Cinéma
1er juin 2006
Sauf le
respect que je vous dois
Olivier
Gourmet excelle dans un polar social de Fabienne Godet, l’histoire d’un
homme qui se lève enfin pour dire non à la violence psychologique sur son
lieu de travail.
François
est cadre dans une imprimerie. Un boulot passionnant, exigeant. D’ailleurs
tout le monde se donne à fond dans cette entreprise. Le directeur pratique
le “management participatif” ou la convivialité stratégique. Quand il
demande à François de renoncer à sa semaine de congé en famille, une grande
tape dans le dos aide à faire passer la pilule. A la maison, ça passe moins
bien, c’est sûr, mais l’important est d’avoir un boulot… et de le garder.
Son ami Simon, lui, est moins
souple et choisit d’affronter la hiérarchie. Un jour, on le retrouve mort
sur son lieu de travail, suicidé d’une façon atroce. Pour François, c’est
l’électrochoc. Au-delà du suicide de son ami, c’est la passivité et la
soumission de ses collègues qui vont le forcer à enfin ouvrir les yeux.
Jusqu’à ce qu’un autre drame lui fasse totalement perdre pied...
La réalisatrice Fabienne Godet
explique : “L’histoire de François est celle d’un homme qui se réveille
et qui choisit de dire non. Non à une violence psychologique invisible à
laquelle il a été soumis. Son réveil est d’autant plus brutal et violent
qu’il est tardif.”
Psychologue de formation, la
réalisatrice travaillait dans l’accompagnement des mourants lorsqu’un
“nettoyeur” est arrivé dans son entreprise: “En mettant la pression, leur
objectif était de nous virer au coût zéro. Fautes lourdes, dépressions,
licenciements abusifs. Peu de temps après, j’ai commencé à travailler sur ce
projet de film. On a ressenti le besoin de mettre de la fiction, d’emmener
le récit du côté du polar. Il ne s’agit pas de raconter fidèlement ce qui
s’est passé mais de rendre compte d’un certain nombre de questions : de
quels arrangements sommes-nous capables pour tolérer ce que nous jugeons
moralement intolérable? Pourquoi, à un moment donné, un individu se
soumet-il librement à quelqu’un qu’il ne respecte même pas ?”
Lors de la projection du film en
avant-première organisée par “Le cinéma d’Attac”(1), Matéo
Alaluf, professeur de sociologie du travail à l’ULB, rappelait les dangers
de l’individualisation des problèmes sociaux, de la “psychologisation” des
relations de travail qui verrait se multiplier les “personnalités fragiles”,
rétives aux changements et autres innovations technologiques
(2).
“L’expression “Sauf le
respect que je vous dois”, c’est un peu comme “Va te faire foutre”,
explique Olivier Gourmet, qui porte entièrement le film sur ses larges
épaules. On a beaucoup trop de respect par rapport à certaines choses. Et
ce film veut dire “ça suffit”, sans prétention, sans donner de leçon, avec
même un certain plaisir de divertissement”.
Linda
Léonard
(1) Le
cinéma d’Attac :
www.arenberg.be/f/attac.html
(2) Matéo
Alaluf, “La psychologisation des conditions de travail : le privé, le public
et la morale”, K. Vladimirova (Ed).
“Sauf le
respect que je vous dois”,
de Fabienne Godet, avec
Olivier Gourmet, Dominique Blanc, Julie Depardieu, Bérénice Béjo. Scénario
de Fabienne Godet et Franck Vassal.
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