Instants en équilibre
(17 octobre 2013)
Quinzaine après quinzaine, Christophe André, psychiatre français, livre dans
En Marche une vingtaine d’histoires et leurs enseignements, comme autant de leçons de sagesse, au plus près du quotidien, pour avancer sur le chemin de l’équilibre intérieur et de la sérénité.
La photographie est de Myriam El Takriti, étudiante en photographie à l’école des arts et de l’image, Le 75. Elle a été réalisée à la demande du journal
En Marche, avec le soutien de la Loterie nationale.
Ne pas ruminer
|
© Myriam El Takriti - Le 75 Cliquez sur la photographie pour l'agrandir |
En ce moment, tu es souvent dans la lune. Absent. Ailleurs. Ton corps est bien là, mais ton esprit est ailleurs, dans tes pensées, tes rêveries. Et surtout, hélas, dans tes ruminations : tu ressasses tes tracas, tes tourments, tous les petits rien-du-tout qui te prennent la tête. Alors ta voiture va toute seule là où elle a l’habitude d’aller, et tu ne te souviens même pas de l’avoir conduite. Alors tu poses tes clés et tes affaires quelque part en rentrant chez toi, mais tu ne sais ensuite pas où tu les a posées. Tu lis une histoire à ton fils mais ton esprit s’évade et part, aimanté par “toutes les choses que tu as à faire…”
Quand tu rumines, tu te focalises, de manière répétée et stérile, sur les causes, les significations et les conséquences de tes problèmes. Tu restes inactif, assis sur tes soucis que tu gardes bien au chaud, sous toi, en les faisant croître. Tu as remarqué que tes ruminations passent souvent inaperçues à tes propres yeux, car tu crois alors réfléchir. Mais la rumination n’est pas une vraie réflexion, elle est stérile : elle génère de la souffrance, mais pas de solutions. Elle étale dans le temps les soucis et événements malheureux, comme s’ils n’étaient pas déjà assez ennuyeux tels quels.
Elle les dilate, les
répand dans toute notre vie, le passé (“c’est parce que je n’ai pas
fait ce qu’il fallait que tout cela arrive…”) et le futur (“cela
va entraîner ceci et cela…”). Quand tu rumines, c’est comme si tu
écoutais un vieux disque rayé, qui ressasserait indéfiniment le même
passage, et que tu n’arrives plus à le retirer de l’appareil, ni à
couper le son, ni même à quitter la pièce.
Dans ces moments, tu sais que ton cerveau n’arrive pas à freiner les ruminations : alors, mieux vaut sortir, bouger, marcher, courir, ranger, bricoler, bref faire quelque chose de simple avec ton corps. Il est aussi là pour ça !
EXTRAIT DE L’OUVRAGE “SÉRÉNITÉ. 25 HISTOIRES D’ÉQUILIBRE INTÉRIEUR”/
CHRISTOPHE ANDRÉ / ÉD. ODILE JACOB / 2012
|