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Éditorial (16 juin 2005)

 

Prescrire les médicaments les moins chers

 

Le secteur des médicaments est celui qui pèse le plus dans le déficit de l’assurance maladie. Des économies importantes pourraient cependant être réalisées si les médicaments les plus chers étaient remplacés par des médicaments équivalents mais moins chers, quand cela est possible.

Mais comment encourager la prescription des médicaments moins chers ? Qui est responsable ?

 

Le déficit de 2004 était pour 73 % imputable au dépassement du budget des médicaments (soit 371 millions d’euros). Un nouveau dérapage en 2005 serait catastrophique pour les finances de la sécurité sociale. Et, in fine, ce sont les patients qui en feront les frais car ce sont eux qui subiront les mesures d’économie.

Pour éviter ce scénario catastrophe, c’est maintenant qu’il faut agir sur les dépenses des médicaments. Outre la réduction des prix des médicaments anciens et la réduction des volumes, on peut aussi encourager la prescription et le choix de médicaments équivalents moins chers. Et cela en vaut la peine ! Tout le monde y gagnerait.

 

L’assurance maladie et les patients y gagnent

 

En comparaison avec des pays voisins tels que les Pays-Bas, l’Allemagne ou le Royaume-Uni, la part des médicaments génériques moins chers en Belgique est encore dérisoire bien qu’en augmentation constante. Nous atteignons maintenant seulement 16 %. Or, ces médicaments, strictement contrôlés et équivalents aux médicaments de marque, ont les mêmes effets pour les patients. Par contre, les gains pour l’assurance maladie sont énormes. Par exemple, une boîte de 98 comprimés de 40 mg de ZOCOR coûte 123,56 EUR (dont 15,30 EUR à charge des patients) alors que une boîte de médicaments équivalent le moins cher (SIMVASTATINE TEVA coûte 55,96 EUR (dont 13,99 EUR à charge du patient).

Ainsi, si on remplaçait tous les médicaments prescrits aujourd’hui par les médicaments les moins chers, l’assurance maladie ferait une économie de 90,5 millions d’euros et les patients une économie de 60,2 millions d’euros ! Quand on sait que dans le coût à charge des patients les médicaments représentent la plus grande part, cette économie n’est pas négligeable! Certains médecins ont parfaitement compris l’ampleur de ces enjeux financiers : 80 % des médicaments qu’ils prescrivent sont les moins chers. D’autres médecins, qui prêtent moins “d’attention” au budget des patients ne prescrivent que 10 % des médicaments les moins chers. Il y a donc de grands écarts entre les habitudes de prescription des médecins, non seulement en termes de choix de médicaments chers et moins chers, mais aussi en termes de volumes. Certains médecins prescrivent plus d’antibiotiques que d’autres.

 

Comment responsabiliser les médecins ?

Grâce à l’enregistrement détaillé de tous les médicaments prescrits et des caractéristiques des patients, nous pouvons évaluer avec précision, pour chaque médecin, l’économie possible pour l’assurance maladie et pour ses patients, s’il prescrivait les médicaments les moins chers. Ce calcul peut aussi être communiqué individuellement à chaque médecin. Mais ensuite ?

Pour provoquer le changement de prescription chez les médecins les moins économes, le Ministre propose de lier le changement de prescription au maintien de l’accréditation du médecin concerné. Si le médecin ne modifie pas sa prescription, celui-ci serait sanctionné financièrement par le retrait de cette accréditation. Les médecins critiquent et rejettent le lien financier que le Ministre veut établir entre leurs honoraires et leur choix de médicaments.

 

Pour éviter d’individualiser ce lien, médecins et mutualités, proposent un lien collectif : les honoraires de tous les médecins pourront être valorisés si des objectifs globaux d’utilisation des médicaments les moins chers sont atteints. Pour y arriver les profils des médecins devraient être analysés au sein des Groupes Locaux d’Evaluation Médicale. Si les objectifs ne sont pas atteints après deux ans, on pourrait alors mettre en œuvre un système individualisé.

 

Faire payer le patient serait injuste

 

Quel que soit le système de responsabilisation retenu avec les médecins, nous ne pourrons en tout cas pas accepter que les patients soient “responsabilisés”, c’est-à-dire pénalisés parce que les médecins prescrivent les médicaments les plus chers. En effet, de cette façon la proposition du Ministre revient à augmenter la part à charge des patients en cas de prescription de médicaments les plus chers. Il met ainsi la pression du choix des médicaments dans le chef du patient. Si le médecin ne modifie pas sa prescription, les patients et l’assurance maladie seront perdants. Cette mesure n’est donc socialement pas possible sans un encadrement efficace.

 

Que le système de responsabilisation soit individualisé ou collectif, le corps médical doit prendre conscience que la maîtrise du budget des médicaments est cruciale pour l’avenir de l’assurance maladie et la création des marges nécessaires à la valorisation des honoraires médicaux, mais aussi pour faire face à d’autres besoins, dont, entre autres, la mise au point de vrais médicaments innovants. Refuser d’y participer serait irresponsable et ferait régresser l’accès aux soins de santé.

 

Jean Hermesse

Secrétaire National

 

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