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Coopération (17 avril 2014)

En direct de Guinée

© AFP BELGAIMAGE

Des hommes couverts de pied en cap ont donné une impression de science-fiction à nos journaux télévisés. Ils interviennent en Guinée, face à l'épidémie Ebola qui y a été signalée. La forte contagion du virus justifie ces mesures. Echos de guinéens, au coeur de cette tourmente.

Aliou Keita supervise des animateurs en santé publique au sein de l’ONG guinéenne Dynam. Il vient de passer plusieurs jours en Belgique à échanger sur les réalités de la protection sociale, ici et là-bas(1). Son voyage de retour connaît une tonalité particulière. Durant son séjour belge, l'épidémie d'Ebola sévit dans son pays. Elle est dans tous les esprits.

Peur perceptible

Premier constat par Aliou Keita, de retour au pays : “il y a une sorte de psychose au sein de la population, à cause de l'Ebola. Cette maladie n'est pas vraiment connue des Guinéens. Tout le monde est inquiet”. En effet, les principaux foyers d'épidémie ont concerné jusqu'à présent l'Afrique centrale (République démocratique du Congo, Soudan, Ouganda, Gabon). Le virus tire d'ailleurs son nom de la rivière Ebola au Congo, sur les rives de laquelle il est apparu une des premières fois en 1976 (à Yambuku). Bien loin de la Guinée. La distance entre ces régions peut s'apparenter à celle qui sépare Bruxelles de la capitale guinéenne, Conakry.

Le Docteur Abdoulaye Sow, qui revient également d’un séjour en Belgique, partage la même impression que son compatriote. Arrivé à Conakry, il écrit : “La peur d’Ebola est perceptible partout. Les précautions sont impressionnantes : on ne se sert plus les mains ou à peine, pas de bises, les taxis sont très peu utilisés ainsi que les autres transports en commun, pas de grosses cérémonies d’antan (baptêmes, mariages, enterrements), etc. À chaque coin d’un lieu de regroupement de masse, se trouvent des points d’eau de javel diluée pour se laver les mains, de sorte qu’une pénurie d’eau de javel s’annonce. Dans les quartiers, toute personne qui vomit (même pour une autre pathologie) est automatiquement 'diabolisée' et stigmatisée, de sorte que les malintentionnés utilisent ce symptôme pour faire fuir les gens dans les boutiques, magasins, marchés et procéder au brigandage de toute sorte.” À les lire, on perçoit le désarroi.

Le climat apparaît tendu. Ainsi la presse française rapportait, début avril, des incidents à l'encontre d'une équipe de Médecins sans frontières, à Macenta (zone de la Guinée forestière), où l'organisation a déployé une structure d'isolement. “Il est très difficile d’informer les gens sur le virus dans leur langue, tout en mettant tout en œuvre pour stopper l’épidémie”, commente entre autres Henry Gray, le coordinateur d’urgence de MSF. À Macenta, les autorités ont dû intervenir et appeler au calme. “Quand l’homme se sent impuissant devant un problème, il panique et se laisse aller, commente le docteur Sow, directeur de Fraternité médicale Guinée(2). L’isolement draconien de patients, parfois de toute la famille du patient, la stigmatisation et la peur occasionnent au sein de la population une forte pression et la panique.

© AFP INFOGRAPHICS BELGAIMAGE
La virulence du virus

Peut-être certaines précautions peuvent-elles paraître exagérées, constate le docteur Sow. Mais il vaut mieux que la population soit sensible et sensibilisée au danger de la maladie, poursuit-il. Effectivement, l’Ebola est terriblement contagieuse. Des contacts avec une peau lésée ou des muqueuses, avec du sang, des sécrétions, des liquides biologiques (sueur, larmes...), etc. peuvent être facteurs de transmission. Des primates auraient été à l'origine de l'infection chez l'homme. La maladie est mortelle pour eux également. Mais les “hôtes naturels” du virus seraient certaines espèces de chauves-souris frugivores, qui sont donc des porteurs sains. “Le virus se transmet à l'homme à partir d'animaux sauvages et se propage ensuite dans les populations par transmission humaine”, indique l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Aucun vaccin, aucun traitement spécifique ne combattent ce virus. Éradiquer la maladie ne peut se faire qu'en prenant des mesures préventives de contagion. Les taux de mortalité de la maladie sont élevés. Petite espérance cependant : “si les patients reçoivent un traitement pour les infections secondaires et sont bien réhydratés dans des structures de santé bien gérées, leurs chances de survie augmentent”, précise-t-on du côté de Médecins sans frontières.

