Récit (
20 Décembre 2007)
Tête
de Turc
Il
y a au moins trois bonnes raison pour lesquelles je n’aurais pas dû accepter
ce boulot. D’abord, je suis Turc et le Père Noël, où qu’on situe son ciel,
ne descend pas des plateaux d’Anatolie. A moins qu’il n’ait trouvé ses
rennes d’occasion au bord de la mer Noire, Mais ça m’étonnerait. Mes parents
m’en auraient parlé. C’est eux qui m’ont tout appris sur leur pays, parce
que, moi, je suis né ici, à Liège, et la Turquie je ne la connais que par
les histoires.
La deuxième raison –
elle découle peut-être de la première -, c’est que je ne suis pas un gosse
de riche. D’abord, si je l’étais, je ne me trimballerais pas dans ce
déguisement stupide, entre les rayons de jouets, avec un panier en osier
rempli de faux sapins de Noël en massepain. Si j’étais né de parents pleins
d’argent, je ne serais sans doute pas devenu un papa fauché qui trime
pendant les fêtes pour que sa fille ait un beau réveillon et un cadeau sous
le sapin.
La troisième raison,
elle m’est bien plus personnelle : j’ai toujours préféré Saint-Nicolas au
Père Noël. Saint-Nicolas, quand j’étais petit, je trouvais qu’il ressemblait
à un gentil grand-père, déguisé en curé qui donne des bonbons et pas des
hosties, même si lui aussi demande aux enfants s’ils ont fait des bêtises
avant de leur donner à manger. Sa crosse brillait comme une pièce en
chocolat et son âne était bien plus sympathique que le traîneau de l’autre
bedonnant, avec ses bottes fourrées et son bonnet de nuit.
***
Gosses de rues
Aujourd’hui,
c’est moi le bedonnant, avec un faux coussin coincé dans la ceinture et des
lunettes pour pas qu’on voie trop que j’ai la peau basanée.
On
m’a recommandé d’être gentil, de sourire sous ma barbe et de donner du
massepain à tous les enfants accompagnés.
«Vous comprenez, m’a-t-on précisé, ce sont ceux-là qui achètent. Ceux qui
viennent pour se réchauffer et passer le temps, il ne faut pas les
encourager.»
J’avais bien compris.
Ceux qui ressemblaient à des petits gosses de rues, ceux qui me rappelaient
mon enfance, je devais les éviter. Comme si on pouvait s’éviter, j’ai pensé,
c’est ridicule, à force de se fuir, on ne peut aller nulle part.
Comme les gosses sans
leurs parents, ils ne vont nulle part, précisément; ils viennent peut-être
exprès pour parler au Père Noël, d’ailleurs.
Moi, en tout cas, quand
j’étais petit, c’est ce que je faisais. Quand Saint-Nicolas visitait
l’école, j’espérais pouvoir lui parler et lui expliquer où j’habitais parce
que, chez moi, il ne venait jamais, ni dans les chaussures, ni dans la
cheminée.
Il ne connaissait sans
doute pas mon adresse. Ou bien il savait que mon père n’allait pas à
l’église, qu’il ne descendait même plus dans la mine, à cause de la maladie,
et de la mine qui avait fermé. Il triait des vidanges au supermarché, mon
père.
Il était malin,
pourtant, il avait compris qu’avec une tête de Turc, il vaut mieux
travailler dans les réserves des magasins; on peut tousser ses poumons quand
on veut et laisser pousser sa moustache.
C’est Nazim qui m’a filé
le tuyau pour la place de Père Noël. C’est drôle parce que c’est mon père
qui avait trouvé le boulot pour Nazim, il y a plus de dix ans, quand mon
père était employé au GB, place Saint-Lambert.
Depuis, Nazim travaille
à l’Inno. Il décharge les palettes et écrase les cartons. Vous l’avez
peut-être déjà aperçu: il a un tablier gris et c’est lui qui guide les
camions Place de la République française, entre le Mister Minit et le
coupe-gorges.
-
Ugur, tu cherches toujours du boulot?
