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Prendre la plume (19 septembre 2002)

 

Merveilleuse candeur…

 

Il est des jardins qu’on voudrait pouvoir regarder avec des yeux d’enfants. Et ces jardins, qui depuis quelques jours débordent de fleurs aux couleurs chaudes, où le calme n’est troublé que par des pas sur les graviers, ce sont les cimetières de nos campagnes.

 

Cette pensée me ramène bien en arrière, un certain après-midi d’automne, à l’époque où ma petite fille avait sept ans. Nous habitons près du bois, dans un joli village vallonné. Ce dimanche-là, Florence et sa petite amie Vanessa, deux petits bouts de femme bien décidés, rêvaient de s’évader un peu, pas trop loin disaient-elles avec des yeux rassurants, mais surtout de partir à la découverte de ces petits fruits lisses et brillants bien protégés dans leur nid de piquants : les châtaignes. Elles en avaient parlé toute la semaine : “Pourra-t-on y aller au bois ? Est-ce que cela pique fort les châtaignes ? On les fera cuire, hein maman, et j’en porterai à l’école !”.

 

Elles étaient ravies d’avoir obtenu notre permission. A condition bien sûr de rester à l’entrée du chemin et de regarder la montre de temps en temps. Toutes deux avaient un petit vélo. Ils devenaient vieux ces trois roues, car ils avaient souffert à rouler sur les bosses de la pelouse, à faire crisser les pneus sur les cailloux du sentier. Mais le petit coup de pédale et l’enthousiasme aidant, voilà les copines rayonnantes parties en balade.

 

L’air était doux et les couleurs de l’automne une réelle palette aux tons cuivrés. Notre intention, à nous les mamans, étaient de leur faire une surprise et de les rejoindre. Vers seize heures, jouissant de cette ambiance privilégiée où l’on fait corps avec la nature, nous avons suivi un peu leurs traces, marchant vers les grands arbres, dont on voit déjà la crête de chez nous. Les petites filles n’étaient pas dans le sentier aux mûres où l’on aurait pu dénicher nos deux coquines. Nous étions inquiètes. Après plusieurs allées et venues dans tous les sens, nos pas pressés nous ont ramenées vers le village dont nous avons fait le tour en questionnant l’un ou l’autre passant.

 

A l’entrée du cimetière, au bout de la rue déserte, les petits vélos sont là, adossés à la grille. Les paniers sont pleins de châtaignes. Ouf ! On respire, on a eu un peu peur ! Et voilà les petites amies souriantes qui ont plein de choses à nous raconter. Ce n’est pas le moment de poser des questions ni de faire la leçon. Elles viennent de découvrir pour la première fois le jardin du silence et du repos. Elles en ont composé une histoire, “leur histoire” ! Et leurs yeux, leurs paroles ont une candeur rafraîchissante.

 

“Tu sais maman, on s’est assise sur les tombes, comme ça les gens n’étaient plus tout seuls. On regardait leur photo. Il y a des vieux monsieurs avec des grandes moustaches et des madames très vieilles habillées tout en noir. On a pensé que c’était des bons-papas et des bonnes-mamans. Alors on est allé voir les tombes des petits enfants. On aimait bien de rester avec eux. On a tiré les mauvaises herbes et… on a pris… quelques fleurs, là, comme ça ils étaient contents les petits enfants. Et on a embrassé leur photo. On viendra encore, dis maman, on apportera des fleurs du jardin ?”

 

Merveilleuse candeur d’enfant, qui n’a pas encore été abîmée !

Mais oui, nous retournerons porter des fleurs. Et nous, les adultes aux souvenirs parfois bien lourds, aux mille et un soucis, nous prendrons une grande bouffée d’air frais à les écouter, à les regarder vivre joyeusement car ils ont tout l’espoir du monde et leurs yeux sont pleins de jardins…

 

Cécile Terrier-Tournay