Recherche :

Loading

La rédaction

Notre histoire

Newsletter

Nous contacter

Une erreur dans votre adresse postale ?
Signalez-le

Actualité

Culture

International

Mutualité Service

Santé

Société

Nos partenaires

Visitez le site de la Mutualité chrétienne

Cinéma  ( 15 octobre 2009)

 

La boîte de Pandore

Tsilla Chelton interprète magistralement une veille dame turque dont la maladie sera le révélateur des fêlures familiales.

Nusret vit seule dans un village haut perché de la campagne turque. La maladie d’Alzheimer grignote lentement ses souvenirs. Elle trie des baies sur la terrasse et tend son visage à un soleil doux quand soudain le sourire se crispe, et l’angoisse brouille les traits burinés. Elle recule alors lentement dans l’ombre de sa maison, comme dans les profondeurs de sa maladie. Quand il devient évident qu’elle ne peut plus rester seule, ses trois enfants qui vivent à Istanbul entameront le voyage “au village” pour la ramener avec eux en ville. Pour Nusret, ce sera un arrachement et comme une renonciation. Désormais, la maladie prendra toute la place et, de sa mémoire lézardée, comme d’une boîte de Pandore – qui, selon la légende, contenait tous les maux de l’humanité –, s’échapperont des vérités jusque là bien gardées. Vérités qui mettront en lumière les petits travers de chacun mais aussi toutes ces dissimulations, petites et grandes, qui semblent cimenter la vie de famille.

Impossible désormais pour Nesrin, la fille aînée, de cacher ses difficultés conjugales sous le glacis d’une vie domestique parfaite. Impossible pour Gusin, la cadette, d’encore enjoliver ses déplorables histoires d’amour, ou pour Mehmet de théoriser ses choix de vie nihilistes.

Tassée, voûtée, le cheveu de crin, c’est la grande Tsilla Chelton qui interprète le rôle quasi muet de la vieille dame malade. Tout le monde la connaît dans le rôle de Tatie Danielle, dans le film d’Etienne Chatilliez, en 1990. Dans “La boîte de Pandore” aussi, elle s’oublie sur la moquette du salon et part en vadrouille à la moindre occasion. Mais, ici, rien ne prête à rire: c’est la maladie qui parle, et plus la malignité.

Dépression, précarité, sénilité, crise d’adolescence et de la quarantaine: toutes les crises de la vie semblent ici prises en compte, et ça fait vraiment beaucoup pour un seul film. Les personnages en deviennent un peu caricaturaux, et la seule lueur positive, du fait du petit-fils, se devine vraiment de loin. Il n’empêche, Tsilla Chelton évite tous les pièges du pathos, et la chronique exhale une mélancolie sourde pas désagréable. La campagne turque nous semble familière sous la lumière dorée d’un automne finissant. Et Istanbul singulière, de béton blanc et de ciel gris.

La boîte de Pandore, qui était en fait une jarre, contenait aussi l’espérance, ou plus exactement l’anticipation des maux à venir, qui y resta coincée et qui, de tous les maux, est peut-être le pire. C’est de cela qu’il s’agit ici, de la crainte devant une situation qui ne fera qu’empirer, du deuil avant le deuil.

Linda Léonard

 

La boîte de Pandore, de Yesim Ustaoglu, avec Tsilla Chelton, Onur Ünsal, Derya Alabora, Ovul Avkiran. 1h52’


Retour à l'index "Culture"

haut de page