Connaître et reconnaître

On déploie alors surtout des dispositifs de dépistage et d'isolement des cas, de désinfection des lieux, des mesures particulières pour les corps de patients décédés… L'information joue un rôle primordial. D'autant que les symptômes de la maladie à virus Ebola ne lui sont pas nécessairement spécifiques. “Les signes d’Ebola, surtout au début de la maladie, ne sont pas fondamentalement différents de ceux du paludisme (NDLR: appelé aussi malaria, l'affection est très répandue), explique le docteur Abdoulaye Sow. C'est l'apparition des hémorragies qui feront la différence. Vomissement de sang, sang dans les selles, hémorragies cutanées ou au travers des orifices comme le nez et la bouche…”. De ce fait, au début de l’épidémie, les agents de santé pouvaient confondre et prendre moins de précautions. “Depuis les cascades de décès du personnel soignant, les précautions sont aujourd’hui impressionnantes”, constate le docteur. La maladie “mystérieuse” de la Guinée forestière qu'évoquaient les médias locaux, début de l'année, a mis du temps à être identifiée. Maintenant, elle doit faire face au déploiement de la surveillance épidémiologique nécessaire.

//CATHERINE DALOZE

(1) Dans le cadre de la semaine internationale organisée par Solidarité mondiale (ONG du Mouvement ouvrier chrétien), fin mars. www.solmond.be

(2) Voir http://fmg-ong.org/

 Malades sans traitement 

À la date du 14 avril, le ministère de la Santé guinéen et de l’OMS (Organisation mondiale de la santé) recensaient 163 cas suspects et parmi eux, 112 décès. La situation évolue quotidiennement. Mais le foyer principal de l’épidémie reste concentré dans trois préfectures de Guinée forestière, à Guékédou principalement, Macenta et Kissidougou, indique l'Ambassade de France à Conakry. Dans la capitale guinéenne, on dénombre tout de même 31 cas et 14 décès. Le Libéria et le Mali voisins semblent également atteints.

Peut-on parler d'une épidémie Ebola de grande ampleur? Depuis 1976, selon les chiffres de l'OMS, c'est en Ouganda, en 2000, que le nombre de cas recensés s'est montré le plus élevé : 425 cas. Les derniers épisodes de “flambées de fièvre hémorragique à virus Ebola”, en 2012, font état de 57 cas en République démocratique du Congo, de 31 cas en Ouganda.

La découverte du virus ne date pas d'hier (1976). Mais les traitements font toujours défaut. Et le docteur Abdoulaye Sow de partager le sentiment de quelques-uns : “Le fait que les épidémies d'Ebola ne se sont focalisées qu’en Afrique, donne l'impression aux africains que l’Occident ne fournit pas d'efforts pour mieux comprendre la maladie et trouver des remèdes”. Dans un récent aide-mémoire à destination de la presse, l'OMS signale que “de nouveaux traitements médicamenteux sont en cours d'évaluation”.

Les mutuelles de santé, vecteur de prévention

© Solidarité Mondiale
En Guinée, l'ONG Dynam – partenaire de la Mutualité chrétienne – compte parmi les six organisations qui accompagnent les mutuelles de santé à travers le pays. L'éducation à la santé fait partie des préoccupations de Dynam.

C'est à travers la formation d'animateurs volontaires qu'elle déploie les conseils de prévention à l'attention des populations, commente Aliou Keita, superviseur des animateurs. Pas d'explications relatives à l'Ebola dans les formations. C'est en effet autour d'autres maladies plus courantes et tout aussi meurtrières que les campagnes de sensibilisation se centrent. Le paludisme, les maladies diarrhéiques, les infections sexuellement transmissibles. Mais assurément, le réseau des mutuelles de santé peut constituer un vecteur d'information et de prévention utile pour toucher les communautés villageoises.

"Pour mobiliser la population, ici en Guinée, c'est très facile, observe Aliou Keita quand il évoque le déroulement des programmes d'éducation à la santé. Il suffit d'un crieur public qui informe la tenue d'une action chez le chef du village, à la mosquée ou lors d'une cérémonie comme un baptême ou un décès. Et les gens se déplacent pour venir écouter".

Quant à la couverture mutualiste, en cas d'épidémie, il existe un accord entre les mutuelles et l'État guinéen. Il spécifie que la charge financière est supportée par ce dernier. Tant les mutuellistes que les non mutuellistes malades sont traités gratuitement.

>> Plus d'info: www.cooperationinternationale.mc.be

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