'aire de santé de Yendé dont nous parlerons un peu plus loin, l'offre des soins de base compte : un centre de santé gouvernemental, un cabinet de soins privé, au moins 6 thérapeutes traditionnels reconnus par la population, de nombreux points de ventes de médicaments les plus divers (points fixes et marchands ambulants). Les deux hôpitaux les plus proches se situent chacun à environ 40 km de Yendé, dans les chefs lieux de préfecture.

Bien souvent, l'itinéraire thérapeutique commence par l'automédication, afin d'essayer de limiter les coûts des soins :

  • Soit on se rend au marché pour acheter des "comprimés" au petit vendeur de médicaments. Cela marche suffisamment souvent pour entretenir la pratique, mais on risque quand même d'avaler des produits inefficaces voire nocifs, car les officines sont assez souvent douteuses et les produits ne sont pas conservés dans les conditions requises.

  • Soit on se tourne vers les remèdes traditionnels proposés par les vendeuses et les tradipraticiens. Ils rassurent car ils sont familiers et soignent les maux les plus simples, les plus connus.

Si la guérison ne vient pas, il faudra trouver l'argent nécessaire pour aller voir un infirmier, quitte à emprunter auprès de plusieurs personnes pour payer les soins. Difficile à croire, pour nous Européens, mais l'impuissance des proches est souvent au rendez-vous. Il n'est pas rare qu'un enfant soit emporté par une crise de palu ou une diarrhée faute d'avoir pu rassembler les quelques euro nécessaires pour le soigner.

 

Mieux soigner à moindre coût

Quelques espoirs émergent cependant. De timides rapprochements voient le jour entre médecines traditionnelle et "moderne" qui ont chacune leur rôle à jouer pour le bien-être des gens. Les médicaments génériques, d'un prix abordable, remplacent de plus en plus souvent les coûteuses spécialités de laboratoire. Des campagnes sont menées pour sensibiliser la population aux risques liés aux "médicaments de la rue". Enfin, les mutuelles de santé commencent à voir le jour…

 

 


Aux origines de Dynam

Un projet de recherche, appelé PRIMA

Yendé est une zone de santé qui compte 17.000 personnes et 67 villages. Elle se trouve dans la préfecture de Kissidougou en Guinée forestière. Pendant quatre ans, elle a fait l'objet d'une étude approfondie sur les modalités de mise en place de systèmes de partage du risque maladie (projet PRIMA). Un projet de recherche qui a été conçu et mis en pratique par différents intervenants. Deux mutuelles ont été mises en place, la mutuelle de santé Maliando à Yendé et la mutuelle de santé Diompilo dans la préfecture de Guékédou. Leurs activités ont malheureusement été rapidement perturbées par les attaques des rebelles de Sierra Leone et du Libéria qui les ont forcées à cesser toute activité.

Au début de cette étude, le problème semblait être l'exclusion financière pour laquelle un système de pré-paiement semblait une solution de bon sens. Toutefois, en créant l'organisation nécessaire à ce système de pré-paiement (dans ce cas, la mutuelle), ce sont les relations de pouvoir entre patients et prestataires de soins qui ont changé en premier lieu.

Le projet a permis d'arriver à une réelle négociation entre un groupement de patients et le système public de santé et ses prestataires de soins et à un réel contrat avec des droits et des obligations explicites (voir encadré).

Dans la foulée de PRIMA est née DYNAM, une ONG nationale composée des cadres locaux qui ont été formés dans le cadre du projet initial. Les compétences qu'ils ont acquises, encore rares au niveau national, peuvent permettre de poursuivre le développement des mutuelles initié depuis 1996.

 

DYNAM a beaucoup de potentiel :

  • pour la poursuite de l'encadrement en Guinée et le développement d'un programme d'appui à d'autres mutuelles selon sa propre approche;

  • pour continuer à construire et capitaliser une expertise nationale en matière d'appui aux mutuelles et en matière de plaidoyer vis à vis des différents ministères qui commencent à se positionner sur ce thème ;

  • pour l'organisation d'une concertation accrue et plus efficace des différents acteurs au niveau national.

Mais, pour survivre, l'ONG guinéenne a aujourd'hui besoin d'appuis financier, institutionnel et technique. Si la Mutualité chrétienne est prête à soutenir Dynam, la recherche d'autres partenaires intéressés et l'élaboration des axes plus précis de collaboration sont en cours.

 


 

Les petites révolutions de la mutuelle Maliando

 

Davantage de médicaments disponibles au centre de santé

Les promoteurs du projet PRIMA ont essayé d'impliquer au maximum les principaux acteurs concernés dans la recherche du système d'organisation à mettre en place.

Tout a commencé par une collecte des données. Au sein de la population d'abord, afin de connaître sa perception des services de santé et ses propositions concrètes d'amélioration. Parmi les établissements de soins partenaires ensuite, les données disponibles ont été exploitées.

