Dans
les livres (1er septembre 2011)
Petite reine de Saba
“La
petite reine de Saba - chronique des lointains” s’ouvre à l’heure
de rien, celle où tout est calme et en devenir. L’heure des promesses
pour une petite fille dont cet ouvrage est le récit de vie.
Maïmouna – Désir – est née des amours taboues entre une jeune
comorienne et un pêcheur indien, dans les Comores, archipel volcanique
ancré entre le Mozambique et Madagascar. Des parents qui ne
l’accompagneront pas plus loin, puisqu’ils disparaissent tous deux. Ils
lui laissent pourtant ce qui va guider son existence : son métissage.
Etre noir, être blanc ? Que cela signifie t-il pour elle, vivant dans
son île ? Pourquoi ses familles – celle de son père, de sa mère et sa
famille de cœur - se sentent-elles si différentes ? Qu’emporte t-elle de
son île et de ses coutumes lorsqu’elle décide de traverser le cordon
d’eau pour rejoindre un pays dont les rigueurs pluvieuses
l’impressionnent, la Belgique ?
Rose Nollevaux est namuroise, comédienne, pédagogue et écrivain. Elle
propose ici un roman dont les personnages sont fictifs, mais sous la
forme éclairée de la chronique. Les lieux, les ambiances, les faits
historiques sont avérés. C’est sensuel dans les Comores, avec les grands
mariages en août chantant, les plats épicés, les traditions musulmanes
et “les bons djinns protecteurs”. C’est criant de précision
avec la gare du Nord, la chaussée d’Haecht, le parc Josaphat et le
fameux tram 25, lorsque Maï décide de changer son destin et de rejoindre
son amie religieuse à Bruxelles.
Maï, devenue jeune femme, a son île dans la peau, et projette de la
rejoindre, forte de ce qu’elle a appris et découvert d’elle même.
“Ami de la page écrite”, comme aime à nous interpeller l’auteure,
Maï pourra t-elle réaliser ce voyage ? Un livre généreux et
interpellant.
//Anne
Hubinon
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Petite reine de Saba
•
Rose Nollevaux
•
édition Memory Press
•
2010
•
17 EUR.
Kosaburo 1945
Ecrire
un premier livre, c’est “presque” donner naissance à un enfant. Il y a
une délivrance. Nicole Roland, auteure namuroise et lauréate du prix
Première 2011 avec “Kosaburo 1945”,
a jeté les ponts entre ces deux naissances.
Sous les traits de son héroïne, Mitsuko, elle a caché Hélène, sa fille
défunte. Une façon de lui raconter encore une histoire, de retrouver un
espace, hors du temps, où elles peuvent être ensemble.
Dans le Japon des années 40, de jeunes universitaires sont embrigadés
par la propagande inspirée du code des Samouraïs. L’élite est ainsi
sacrifiée pour l’honneur du pays et celui de son Empereur. Ils
fracassent leur jeunesse et leur avenir pour intégrer les camps
d’entraînement des kamikazes. Mitsuko, elle, va se faire passer pour son
frère déserteur, et suivre clandestinement son amour de jeunesse,
Kosaburo. Elle devra y faire preuve d’abnégation et de bravoure, taire
son identité et ses sentiments amoureux.
Cette histoire devrait nous mener dans la fureur et le sang. La mort,
présente à chaque page comme un appel que ces jeunes ne peuvent refuser
d’entendre, doit être apprivoisée et accueillie. Espérée même au nom de
l’honneur.
Pourtant, Nicole Roland parvient à rendre le récit doux et poignant,
sincère et délicat, raffiné même. Avec une grande délicatesse et un art
consommé de la poésie, elle nous offre un petit bijou empreint de
solennité japonaise.
//Anne Hubinon
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Kosaburo 1945
•
Nicole Roland
•
Actes Sud
•
2011
•
17,20 EUR.
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