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Éditorial (6 février 2003)

 

Services intégrés à domicile :

le mieux est l’ennemi du bien

A vouloir trop bien faire, on risque parfois le pire. C’est ce qui se passe avec les projets du gouvernement en matière de soins et d’aide à domicile. Il faut plutôt parler des projets des gouvernements puisqu’il s’agit d’un accord entre le gouvernement fédéral et les gouvernements régionaux : Flandre, Wallonie, Bruxelles, Communauté germanophone.

Le projet vient des membres écologistes des gouvernements. C’est un modèle séduisant sur le plan théorique, mais irréaliste sur le plan pratique et non conforme aux attentes réelles des personnes qui désirent être soignées et aidées à domicile.

Il s’agit de créer, sur l’ensemble du territoire, une structure de “services intégrés de soins à domicile”. Chaque zone de soins à délimiter (une ou plusieurs communes) ne pourrait avoir qu’un seul service intégré. Celui-ci devrait comprendre au moins des représentants des médecins généralistes de la zone, des infirmières et des représentants des structures de coordination agréées et opérant dans cette même zone.

Ces services devront veiller à l’organisation pratique et au soutien des prestataires de soins… dans le cadre des soins à domicile en ce qui concerne :

 

l’évaluation de l’autonomie du patient ;

l’élaboration et le suivi d’un plan de soins ;

la répartition des tâches entre les prestataires ;

la concertation multidisciplinaire.

Cet Arrêté Royal sur les “services intégrés de soins à domicile” est paru au Moniteur en juillet 2002. A l’INAMI, ce lundi 27 janvier 2003 était soumis un autre Arrêté Royal fixant des interventions de l’INAMI (de 30 à 40 EUR par prestataire) pour des réunions de concertation et des forfaits (12,50 EUR par an) pour l’enregistrement des données concernant un patient. L’INAMI a prévu, pour commencer, un budget de 2 millions d’euros.

 

Le Ministre Detienne va plus loin puisqu’il veut créer une fonction de coordinateurs territoriaux pour diriger les centres territoriaux qui sont, en fait, ces services intégrés de soins à domicile constitués sous la forme d’asbl (SISD). Cela veut dire la création d’un réseau complet avec tout le personnel qui lui sera attaché sans que l’on sache comment tout cela va être financé. S’il y a un service intégré par commune ou par zone, cela fait quelques dizaines rien que pour la Région wallonne.

 

Il est clair que toute initiative pour favoriser la concertation des prestataires qui interviennent au domicile de malades et d’invalides, est bienvenue. Mais, faut-il pour autant créer une immense structure chargée de l’organiser de façon contraignante et dans un réseau unique qui sera donc en situation de monopole dans sa zone ?

 

Cela sera contraignant, mais la population répugne à ces contraintes. On peut même se poser la question du respect de la vie privée et du secret professionnel quand on sait que, selon le dispositif que veut introduire le Ministre Detienne, un service d’aides familiales devra informer le centre territorial de toute demande d’aide à domicile qui lui est adressée, des suites réservées à cette demande et de la fin de l’aide. Si un service dépasse son quota d’heures ou intervient trop dans une famille, il devra le signaler et demander l’autorisation, etc. On est bien en face de la création d’une bureaucratie contraignante, peu respectueuse des personnes et foncièrement méfiante à l’égard des professionnels qui agissent sur le terrain.

 

Plus fondamentalement, je crains que tout cela ne serve à rien sinon à gaspiller des deniers publics. Il y a des moyens plus simples de réguler les aides à domicile pour mieux les répartir. On peut, par exemple, dresser des profils d’intervention et réagir s’il y a des usages aberrants.

Il y a des moyens plus simples et probablement moins coûteux d’encourager la concertation des professionnels en la limitant aux cas où c’est vraiment nécessaire, et en favorisant l’intégration des différentes fonctions dans un même service plutôt que de les obliger à se regrouper dans une superstructure.

 

Il faut éviter, en effet, de vouloir forcer les regroupements dans des structures uniques. L’histoire nous apprend que les monopoles finissent toujours par une perte de qualité dans le service des personnes. Les usagers et les professionnels en place en ont peur à juste titre.

Peut-être dira-t-on que cette argumentation cherche à défendre des services qui nous sont proches ou à sauvegarder l’avenir du système de pilier. Il ne s’agit évidemment pas de cela. Depuis bien longtemps, les Mutualités chrétiennes soutiennent les soins et l’aide à domicile : Croix Jaune et Blanche et Aides familiales, coordonnées depuis 1995, dans le cadre des ASD qui regroupent plus de 3.000 professionnels en Wallonie, à Bruxelles et en Communauté germanophone. Nous le faisons parce que c’est important pour la population : invalides, malades, personnes en perte d’autonomie.

 

Ces services sont ouverts à tous les patients, tous peuvent y faire appel comme ils peuvent faire appel à d’autres services ou à des prestataires individuels.

 

Je ne vois pas la valeur ajoutée du zonage contraignant et coûteux que l’on veut installer et imposer. Ce sera pour ces services une contrainte supplémentaire et la perte d’une partie de leur activité : coordination qu’ils réalisent efficacement depuis longtemps et qui n’a pas été évaluée qualitativement.

 

La fin de la législature amène sur la table des projets mal ficelés qui ne sont souvent que la mise en oeuvre de rêves théoriques.

 

Édouard Descampe

Secrétaire Général