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Éditorial (16 février 2006)

 

Les prix insupportables des nouveaux médicaments !

 

Les prix de certains nouveaux médicaments pour le cancer sont exorbitants : de 25.000 à 34.000 euros par an par malade, pour certains types de cancer. Les bénéfices en santé justifient-ils ces prix? Comment allons-nous financer ces coûts? Est-ce bien raisonnable? A quels soins devrons-nous renoncer ?

 

L'envolée du marché des anticancéreux est spectaculaire. Selon certaines projections, le traitement du cancer représentera le premier marché pharmaceutique en 2008. Le chiffre d’affaires atteindrait 41 milliards de dollars ! A quel prix ?

 

Nouveaux médicaments à prix astronomiques

Pour atteindre ces chiffres d’affaires, les firmes pharmaceutiques proposent de nouveaux médicaments à des prix (artificiellement?) très élevés. Exemple : le 23 janvier, le ministre propose de rembourser un médicament pour un certain type de cancer au-delà des indications actuellement reconnues. Il s'agit d'une indication qui est encore en cours d'évaluation par l'EMEA, l'agence européenne officielle chargée de l'enregistrement des médicaments. Cette proposition ne comporte aucune mesure sur le prix, alors que le nombre de bénéficiaires "traitables" passerait, par an, de 250 actuellement, à plus de 1.250 pour l'ensemble des deux indications. Le prix actuel de ce nouveau médicament est extrêmement élevé: 34.000 euros par an par malade, soit un budget d'un peu plus de 42 millions d'euros par an pour 1.250 malades, pour un gain, en termes de survie, qui reste encore à déterminer pour la nouvelle indication. Vu l'importance du budget, et le fait que la nouvelle indication n'est pas encore acquise, le Comité de l'Assurance de l'INAMI a demandé plus d'information sur la sécurité et sur les mesures prévues pour maîtriser le coût, avant de donner son feu vert…

D'autres médicaments, remboursés depuis le 1er août 2004 pour des maladies dites "orphelines", qui visent des affections extrêmement rares, coûtent 50.000 euros, 200.000 euros, voire 300.000 euros par patient. Ces «nouveaux» prix sont-ils justifiés? Comment allons-nous pouvoir les financer?

 

Des prix sans mesure entraînent des choix irrationnels

Pour expliquer les prix très élevés des nouveaux médicaments, l’industrie pharmaceutique invoque le coût énorme de la recherche et le fait que ces médicaments sont tellement ciblés qu’ils ne concernent qu’un très petit nombre de patients. Comme ces médicaments sont en général importés nous ne disposons généralement  d’aucune information sur les composants, tel que la recherche, expliquant le coût élevé de ces médicaments. A défaut d’information sur les coûts précis de ces nouveaux médicaments, les résultats financiers publiés par les grands groupes pharmaceutiques donnent quelques indications. Le magazine Fortune classant les plus grandes entreprises à l’échelle mondiale évalue le coût de la recherche par industrie pharmaceutique à 11% du chiffre  d’affaire et le coût de la publicité et du marketing à 26 % ! Les profits oscillent entre 15 et 20 %.  Alors qu’est-ce qui coûte cher dans les prix des médicaments?

 

Un prix élevé est aussi invoqué par le petit nombre de patients concernés par les nouveaux médicaments. Mais si par la suite, les indications sont élargies et que l'on multiplie par 5 le nombre éventuel des personnes concernées, il serait normal de diviser le prix du médicament par 4 ou 3, mais là rien ne bouge. On atteint ainsi 42 millions d'euros pour traiter 1.250 malades. Par ailleurs, en réduisant le prix, on pourrait offrir le médicament à bien plus de malades.

 

Cet argent, on ne pourra pas le dépenser deux fois. Le budget de l’assurance maladie obligatoire est fixé. Pour certains, avec une croissance de 4,5 % (en termes réels) par an, il augmente déjà beaucoup trop. Pour financer ces nouveaux médicaments, nous devons donc  renoncer à la couverture d’autres besoins : le sous-financement  des hôpitaux, la création de places en maisons de repos et de soins, un meilleur remboursement et traitement de la douleur chronique, la revalorisation des actes intellectuels, le soutien de la prévention, une meilleure couverture des besoins primaires des malades chroniques … Avec 42 millions d’euros on peut financer 1.100 emplois permanents pour satisfaire ces besoins. Alors le prix élevé des nouveaux médicaments est-il justifié ?

 

Les prix élevés des médicaments doivent être au centre d'un débat politique

Les prix annoncés pour les nouveaux médicaments aujourd’hui et à venir risquent de conduire notre système d’assurance maladie  à la faillite. Il est urgent de remettre les questions d’intérêt général au centre d’un débat politique vital pour le maintien de l’accès aux soins essentiels : Qui choisit les domaines de recherche ? L’industrie pharmaceutique ou la société ?

 

Qui fixe les prix en toute transparence et avec quel profit ? Qui informe les médecins ? Les délégués des firmes ou un service publique ? Qui peut prescrire des médicaments chers ?

Qui contrôle le bon usage de ces médicaments? Qui évalue en toute objectivité les bénéfices et les effets secondaires des nouveaux médicaments ?

 

Les prix élevés des nouveaux médicaments minent les fondements de notre système social d’assurance maladie. Les autorités politiques doivent ouvrir le débat. Il est temps de reprendre l’initiative pour éviter que les intérêts financiers de l’industrie pharmaceutique prennent le pas sur l’intérêt général dans le domaine de la santé.

 

 

Jean Hermesse

Secrétaire National

 

 

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