- Ben oui, je lui
ai répondu, si tu entends parler de quelque chose…
- A
l’Inno, ils engagent des Pères Noël, c’est un plein temps, pendant deux
semaines.
J’ai pensé à ma fille, à
ma femme, aux billets que ça représentait, et j’ai foncé à l’Innovation.
Je suis descendu à pied,
vu que j’habite en haut de la rue Sainte-Marguerite. Ca ne fait pas plus de
vingt minutes de marche. Juste le temps qu’il fallait pour que je me revoie,
à huit ans, les yeux pétillants dans le rayon jouets du Grand-Bazar. Ça
n’existe plus, maintenant, le Grand-Bazar, mais je ne dois pas être le seul
à m’en souvenir.
***
Les Saint-Nicolas
de mon enfance
A
cette époque-là, on pouvait boire un verre Place Saint-Lambert, mais pas moi
parce que j’étais trop petit et que j’avais pas d’argent.
J’étais juste venu pour
voir Saint-Nicolas et lui dire où j’habitais. A l’école, j’avais pas pu. Dès
que je m’étais approché de lui, il m’avait tendu un sachet de chiques; il
m’avait félicité pour mes points en français en disant :
- Il
paraît que tu es très sage, Ugur. Et que tu ne demandes jamais rien. C’est
très bien, il faut continuer ainsi.
Ça m’avait perturbé
cette phrase-là. Il y a des phrases comme ça qui travaillent dans la tête et
qui grattent comme des miettes de biscotte dans les draps.
J’étais tout petit, mais
pas tout à fait bête. Alors j’avais réfléchi et j’avais trouvé étrange qu’il
m’ait dit «Il paraît que». Je croyais qu’il savait tout,
Saint-Nicolas, avec sa barbe qui ressemble à un nuage. Je croyais qu’on ne
pouvait pas lui mentir parce qu’il lisait même dans les pensées.
Et, tout d’un coup, il
avait l’air de se contenter des rumeurs et des ouï-dire. Il paraît que.
Je n’aimais plus du
tout, moi, ce barbu qui vous juge sans savoir qui vous êtes et qui demande à
d’autres de faire rapport sur vous.
Je m’étais demandé si
c’était pas un faux Saint, déguisé en Nicolas pour se rendre populaire.
C’est vrai, il y en a
tellement des Saints, plein les calendriers et les églises, et il n’y en a
pas un seul aussi populaire auprès des enfants.
Je pensais que les
autres devaient être jaloux, tous ceux dont on a même pas retenu le martyre,
parfois même pas le prénom. Ça pouvait très bien être Saint Macaire, par
exemple, déguisé, qui s’amusait.
J’ai demandé à Nassim
parce qu’il était plus vieux que moi et que c’est le genre de choses qu’il
savait toujours.
Il m’en a appris une
fameuse. Il m’a expliqué que c’était le concierge de l’école qui avait mis
des lunettes fumées et des gants blancs.
Il croyait me faire de
la peine, en m’annonçant ça, Nassim. Pas du tout, j’étais bien content.
Je comprenais enfin
pourquoi mes pantoufles restaient vides et pourquoi, même quand je laissais
mon assiette exprès sur la table de la salle à manger en allant dormir, je
la retrouvais le matin, rangée dans l’armoire, sans le moindre cadeau.
Je comprenais pourquoi
Saint-Nicolas ne venait jamais chez moi. Saint-Nicolas c’était le concierge
et il n’aimait pas les Turcs, il m’avait dit un jour que je ferais mieux de
retourner dans mon pays et c’est pour ça qu’il m’appelait tête d’oignon.
***
Payé
pour sourire et penser
Maintenant,
les gens m’appellent Père Noël.
Quand ils me parlent,
parce que la plupart des parents comprennent très bien que je ne suis qu’un
figurant, mal payé, et qu’il vaut mieux ne pas m’adresser la parole.
