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Coopération (2 février 2012)

En Bolivie, tout est possible, mais rien n’est sûr

© Solidarité mondiale

Les plus prudents réservent déjà leurs vacances d’été, rêvant de farniente et de soleil. Loin des croisières de luxe et des hôtels 5 étoiles, d’autres manières de voyager existent… En novembre dernier, un groupe de 11 personnes issues de différentes organisations du Mouvement ouvrier chrétien et de la Mutualité chrétienne partait à la découverte des réalités d’un pays du Sud: la Bolivie.

Dès l’atterrissage, c’est le choc. A 4.000 mètres d’altitude, les nuits sont fraîches et l’oxygène rare. L’aéroport est installé sur le plateau qui domine La Paz, la plus haute capitale du monde. Et la route qui plonge vers la ville achève de couper le souffle. En quelques kilomètres, le visiteur expérimentera les contrastes entre la ville coloniale, historique, anarchique et élégante à la fois, accrochée aux pans de la montagne et El Alto, la ville nouvelle qui la surplombe. Sorte de ville champignon, elle progresse chaque année de plusieurs centaines de mètres, voit sa population croître trois fois plus vite que celle de La Paz, tandis que les quartiers s’organisent pourtant de manière régulière et rectiligne en blocs symétriques. Ces deux réalités sont aussi une forme de synthèse des principales contradictions et tendances du pays. La capitale et son double accueillent en effet des migrants de toute la Bolivie et en représente un microcosme.

Seul pays enclavé du continent sud-américain, la Bolivie compte autant d’habitants que la Belgique, mais est 30 fois plus vaste. Elle est connue grâce au lac Titicaca qu’elle partage avec son voisin péruvien. Plus encore que les curiosités touristiques, les Boliviens ont une place dans l’imaginaire touristique grâce aux tissus colorés qui ornent leurs costumes traditionnels, au petit chapeau boule que portent les femmes et au teint cuivré qu’arborent notamment les descendants des ethnies quechua, aymara… Le groupe piloté par l’ONG du MOC, Solidarité mondiale, allait à la rencontre de ces gens, de leurs réalités d’existence et de travail et de celles des organisations dans lesquelles ils se coalisent.

Laboratoire des conflits sud-américains ?

Au-delà des images de carte postale qui sautent aux yeux dès que l’on parcourt le pays (ses montagnes, ses déserts salés – les fameux “salar” –, ses lamas…), la Bolivie est avant tout traversée par des clivages profonds(1).

Le premier d’entre eux est un conflit interrégional. Il oppose les trois principales régions du pays : le haut plateau, “l ’Altiplano”, qui abrite la capitale, la vallée où se trouvent Cochabamba et Sucre - capitale constitutionnelle - et la partie amazonienne qui comprend Santa Cruz (deuxième ville du pays et important poumon économique). Mais les tensions sont aussi interculturelles. En effet, les indigènes, historiquement exclus de l’accès aux emplois de qualité et des lieux de pouvoir, sont majoritaires et en tension avec ceux que la langue populaire désigne sous le nom de “Conquistadores” en référence à leur ascendance blanche et supposée liée aux colonisateurs originels espagnols. Le conflit a failli récemment tourner en guerre civile quand les régions amazoniennes et riches se sont opposées au pouvoir central. Ce dernier se trouve désormais dans les mains de la majorité indigène, depuis l’élection de l’ancien leader des producteurs de feuilles de coca, Evo Morales, comme président de la République. Après un mandat entièrement orienté vers les questions institutionnelles et politiques (réforme de la Constitution), les enjeux socioéconomiques sont maintenant au sommet de l’agenda gouvernemental. Leur prégnance est renforcée par les crises économique et financière qui font également ressentir leurs effets en Bolivie, avec la chute importante des transferts d’argent des émigrés vers les familles restées au pays. La mentalité volontiers revendicative des Boliviens fait le reste et exprime ces doléances en de multiples “bloqueo” (pratiques qui consistent à paralyser un axe de communication le temps nécessaire pour que leurs exigences soient entendues, sinon satisfaites).

Une chose est sûre : un tel voyage offre quasi quotidiennement aux membres du groupe un cours de science politique appliquée, tant les questions qui font l’objet de discussions dans les instances officielles sont largement appropriées par chacun, tant la culture du débat transforme la rue en forum politique.

Sécurité sociale: une caisse non alimentée

L’avenir du système de sécurité sociale du pays fait débat. Jusqu’ici, moins de 27% de la population(2) disposaient par exemple d’une couverture en matière de soins de santé. La nouvelle Constitution approuvée par référendum en janvier 2009 donne en principe des droits nouveaux à une série de personnes qui en étaient jusqu’ici privés, comme la retraite et le remboursement de soins de santé. En principe, car les mécanismes qui devraient permettre le financement de ces avantages neufs sont au bord de la faillite. En effet, le système repose, comme en Belgique, sur des cotisations des employeurs et des travailleurs, mais également sur un apport important de l’Etat, or la part de ce dernier n’a pas été portée dans les comptes de la caisse de sécurité sociale depuis des années. Les conditions ne sont dès lors pas réunies encore pour mettre sur pied un dispositif réformé.

