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Dans les livres (3 octobre 2013)

“On n’invente pas, on se retrouve”

Quatre auteurs belges nous font voyager ici et ailleurs, font de nous, leurs lecteurs, les témoins de rencontres humaines et littéraires, nous proposent d’explorer le monde proche, le monde lointain et le monde enfoui au plus profond de nous-mêmes.

Un couple, un jour, achète une maison en vente publique. Rue de la Luzerne 20, à Schaerbeek. “La belle maison”, dira leur petit garçon. “Pas n’importe quelle maison…”, a précisé le notaire. Il s’agit en effet de la maison qu’ont habitée, des années durant, l’écrivain Louis Scutenaire et sa compagne de toute une vie, sa femme, Irène Hamoir.

C’est avec émotion que Pascale Toussaint, professeure de français, passionnée de littérature belge et fervente admiratrice de l’écrivain, découvre et prend possession de ces lieux. Elle décrit les pièces et leur disposition, les murs criblés de trous des clous où étaient suspendues les œuvres de Magritte, grand ami du couple…

C’est dans cette maison où Scutenaire a écrit et peint que l’auteure rédige J’habite la maison du Louis Scutenaire, empruntant aux ‘inscriptions’ de son prédécesseur les titres des chapitres. Ceux-ci font alterner les évocations de la vie du célèbre couple et celles de la famille qui occupe les lieux aujourd’hui. Cela donne un livre original, ni essai, ni roman –même si c’est ainsi que l’éditeur le présente – et peu académique, ce qu’aurait apprécié l’auteur surréaliste. “On n’invente peut-être pas, on retrouve. L’inspiration, c’est peut-être la mémoire”, avait écrit Scutenaire. Pascale Toussaint a placé cette phrase en exergue de ce premier livre et cela en définit bien la démarche et le ton.

C’est également une évocation, plus classique, que propose La forêt d’Apollinaire de Christian Libens. Le romancier s’inspire du séjour qu’Apollinaire a fait à Stavelot en juillet 1899. A l’époque, il n’est encore que Wilhem Apollinaris de Kostrowictzky et ignore qu’il deviendra un immense poète et que la guerre le brisera. Au fil des chapitres, Christian Libens alterne lui aussi les époques. Il prête sa plume à Pierre, jeune instituteur en 1899, devenu un vieil homme à l’automne 1969 et qui se remémore sa rencontre avec Wilhem et son frère, leur amitié et le premier amour du poète avec Maria Dubois. Si Pierre est un personnage de fiction, si l’auteur met son grain de sel dans les dialogues et situations, tous les faits relatés sont bien documentés. Et le tout donne une jolie promenade dans le passé, dans une région magnifique, et rend leur place aux vibrantes amours de l’auteur des Calligrammes.

Il pleut beaucoup sur les trottoirs de Bruxelles où Michel Lambert saisit quelques instants de vie. Il fait gris dans les rues de Paris, dans le port d’Anvers ou à Moscou où il campe des moments d’existence. Dans le dernier de ses ouvrages, Le métier de la neige, l’écrivain est revenu à la nouvelle, une forme qui lui est chère et qu’il maîtrise avec brio. Dans la nouvelle qui donne son nom au livre, il écrit ces mots superbes : “(…) il avait le sentiment (…) de tomber à son tour. Une chute vertigineuse. Quand la neige tombait, ce n’était pas du tout la même chose, surtout la nuit, c’était comme si le ciel vous envoyait des millions, des milliards de petites lumières en signe d’allégresse, pour vous chuchoter que la vie était magique, qu’elle valait qu’on fit des bonds de joie, que tout était dans le mouvement, dans le tourbillon des peines oubliées”.

Mais, de nouvelle en nouvelle, ce sont des moments de brisure, de chute que l’auteur évoque et, de portrait en portrait, les hommes et les femmes dont il capte quelques bribes d’existence portent leur cœur en bandoulière plutôt qu’ils ne dansent de joie… L’auteur excelle à dessiner des vies zébrées de petites fêlures. Le métier de la neige s’inscrit dans cette veine.

Le muzungu mangeur d’hommes, quant à lui, emmène les lecteurs au cœur de l’Afrique sur les traces de Lies et Arno, venus des Pays-Bas. Elle est médecin et va diriger un hôpital. Il a accepté de l’accompagner. Sur place, l’Afrique va s’imposer à eux de manière bien différente. Chacun va suivre son chemin, l’une en Europe, l’autre – le muzungu, le blanc – près du grand lac Kivu. Mais la vie et l’Afrique les réuniront à nouveau.

Né au Rwanda, l’auteur vit à Bruxelles depuis une vingtaine d’années. Son livre est porteur de sa connaissance intime de deux cultures si différentes et si riches qui ont tout à gagner de leur (re)connaissance mutuelle au-delà des rumeurs – le mangeur d’hommes – et des préjugés.

// ANNE-MARIE PIRARD

>> Pascale Toussaint, “J’habite la maison de Louis Scutenaire“ • éditions Weyrich, 2013 • 180 p. • 14 EUR.

>> Christian Libens, “La forêt d’Apollinaire“ • éditions Weyrich • 2013 • 184 p. • 14 EUR.

>> Michel Lambert, “Le métier de la neige“ • éditions Pierre-Guillaume de Roux • 2013 • 190 p. • 14,90 EUR.

>> Joseph Ndwaniye, “Le Muzungu mangeur d’hommes“ • éditions Aden • 2012 • 143 p. • 14 EUR.

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