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Prendre la plume (3 janvier 2002)

Témoigner de son parcours de vie, des embûches rencontrées, de la manière de les surmonter: c’est le projet que mène le groupe “Participations à la vie sociale” au sein de l’ACIH à Namur (1). Témoigner, cela permet de partager ses expériences avec celles et ceux qui vivent des situations similaires. Mais c’est aussi une manière d’ouvrir les yeux des bien portants et de susciter entraide et solidarité.

Ces parcours individuels sont à chaque fois des leçons de vie pour chacun d’entre nous. Ils trouvent tout naturellement leur place dans notre rubrique “Prendre la plume”. Deux de ces témoignages ont déjà été publiés dans le n° d’En Marche du 17 mai 2001.

Les chemins de l’autonomie

Né le 26 décembre 1959, je suis le septième garçon d’un foyer comportant douze enfants. Ma petite enfance se passe d’abord dans une famille d’accueil, puis dans une institution, chez des sœurs à Tournai. Ma tutrice suit les étapes de ma vie avec vigilance et générosité. Je me rappelle les énormes boîtes remplies de jouets et de friandises qu’elle m’envoyait aux fêtes de Saint-Nicolas et de Noël, ce qui provoquait la jalousie de mes compagnons. Alors, au milieu de tous mes présents, je partageais.

De Tournai, un Abbé m’amène à Wavre dans une modeste maison où je suis le premier pensionnaire. Ma vue faible, mes yeux constamment irrités soulèvent l’attention soucieuse des responsables. Des examens approfondis décèlent une maladie grave. Il faut opérer. J’ai trois ans. Je suis dans un lit d’hôpital et je ne comprends pas pour quelle raison je dois garder un bandeau sur les yeux…. J’entends les rires des enfants qui jouent et regardent la télévision, alors j’arrache le bandeau. Les infirmières accourent pour le remettre. Elles sont gentilles, elles m’apportent des cadeaux et me racontent des histoires. Elles savent que je dois rester dans le noir pendant un an. Enfin, je peux rentrer à Wavre, mais je suis obligé de porter des lunettes de soleil.

A mon arrivée, tous les habitants de la maison m’accueillent comme si j’étais un petit roi. C’est la fête et je n’ai plus mal aux yeux.

L’habitation étant trop petite pour recevoir les pensionnaires, nous devons partir et nous avons la chance de nous installer dans un château situé à Tailfer. C’est une époque heureuse où les dix garnements, de cinq à dix ans, que nous sommes, peuvent s’ébattre dans le grand parc. Deux filles et trois de mes frères viennent nous rejoindre.

A seize ans, je reçois un vélo et je ne peux contenir ma joie. Au bout d’un an, ce vélo m’est retiré car je roule dans les bois, m’écartant de la propriété.

Après plusieurs années passées dans les différentes écoles spéciales, j’apprends le métier de jardinier-fleuriste.

Mes vingt et un ans me donnent le désir d’être autonome. Je tiens bon pendant trois mois. J’ignorais combien la solitude est pesante…. C’est ainsi que le foyer “ L’aurore ” à Lustin m’héberge jusqu‘à l’âge de trente ans. Dans cet établissement, j’apprends à peindre, à cuisiner, à effectuer divers travaux. Je commence à faire du théâtre et j’y prends goût. Le moment est venu de passer des tests afin de savoir si je possède les capacités nécessaires pour vivre seul.

Mon premier logement me déçoit. Il est sans chauffage, sans eau chaude, sans aucun confort. La maladie m’accable pendant deux mois. Un copain de théâtre me trouve un autre logis nettement plus confortable que le précédent. Je n’ai toujours pas d’eau chaude. Qu’importe ! Je suis en ville et peux recevoir plus facilement mes copains. Avec eux, je participe aux activités de la JOC, je vais au cinéma, je découvre des choses intéressantes et surtout je peux parler à quelqu’un.

Quatre ans plus tard, je bénéficie d’une aide sociale. Profitant de mon absence, un responsable vient fouiller dans mes armoires. Ce geste indélicat me déplaît et je romps tout contact.