Juste accepter mon sapin
en massepain pour ne pas avoir l’air impoli puis s’éloigner en tirant ses
enfants. Moi, figurant, ça me laisse tout le temps pour penser, et j’aime
bien, être payé pour sourire aux gens et penser…
Je descendais donc la
rue Sainte-Marguerite, à huit ans, parce qu’à cause de cette histoire de
concierge déguisé j’avais décidé d’aller voir le vrai Saint-Nicolas, celui
dont on m’avait parlé, celui qui était en ville, au Grand-Bazar, derrière le
village des Gaulois.
C’était un mercredi
après-midi, j’étais tout seul.
Mes parents croyaient
que je jouais au foot sur le parking, comme d’habitude, et moi j’avais dit
aux copains que je devais aller chez le dentiste. J’ai descendu
Sainte-Marguerite, puis Saint-Séverin et la Haute-Sauvenière; je suis passé
devant le Sarma, j’avais les joues toutes rouges à cause du froid.
Le Sarma, il n’existe
plus non plus. Je me souviens bien quand on l’a démoli, avec une grosse
boule qui cogne et abat les murs, J’ai regardé pendant des heures; j’avais
les larmes aux yeux; je n’arrivais pas à comprendre pourquoi on n’avait pas
au moins retiré les tubes néon avant de détruire le bâtiment. Ça coûte cher,
les tubes néon, on ne peut pas les casser sans raison.
***
Seul et pauvre
Je
suis arrivé Place Saint-Lambert et je suis entré dans le Grand-Bazar.
Ça sentait le parfum
autour des vieilles dames et il faisait très chaud.
J’avais gardé ma cagoule
et mes moufles, mon anorak et mon écharpe, à cause de ma mère qui avait
toujours peur que j’attrape froid.
J’ai monté les
escalators. Il y en avait plein; j’ai cru que je n’arriverais jamais, puis
d’un coup c’était là.
Tout sombre, avec des
lumières jaunes et rouges, un village en bois au milieu du magasin, avec des
enfants partout, au bout du bras de leur papa, de leur maman.
Ça faisait un bruit de
piscine avec de la musique en plus. Il y avait une flèche qui indiquait la
direction du trône, et une file immense avec plein d’enfants qui attendaient
avec leurs parents.
Moi, j’étais tout seul.
Eux, ils avaient des
anoraks tout neufs, des petits manteaux verts et des pantalons tout chauds.
Moi, j’avais des
chaussures usées, un anorak démodé, orange mais noir autour des manches et,
surtout, un trou au genou gauche de ma culotte de training.
Je me suis senti sale,
je me suis senti seul, peut-être même que j’ai compris que j’étais pauvre.
En tout cas, j’ai senti
que ce n’était pas ma place. Je n’ai pas osé faire la queue. J’ai repris
l’escalator et suis redescendu dans la rue.
J’avais l’impression que
quelque chose n’était pas juste mais je ne comprenais pas.
Un peu comme quand je
m’étais rendu compte que Jésus et ses copains habitaient pas très loin du
village de mon grand-père, que la Galilée, c’était beaucoup plus près du Sud
de la Turquie que du plateau d’Ans, et que, pourtant, Jésus et les autres
apôtres dans leurs robes à rayures, ils n’avaient pas des têtes de Turcs.
Pas du tout, ils ressemblaient au prof de gym, musclés et tout pâles, avec
des longs cheveux et des sandales.
J’ai pas posé la
question au cours de religion. Je préférais rester discret, déjà que je ne
comprenais pas toutes les paroles du Notre-Père, il valait mieux que je me
tienne à carreau.
***
Des enfants
sortis de l’enfance
Ici
aussi, il vaut mieux que je me tienne à carreau.
Dix jours que je
déambule dans les rayons. Dix jours que je passe ma main gantée dans la
tignasse des petites filles à lunettes, que je tends du massepain à des
mains minuscules et que je t’entends, dans le meilleur des cas, un petit
merci murmuré entre deux lèvres gercées.
Je ne sais pas ce qui se
passe, peut-être que je vieillis – même si je n’ai pas encore tout à fait
trente ans – j’ai l’impression que les gosses changent. Ils ont l’air trop
sérieux avec leurs vêtements d’adultes pleins d’étiquettes, de tirettes et
de bandes fluorescentes. On dirait qu’ils s’ennuient ou qu’ils en ont déjà
marre.