Grande disparité de santé

L’état de santé des Boliviens n’est en outre pas fameux. La mortalité infantile dépasse les 54‰, la part que l’Etat consacre à la santé ne dépasse pas les 6,4% du budget national et la couverture du pays en centres de santé dotés d’un médecin reste très basse (moins de 45% des centres). 70% des décès concernent soit des enfants de moins de 5 ans, soit des femmes en couches. Cette situation s’accompagne d’une dualisation importante de l’accès aux soins de santé, les plus riches n’hésitant pas à recourir à une médecine privée chère. Tout cela sans compter sur le froid, la pollution, les violences, la mauvaise alimentation qui amènent les plus pauvres ou les plus exposés des Boliviens à contracter davantage de maladies. Une enquête sur les perceptions et les besoins de santé comparés dans le secteur informel de deux villes pourtant séparées de moins de 10 km, La Paz et d’El Alto, a mis en évidence le rôle de la pauvreté et des différences d’infrastructure et de prévention dans les écarts sanitaires entre des groupes qui exercent le même métier et ont des situations a priori tout à fait similaires.

La réforme de la sécurité sociale sera un enjeu important des mois qui viennent. L’attachement perceptible des vendeuses des marchés pour une médecine de qualité et de proximité ainsi que leur disponibilité à y contribuer personnellement devraient peser dans les débats.

// ARNAUD GORGEMANS SOLIDARITÉ MONDIALE

(1) Voir l’article “Bolivie, un changement sous tensions” paru dans la revue Démocratie – téléchargeable sur www.revue-democratie.be

(2) Cette proportion correspond à la part de la population occupée dans le secteur formel, c’est-à-dire disposant d’un contrat d’emploi ou de fonctionnaire, à l’inverse de ceux qui sont leur propre employeur, qui vivent de petits boulots ou n’ont pas d’employeur officiellement enregistré.

Campagne

“La santé, un droit pour TOUS!”, thème porteur de la campagne commune de Solidarité mondiale et de la Mutualité chrétienne a vu le jour en début 2011. Depuis, des actions de sensibilisation, des animations, des informations, des conférences… ont eu lieu aux quatre coins de la Wallonie et de Bruxelles, afin de faire avancer ce droit fondamental qu’est la santé. Pour nous, mais surtout et avant tout pour les populations du Sud. Le voyage d’immersion en Bolivie s’inscrit dans le cadre de cette campagne.

Le site de Solidarité mondiale reprend différents outils qui ont été réalisés pour soutenir la campagne, dont une pétition (à signer en ligne). Un des objectifs de la campagne est en effet de faire pression sur le gouvernement belge afin qu’il fasse de la santé une priorité de sa politique de développement.

// ANTOINETTE MAIA
>> Plus d’infos : Solidarité mondiale • Chaussée de Haecht, 579 BP 50 – 1031 BXL • 02/246.38.81 • www.solmond.be

Des organisations boliviennes qui font un travail formidable

Découvrir les réalités du pays pour le MOC et la MC passe d’abord par la rencontre des organisations partenaires de l’ONG Solidarité mondiale, qui sont au quotidien en prise avec les conditions de vie et de travail des Boliviens.

La première, Casa WAKI, prend en charge des enfants et des jeunes qui vivent dans la rue. Cette association s’adresse aux 100.000 enfants et jeunes d’El Alto en leur proposant des formations professionnelles, des microcrédits, des bourses et des aides à la création de coopératives. Casa WAKI est la juxtaposition d’un mot en espagnol “Casa” (maison) et du mot aymara “WAKI”, nom que donnent les paysans aymara à une forme de travail communautaire qui signifie approximativement : “Tu me donnes de la terre, j’apporte les semences et ensuite on partage les récoltes”.

Gregoria Apaza est une organisation féministe. Elle combat les inégalités et mène de front des actions citoyennes, de renforcement personnel et familial, de développement productif et du travail, etc. Elle offre aussi aux femmes des espaces de débat et de réflexion politique, l’accès gratuit à la technologie, des appuis psychologiques si elles sont victimes de violences, etc.

SENTEC est une ONG active dans le domaine de la santé et de la formation professionnelle. Elle vise les familles moins favorisées des villes et des districts miniers des départements d’Oruro et de Potosi. L’un de ses axes de travail consiste à former de futurs promoteurs de la santé, dans les zones minières, afin qu’ils/elles deviennent aptes à faire bon usage des plantes médicinales.

Enfin, CRISOL est un centre de formation et un service d’études au sein de la confédération syndicale nationale unique du pays. Il est en particulier actif en matière de prévention à la santé et du travail coopératif. Il fait campagne pour davantage de protection sociale et s’investit pour améliorer l’application des législations du travail en interpellant les autorités publiques et les employeurs. Son influence dépasse largement les frontières du monde syndical et touche la majorité des régions du pays.

Le voyage a permis de renforcer les liens entre organisations et d’échanger les expériences. Cette confrontation de réalités très diverses, mais dont les enjeux sont similaires, favorise l’action de chacun pour que l’accès à la santé soit un droit pour tous, ici comme là-bas.

 >> Agenda
Le mardi 7 février, aura lieu une journée participative autour de la campagne “La santé, un droit pour tous”. Lieu : CEME, rue des Français 147 à Charleroi.
Rens. > 02/246.38.82 • www.solmond.be

 


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