Un "paquet minimum consensuel" de soins de santé a ainsi été élaboré, après avoir été discuté lors d'un atelier de trois jours par tous les acteurs du système de santé de district. Il comprend une liste des principales maladies et les critères de qualité des soins de santé aux niveaux techniques, financiers et sociaux. La gamme des médicaments essentiels habituellement disponibles au centre de santé a ainsi été élargie en fonction de la "demande sociale" de la population : 17 médicaments ont été ajoutés à la liste.

Les accords entre la mutuelle de santé et les établissements de soins retenus comme partenaires pour les prestations de soins de santé ont été scellés par des conventions.

 

 

Prise en charge des indigents

Un mécanisme de prise en charge des indigents a été mis au point. Une fois identifiés selon des critères définis par la communauté, ils sont exemptés de cotisations mais bénéficient de tout le paquet de bénéfices offert aux adhérents aussi bien au premier échelon qu’à celui du deuxième échelon.

 

Des primes pour motiver le personnel de santé !

Si la population y trouvait son avantage, les agents de santé, de leur côté, allaient devoir accroître leurs efforts pour mieux accueillir et informer les patients ainsi qu'améliorer la tenue des supports d'information sanitaire et les outils de gestion financière du centre de santé. Ils se trouvaient également obligés d'abandonner les pratiques de tarification parallèle (dessous de table). Une pratique généralisée qui, si elle grève sensiblement le budget des ménages, permet au personnel de santé de compenser la faiblesse des salaires. L'idée de primes mensuelles, proposée par le personnel lui-même, a été retenue et un barème élaboré.

Que couvre la mutuelle Maliando ?

Les soins sont pris en charge à 90 %, le patient paye un ticket modérateur de 0,25 €.

Cela lui ouvre l'accès à tous les soins prestés au niveau du centre de santé de Yendé.

En cas d'hospitalisation à l'hôpital préfectoral, le système couvre les dystocies (accouchements compliqués), les tumeurs abdominales, les soins en pédiatrie pour les enfants de moins de 15 ans, ainsi que les frais de transport vers l'hôpital.

La cotisation s'élève à 2 € par an par personne. Environ 250 ménages ont adhéré à la mutuelle, ce qui représente 1038 personnes. 6 ménages d’indigents de 10 personnes ont été pris en charge.

La troisième campagne (2000-2001) suivait la même tendance mais a enregistré des perturbations à cause des incursions rebelles dans la zone.

 

 


 

L'association des femmes balayeuses de Kissidougou

Quand une ville voit sa population doubler voire tripler en quelques mois, des problèmes importants d'accueil et de santé publique surgissent inévitablement. C'est ce qui s'est passé à Kissidougou au Sud-Est de la Guinée. Cette ville de 70.000 habitants a dû faire face à l'afflux massif de réfugiés et de Guinéens fuyant les zones de combat au sud du pays.

De septembre 2000 à juin 2001, de violents affrontements ont opposé l'armée guinéenne et les rebelles de Sierra Leone et du Liberia qui cherchaient à conquérir les zones diamantifères et aurifères de Guinée.

"La croissance soudaine de notre population urbaine a entraîné une production beaucoup plus importante d'ordures ménagères", explique Saran Tolno, chargée de la production à l'Association des femmes balayeuses de Kissidougou. Cette association s'est constituée en juin 2001, elle affiche 250 membres parmi lesquels un seul homme, secrétaire de l'organisation.

Les femmes se sont partagé la ville en huit parties et débarrassent ses artères principales de ses ordures quatre jours par semaine de 6 à 9 heures du matin. "Nous ne sommes pas rémunérées pour faire ce travail, nous avons entrepris cette activité d'assainissement public sur notre propre initiative", témoigne Saran Tolno.

Les premières regroupent les détritus en petits tas à l'aide de balais à long manche, les secondes munies d'une balayette et d'une ramassette, les entassent dans une bassine qu'elles portent sur la tête. Autant dire que le matériel dont elles disposent est sommaire et largement insuffisant.

"Il nous faudrait davantage de balais à long manche, des pelles, des cache nez, des bennes à ordures …".

Ce travail ingrat n'est pas sans risque. Nombreuses sont les femmes qui se mettent à tousser à force de soulever la poussière et de respirer des odeurs désagréables. D'autres se blessent à cause de lames ou de morceaux de fer souillés.

Ces femmes volontaires ne font pas que balayer. Le mardi, jour de marché à Kissidougou, elles filent le coton. Le vendredi, elles tissent. Une équipe de couturières, exempte du balayage, se rend chaque jour dans le local de 60 m² mis à disposition de l'association par la commune. Quand la fatigue les gagne, elles entament des chants pour se donner du courage.

