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Éditorial (18 janvier 2007)

 


 

Lettre ouverte à ma chère Europe

 

Ma chère Europe, je m’inquiète de toi! Les nouvelles qui m’arrivent me font craindre le pire. L’aube d’une année est toujours l’occasion de prendre des nouvelles de sa famille, de ses amis…

 

Comme on ne sait pas se construire un futur sans se souvenir, comprendre et repenser son passé, je reviens à tes premières années… Je ne peux jamais les évoquer sans une certaine émotion...

Tous ces hommes d’Etat qui ont souhaité ta naissance. Ils avaient des rêves de paix, de prospérité dans et pour une Europe nouvelle; et surtout pour les citoyens européens.

Pour ce qui concerne la paix, on peut te féliciter: tu ne les as pas déçus. Bravo à toi!

Le défi n’était pas simple et tu l’as remarquablement relevé. J’en connais qui feraient bien de te consulter. Tu devrais d’ailleurs un peu plus oser leur proposer tes services, tes réflexions, ton expertise…

Pour ce qui est du grand marché, tu nous as facilité notre vie de consommateurs, notre vie de producteurs, notre vie de voyageurs.

Mais tu m’inquiètes...

Ces hommes et femmes avaient bien compris que pour assurer la paix, que pour assurer le bien-être des citoyens et le développement durable du marché économique, il faut aussi assurer le développement des individus, leur assurer des filets de sécurité sociale, leur garantir un égal accès à des soins de santé de qualité.

En Belgique, ils ont pu le faire d’autant plus facilement que nous avions mis en place, de manière spontanée et puis structurée, des organismes tels que les mutualités. Tu connais notre attachement à la liberté d’association et d’initiatives des hommes et des femmes, notre mixité bien comprise entre les services publics et les associations. Cela fait parfois de nous des êtres un peu à part dans notre grande Europe, mais cette dynamique mixte fonctionne bien dans l’intérêt de tous. Et pour nous, cela fait 100 ans que cela dure!

Aujourd’hui, on sait que tu n’es pas d’accord avec cette organisation de notre couverture de soins de santé.

On sait que tu attaques l’Etat belge parce qu’il “protègerait” le marché de l’assurance des soins de santé. Tout ça parce que quelques sociétés privées cherchent à faire du profit rapidement.

Notre réponse est précise, nette, solidaire et déterminée: la santé n'est pas et ne sera pas un marché!

Tu remets en cause l’existence des assurances solidaires organisées par les mutualités, régies par une loi spécifique et très stricte, pour permettre aux compagnies d’assurances de vendre les mêmes services sans égalité de traitement, sans cotisation égale pour tous, en permettant la sélection des risques.

Pourtant, tu le sais, toi qui t’intéresses d’abord et avant tout à l’économie libérale que la stabilité de la santé des travailleurs est un facteur de prospérité et de stabilité sociale.

Pourtant, tu sais que les mêmes garanties sont beaucoup plus chères dans les autres pays. Sais-tu qu’aux Etats-Unis, ce sont les entreprises qui demandent que l’Etat reprenne les assurances complémentaires parce que les assurances privées sont devenues impayables pour les employeurs?

Tu privilégies toujours le marché, les règles du commerce libre et de la concurrence comme si cela réglait tout. Penses-tu que l'efficacité ne peut être atteinte qu'avec la libéralisation de tous les marchés? Faut-il que tout devienne marché?

Quand les travailleurs seront fragilisés parce que la couverture d’assurance maladie sera segmentée, crois-tu que leur efficacité va augmenter? Quand les compagnies d’assurances privées, dont l’unique objectif est de faire du profit à cour terme, refuseront de couvrir les plus fragilisés et les risques les plus importants, réduisant ainsi la santé à un simple “article de vente”, penses-tu que tu auras fait progresser l’efficacité?

Je me permets de souligner les efforts faits par le ministre de la santé actuel pour stabiliser les dépenses en soins de santé dans notre pays. Connais-tu les deux secteurs où il éprouve le plus de difficultés? Les médicaments et les factures d’hôpitaux! Pourquoi? Parce que, en ce qui concerne les factures d’hôpitaux, l’explosion des coûts s’explique en grande partie par le fait que le marché des assureurs porte atteinte aux équilibres mis au point par la négociation entre les mutualités, les médecins et le gouvernement.

L’ouverture au marché ne permet pas toujours la baisse des prix, une meilleure offre et une augmentation de la qualité du service.

L’ouverture récente du marché de l’électricité en Belgique conduit les habitants du Luxembourg belge et des cantons de l’Est à payer plus cher leur facture. Les communes qui doivent assurer un service à tous (très utile pour garantir la sécurité) voient leurs factures exploser (l’augmentation est parfois de 60%)…

Elle est où ta régulation par le marché? Quand les entreprises ne voudront plus aller s’installer en province du Luxembourg, en quoi auras-tu rempli ta mission? Quand les habitants de ces régions viendront augmenter la pression immobilière sur les grandes villes, en quoi auras-tu fait avancer ton projet?

Es-tu certaine que le marché doit être accessible à ceux qui prétendent que les soins de santé sont des produits comme les autres?

Sais-tu que nous avons en Belgique une couverture qui est l’une des plus larges et des mieux organisées au monde pour le coût le plus faible. Les autres pays paient beaucoup plus cher pour l’organisation de l’administration de soins de santé, n’en déplaise à certains!

J’ose espérer qu’avant de sabrer dans notre solidarité, avant de casser un système qui fonctionne et qui permet à tous et à toutes une véritable couverture de ses risques de santé, tu vas réfléchir. Même dans l’intérêt cynique du marché pseudo économique, réfléchis dans un cadre plus large, penses au projet global, pour les européens d’aujourd’hui et de demain.

 

Il n’en va pas ici de la simple survie de nos mutualités. La question centrale est: la santé est-elle un marché? Notre réponse est précise, nette, solidaire et déterminée: la santé n’est pas et ne sera pas un marché!

Je te souhaite une année 2007 solidaire car je sais que tu peux l’être. On en reparlera sans doute très vite de vive voix!

 

Alda Greoli

Secrétaire nationale

 

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