Me voici livré à moi-même ! Je peux m’en sortir puisque je sais me débrouiller seul, remplir des formalités, créer de nouveaux contacts. Je sais aussi me rendre utile.

La dépression guette mon entourage. Trois de mes meilleurs amis se sont suicidés.

J’essaie de garder un bon moral même si ma famille reste indifférente à mon égard. Mes cartes de Noël ne reçoivent jamais de réponse.

A certains moments, la tristesse surgit et m’empêche de manger. Heureusement que la musique me rend la joie de vivre ! Johnny Halliday et Michel Sardou sont mes chanteurs préférés.

La force morale me revient quand je vais en Allemagne, avec mes copains, rendre visite à Mère Meera. Cette rencontre nous est précieuse par l’affection qu’elle nous apporte.

Actuellement, je vis dans une petite pièce. Je ne reçois pas d’aide de l’AWIPH et je n’ai pas droit au régime VIPO. L’argent du chômage me permet de vivre.

Louis-Pierre

Aujourd’hui, je prends le temps de vivre !

Il y a 43 ans, je sors du ventre de ma mère…CATASTROPHE. J’ai un trou dans la colonne vertébrale, ce qui provoque l’écoulement de la moelle épinière en dehors de mon corps, cela s’appelle le spina-bifida (pour les intimes…).

La seule solution était de me pendre par les pieds sur une “ solide ” corde à linge et, pour couronner le tout, je subis un léger grossissement de la tête suite à ces “ gymnastique ” obligatoires. Mais je le jure, je n’ai pas la grosse tête ! Je grandis…(Heureusement !).

De 3 à 7 ans, je vis en pension à Bruxelles, ce qui ne me plaît pas beaucoup et engendre chez moi des difficultés d’intégration et de suivi scolaire.

Mon médecin traitant décide alors de me “ rapatrier ” à la maison, pour pouvoir jouir de l’ambiance familiale qui me manquait tant !

Dès ma “ tendre ” jeunesse mon corps a exigé d’énormes interventions médicales, mes années scolaires et activités professionnelles ont donc été entrecoupées d’opérations diverse afin d’améliorer mon handicap et très certainement aussi ma vie quotidienne.

A 21 ans donc, après pas moins de 32 chirurgies (pas si esthétiques que ça !), j’en ai eu enfin fini avec l’hôpital et ses désagréments. Ouf ! J’ai pu définitivement commencer ma Vie…

Ouvrez-moi la porte

Hydrocéphale de naissance, je souffre d’un handicap de la vue. Aujourd’hui, j’ai 29 ans. Je suis une fonceuse qui sait se faire entendre. Et pourtant…

J’ai toujours fréquenté l’enseignement ordinaire (dans différentes écoles quand même, car c’est dur l’intégration quand on est pas comme les autres). J’ai suivi une “ spécialisation ” afin de travailler avec des enfants. Cela a toujours été mon rêve, malgré mon handicap. Mais on me laisse trop souvent rêver…

Trop souvent protégée pendant son enfance, je ne me connais pas; je n’ais pas confiance en moi. Je ne manque pas de projets cependant, mais les circonstances ne me permettent pas de les réaliser… Problèmes de santé, handicap pas suffisamment marqué pour bénéficier de quelques avantages sociaux tel que par exemple, la gratuité des transports. Et voilà plus qu’il n’en faut pour m’empêcher de m’occuper d’enfants. J’aimerais bien faire du bénévolat et une formation d’éducatrice afin de prouver mes capacités, mais trop souvent, on me fait espérer, on me responsabilise, et puis, on casse tout.

Actuellement, je vis seule en studio, mes repas sont souvent négligés et la télévision m’est une présence indispensable. Je suis bien entourée par mon médecin et mes voisins. Je parviens à gagner mon autonomie “ conditionnelle ” petit à petit, pas à pas, trop lentement.

C’est déjà cela pensez-vous ? Mais jusqu’à quand?

Stéphanie

(1) Pour tout renseignement, contacter Dominique Finken, animatrice du groupe “Participations à la vie sociale” - ACIH - Rue du Lombard, 8 - 5000 Namur. Tél.: 081/24.48.16. Fax: 081/23.08.94.