Aujourd'hui, elles veulent pouvoir être capables de faire soigner leurs enfants et ont fait appel à Dynam pour les aider à mettre en place une mutuelle de santé qui prendrait en charge les frais de maternité, de chirurgie et de pédiatrie pour les enfants de 0 à 15 ans.

 

 


 

La Guinée, un pays pauvre ?

La République de Guinée se présente sous la forme d'un vaste croissant entouré par six autres pays d'Afrique de l'Ouest : Guinée Bissau, Sénégal, Mali, Côte d'Ivoire, Libéria et Sierra Leone. Elle rassemble quatre régions naturelles présentant chacune ses particularités physiques. La Guinée maritime (ou Basse Guinée) qui correspond à toute la zone côtière : le riz, les noix de coco et de kola, les bananes, les agrumes et les cultures vivrières constituent les récoltes principales. Les activités principales au Fouta Djalon (ou Moyenne Guinée) sont l'élevage ainsi que la culture du riz et du fonio. La Guinée forestière, outre ses immenses ressources forestières, dispose d'un important potentiel agricole qui permettrait d'étendre la culture du riz, du café, de la banane, du cacao et de l'huile de palme. Enfin, la Haute Guinée est une région de savane qui couvre 40 % du pays.

Les terres de la Guinée sont fertiles, son sous-sol riche en minerais et elle bénéficie de précipitations abondantes. Malgré ces nombreux atouts, la Guinée est l'un des pays les plus pauvres du monde : ses indicateurs en termes de revenu moyen par habitant, d'accès à l'électricité, à l'eau courante, d'espérance de vie moyenne ou encore de mortalité infantile sont parmi les moins bons.

D'où vient cette énorme contradiction entre cette richesse potentielle et la pauvreté réelle dans laquelle se trouve le pays ? Des pistes d'explication peuvent être trouvées dans:

  • La dépréciation des termes de l'échange : les prix des matières premières en provenance des pays du tiers monde sont de plus en plus bas comparés à l'évolution des prix des marchandises que les multinationales produisent et qu'elles exportent vers l'Afrique;

  • Le poids de la dette extérieure à rembourser aux dépens de budgets à affecter à la santé, l'éducation ;

  • La mauvaise gestion, la corruption, la fraude dans un pays où la démocratie est fragile, l'économie déstabilisée et où des conflits larvés minent le développement social.

Mais la pauvreté est un concept très relatif. Si la Guinée est pauvre au niveau économique, au sens où nous l'entendons, elle est riche par la vie qui l'habite, le sens de l'hospitalité et le courage de sa population. Et du coup, c'est nous qui paraissons si pauvres !

Partout, nous avons été accueillis avec beaucoup de chaleur. Des chants, des louanges, des danses, des cadeaux, un repas … les Guinéens ne ménagent aucun effort pour témoigner leur joie de rencontrer l'étranger qui vient de si loin. A Touffoudou, petit village de Guinée forestière où poussent allègrement caféiers, bananiers ou palmiers, ce sont tous les habitants qui étaient réunis pour une matinée d'échanges sur la mutuelle de santé. En signe de bienvenue, ils nous ont remis un panier rempli de noix de kola … ainsi qu'un mouton.

 

Sur la route

La route est bonne mais il convient de rester vigilant : les obstacles sont nombreux et les arrêts fréquents. Les camions ou les taxis-brousses, des vieilles Peugeot 504 bringuebalantes, tombent régulièrement en panne le long du goudron. Ces véhicules importés d'Occident, sont la plupart du temps renforcés pour charger toujours plus de marchandise et agrandis pour prendre un maximum de passagers. En regardant les bagages disposés sur le toit, doublant ainsi la hauteur du véhicule, on se demande comment l'équilibre se crée. Quand ces tacots deviennent vraiment trop "fatigués" pour les voyages entre préfectures, que les coûts d'entretien sont supérieurs aux recettes engrangées, ils sont encore relégués aux parcours en ville bien qu'ils aient déjà parfois 30 ou 40 années de bons et loyaux services derrière eux !

Les barrages routiers sont fréquents dans les zones frontalières ou aux abords de points stratégiques comme un pont ou un barrage hydro-électrique. Grâce à notre ordre de mission, nous passons sans problèmes mais ces barrages sont l'occasion pour les policiers de lever un droit de passage, taxe officielle de dédouanement mais aussi non officielle.

Les gens ont lutté, sans succès jusqu'à présent, pour les faire enlever car ces taxes retombent sur le prix de la course.

Les chauffeurs se voient aussi souvent contraints de déborder vers le milieu de la route car, sur les bas côtés, des étendues de grains de riz ou de fonio s'étalent sur le goudron pour le séchage. La pédale de frein et le klaxon ne sont pas ménagés non plus pour éviter ou impressionner les jolies N'dama, une race de vaches de petit format que l'on ne trouve apparemment qu'en Guinée et qui ne donne que deux litres de lait par jour.

 

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