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Prendre la plume  (1 janvier 2004)

Demain, c’est Nouvel An

“Oyez, oyez, braves gens !”Un instant, la vie de la Cité s’arrêta.“Oyez, oyez, habitants !”Lorsque le tambour surgit, les gens du village tendent toujours l’oreille pour écouter les nouvelles.“Bram tabadabram. Boum, tabadaboum !”Sitôt le son du tambour fini, le crieur s’exclama : “Gens du Nord, gens du Sud, en vérité je vous le dis, demain c’est vendredi.”Étonnés, les habitants se partageaient entre l’amusement et l’inquiétude. Pas besoin de tambour, pour savoir le jour !“Demain, c’est Nouvel An”, hurla l’annonceur.Mais qu’a-t-il donc à annoncer ce fameux crieur ?“Jour des petits et jour des grands, pour tous, l’An Nouveau doit annoncer petits bonheurs et grandes joies.”Affairés à leurs achats de réveillon, les habitants eurent tôt fait de reprendre leurs activités. Ce soir, on fait ripaille. Les tables sont encore vides et il s’agit de les remplir. Si le crieur et son tambour n’a rien à dire, qu’il aille se divertir ailleurs avec ses banalités !“Demain vendredi, jour de Nouvel An…”“Bon, bon, ça va…” trépignent les habitants exaspérés.“… le Seigneur de la Cité va décréter une année “Charlotte aux fraises” !”Les habitants hurlent, sautent, dansent… ils sont fous de joie !Seul un étranger reste éberlué. “Sont-il tous fous dans cette Cité ?”, se demande-t-il.Petit Jean n’en croit pas ses oreilles. Cela veut-il dire que les dictateurs seront arrêtés ?! Cela fait tant d’années… Dame Simone n’en peut plus de pleurer. Cette année sera donc enfin celle de la liberté ?!Louis, haut comme trois pommes n’ose se réjouir. Bertrand, Sylvain et sa bande seront obligés de l’aider et cesseront de le taquiner ?! “Et les nantis devront partager !…”, crie un passant. “Les profiteurs vont enfin être ramenés à de plus justes desseins”, devisent deux dames respectables. “Les riches devront tout donner ? c’est bien cela ?” s’inquiète un gros homme d’affaires cravaté tout en sueur. “L’année Charlotte aux fraises signifierait-elle donc une année de paix et de solidarité ?”, s’interroge l’étranger qui n’a pas perdu une miette des discours qui l’entourait. “C’est la naissance d’un nouveau monde”, lui lance un dandy sautillant ayant remarqué l’air interloqué de l’étranger. “Après une année Baba au Rhum et une à la Crème glacée, nous sommes vernis, croyez-moi !”, La perspective d’habiter dans cette Cité dénuée de danger amuse beaucoup l’étranger. Séduit par tant de mines enjouées, il décide de s’y installer dès la Nouvelle année !

Françoise Robert