A leur âge, je passais
des heures à jouer au foot et je souriais tout le temps. Je ne savais même
pas comment on faisait pour être triste.
Là, je me balade avec ma
cloche, je leur offre mes sapins de Noël et ça ne leur fait même pas
plaisir.
J’ai envie de leur
parler, de leur faire comprendre qu’ils se trompent, que ça ne sert à rien
de jouer aux adultes à leur âge, qu’ils auront toute la vie pour ça, mais
c’est inutile. On ne change pas les gens, même les tout petits, avec des
mots.
Ce qu’il leur faudrait,
à tous ces petits fils de riches, ce sont des gamins sans éducation et sans
argent, qui traînent dans la rue mais qui leur feraient comprendre qu’une
demi-journée entre copains, ça vaut plus que tous les jouets du monde, plus
que tous les vêtements de l’univers.
Mais c’est impossible.
Quand on a le privilège de ne manquer de rien, il faut bien qu’on s’invente
d’autres raisons d’être heureux. Et surtout des prétextes pour ne pas
l’être.
Comme ça on peut
acheter, et se faire croire que ça va tout arranger.
Une nouvelle maison de
poupées rose écœurant, un nouveau jeu vidéo pour regarder l’écran même
quand il n’y a rien à la télé, une pile de cassettes vidéo pour ne pas avoir
envie de courir dehors quand la nuit est tombée.
***
Les Droits de
l’Homme comme cadeau
C’est
ce que j’étais en train de ruminer quand un gosse se posta devant moi, dans
son manteau bleu marine. Sa mère, raide et blonde comme une hôtesse de
l’air, m’annonça que son fils avait un souhait pour Noël.
-
Vous allez voir, il est très avancé, Père Noël, c’est un enfant formidable.
- Je sais, je sais,
que je réponds pour éviter que le gosse croie que je ne suis pas le vrai.
Je t’écoute.
- Hé
bien, pour Noël, je ne veux pas de cadeaux pour moi, je voudrais qu’il y ait
les droits de l’homme, partout dans le monde.
Je ne sais pas pourquoi
j’ai réagi comme ça.
Peut-être à cause du
chignon de la mère, du foulard hors de prix qu’elle arborait comme les
proxénètes exhibent leurs liasses de billet en offrant la tournée.
Peut-être à cause du
sourire mielleux qui me paraissait aussi préfabriqué que le souhait de son
fils.
Peut-être parce que le
gamin a déposé la cerise sur le gâteau lorsqu’il a ajouté :
-
Les droits de l’homme pour que tout le monde soit heureux, même les pauvres,
les drogués et les Noirs.
- Et les homosexuels?,
ai-je demandé sur un ton amusé, en secouant ma cloche près de son oreille,
tu les oublies dans ta liste!
La mère a ouvert des
yeux plus ronds que le collier de perles qu’elle porterait pour le
réveillon. Sa bouche est restée béante mais il n’y avait pas de son pour en
sortir.
Elle a dû se sentir dans
son droit. Elle, elle n’avait rien fait, c’est moi qui l’agressais sans
doute, c’était moi le méchant puisque j’avais répondu à son fils au lieu de
le laisser réciter sa leçon, parce que j’avais répondu spontanément là où le
savoir-vivre enseigne à se taire et ne pas réagir.
- C’est quoi, un
homosexuel?, a demandé le petit.
- Ce n’est rien,
ai-je dit en retrouvant mon calme, il y en a beaucoup plus que de pays
qui respectent les Droits de l’Homme. Mais tu ne devrais pas demander des
choses comme ça pour Noël. A ton âge, on ne doit pas essayer de faire croire
qu’on est un adulte.
C’est vrai, à la fin, ce
gosse n’a même pas huit ans et il a l’air plus résigné qu’un vieil homme.
Si à cet âge-là, on rêve
de régler les problèmes de la planète, c’est foutu. On passe son enfance
tout seul à penser aux autres et on devient un adulte tout sec.
Qu’est-ce qu’il lui
restera à rêver quand il aura l’âge d’être sérieux? Quand on n’est pas
heureux soi-même, c’est normal de croire que le bonheur c’est un truc que
les gouvernements peuvent imposer à la planète.
- Entre nous,
ai-je continué en baissant la voix, les Droits de l’Homme, tout ça, c’est
bien. C’est très bien. Mais toi, qu’est-ce qui te ferait plaisir à toi?
-
Ben, c’est ça que je voudrais, parce que c’est l’anniversaire et qu’il y a
encore plein de gens en prison. C’est pas juste.
-
C’est très bien, Guillaume, je suis sûre que Monsieur Noël a très bien
compris. On va y aller maintenant.
Je ne sais pas pourquoi
je ne l’ai pas laissée reprendre son gamin et continuer ses courses,
repartir vers son chez elle dans sa voiture bien chaude, vers ses amies qui
trouvent son fiston si mignon et les profs qui admirent ce lascar si
brillant.
Je n’avais pas envie. Au
contraire, j’aurais tout donné pour le débarrasser de sa mère, l’emmener sur
un parking et lui montrer que c’est au foot qu’on commence à apprendre ce
que c’est que le droit.
La justice, ça s’apprend
en jouant et en inventant des règles, pas en étudiant les cahiers.
- Je vais vous
accompagner, j’ai ajouté.
Et j’ai saisi la main de
Guillaume, je l’ai serrée jusqu’à l’entrée de l’escalator.
- Et pour toi,
qu’est-ce que tu voudrais vraiment?
-
Laissez-le tranquille, a repris la mère, ce n’est qu’un enfant.
Justement, j’ai pensé,
il n’est peut-être pas encore trop tard.
Si tu veux changer le
monde, commence par donner la liberté aux enfants. Sors-les du bourbier dans
lequel tu t’enfonces, j’ai pensé.
Alors, au moment où
l’escalator les a emportés et que le petit s’est retourné, j’ai fait signe
de la main et j’ai dit :
-
Trouve d’abord ce que toi tu veux avant de penser comme les autres. Tu as
toute la vie pour apprendre. Laisse ça pour plus tard. Pense à ce qui te
ferait plaisir à toi.
Il m’a fait signe de la
main. Je n’ai pas bien compris. Ses doigts étaient pliés comme s’il serrait
un cylindre. Ça signifiait peut-être une liane de Tarzan, le joystick d’une
console de jeux, un cornet de crème glacée.
Ce que j’ai entendu,
c’est la mère qui m’envoyait :
-
J’irai me plaindre à la direction, vous pouvez remballer votre costume.
Je n’écoutais pas. J’ai
vu les yeux du gamin qui brillaient; il a répété son geste. J’ai crû
comprendre pétard pirate, maracas, arc à flèche ou peut-être lance-pierres.
Le gosse avait un grand
sourire.
Je me suis dit que la
Noël n’était pas perdue pour tout le monde.
Nicolas Ancion
***
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De
ces petits bonshommes standardisés, tout en plastique lisse,
affichant un sourire identiquement figé, peuvent surgir des
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sauce, un appareil photo, une agrafeuse, un abri de jardin ou un
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aventure, pour que l’absurde redonne des couleurs à une existence
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de drame, voire d’horreur.
Un banquier
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en assassin. Un directeur commercial à la recherche d’une chemise
net pour son rendez-vous dans la minute, file aux entrepôts de
marchandises et découvre l’envers du décor. Deux jeunes anars aux
yeux desquels la langue appartient à ses usagers, et doit être
libérée de tout académisme, font vivre un véritable calvaire de
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française. Un gamin s’évertue à coller sur un carton des chevaliers
et des dragons découpés dans les paquets de cigarettes de son père,
il se construit une icône, une histoire.
A découvrir aux
éditions Le Grand Miroir (groupe Luc Pire).
> Et pour connaître plus avant encore l’auteur aux accents parfois
surréalistes ainsi que ses récits tout en décalage, Nicolas Ancion
ouvre sa maison : voir
http://ancion.ibelgique.com |
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