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Éditorial (6  juin 2002)

 

Le sous financement des hôpitaux

touche les patients

Alors que le Ministre multiplie les réformes tous azimuts, le secteur hospitalier croule sous les charges. La plupart des hôpitaux plongent dans le rouge. Pour survivre, ils augmentent les suppléments à charge des patients ou réduisent l’encadrement en personnel soignant. Décidément, le fossé s’agrandit dangereusement entre le discours politique et les réalités du terrain.

Depuis le début de la législature, le Ministre Vandenbroucke fait preuve de beaucoup de créativité et d’initiatives. Il a ouvert de nombreux chantiers dans tous les domaines : le maximum à facturer, un nouveau mode de financement des hôpitaux et bientôt des maisons de repos, une nouvelle procédure de fixation de prix des médicaments, la révision complète de la kinésithérapie et récemment une nouvelle loi “soins de santé” qui va modifier en profondeur les structures de l’INAMI et de la Santé Publique.

Tout en reconnaissant les objectifs poursuivis et la nécessité de certaines réformes, mutualités et prestataires de soins , cogestionnaires du système des soins de santé, sont cependant déboussolés voire découragés par la manière autoritaire du Ministre. La place réservée au dialogue et au compromis est marginale. Plus grand monde ne sait encore suivre le rythme des réformes, les comprendre et surtout les appliquer. La résignation s’installe chez les acteurs du terrain. Pour survivre, les hôpitaux multiplient les suppléments à charge des patients.

 

Le sous-financement des hôpitaux est bien réel

En mai 2000, hôpitaux et mutualités avaient déjà estimé le sous-financement du secteur hospitalier à près de 17 milliards de francs (421,4 millions d’euros). Le Ministre avait promis de s’y pencher… rapidement. Depuis lors, rien, si ce n’est l’annonce de la création d’un nouveau groupe de travail pour étudier la question.

En attendant, le sous-financement du secteur hospitalier est bien réel. Les résultats financiers de 2001 se sont dégradés dans tous les hôpitaux, certains plus gravement que d’autres. Et après toutes les mesures d’économie du Ministre en biologie clinique, en radiologie et sur le prix de journée, les projections pour 2002 sont catastrophiques. Les gestionnaires d’hôpitaux sont obligés de présenter des plans d’économie comprenant des réductions de personnel, de salaires, des hausses d’activité, des retenues plus grandes sur les honoraires des médecins et… de nouvelles recettes en augmentant les suppléments à charge des patients.

 

Pour faire face, certains hôpitaux augmentent les suppléments à charge des patients

L’augmentation des coûts à charge des patients n’est pas nouvelle. Ainsi de 1998 à 2000, la part à charge des patients hospitalisés (ticket modérateur, suppléments de chambre et d’honoraires) a augmenté de 13 % pour atteindre 25,548 milliards de francs (633. millions EUR) soit près de 10 % de l’ensemble des recettes des hôpitaux.

Mais la très nette aggravation de la situation financière des hôpitaux en 2001 provoque une nouvelle vague de hausses à charge des patients : dans un hôpital, tous les médecins se déconventionnent et réclament linéairement 3 à 6 % de suppléments, dans un autre on augmente les pourcentages maximum d’honoraires en chambre privée, dans un autre encore, on cherche de nouvelles recettes en accueillant des patients étrangers, la fédération flamande des hôpitaux de Caritas recommande de réclamer 25 euros à chaque passage aux urgences… La dérive est inquiétante.

Et dans cette chasse aux nouvelles recettes pour raison de survie, les hôpitaux ne sont pas égaux. Il est évidemment plus facile de réclamer (et de percevoir !) des suppléments dans une région riche que dans une région défavorisée. Concrètement, nous avons constaté que le coût moyen à charge du patient à l’hôpital Edith Cavell situé à Uccle est de 37.346 FB (925,78 EUR), alors qu’au Centre Hospitalier Hornu-Frameries, situé près de Mons il est de 9.934 FB (246,26 EUR).

Le sous-financement des hôpitaux se répercutant sur la facturation de suppléments à charge des patients nous entraîne ainsi indirectement vers une médecine duale : un hôpital mieux équipé, plus attractif pour les riches et un hôpital avec moins de moyens pour les moins riches.

 

Le sous-financement des hôpitaux favorise la médecine à plusieurs vitesses

Nous tirons la sonnette d’alarme ! Assez de réformes grandes consommatrices de temps et d’énergie dans l’exécution et qui n’offrent pas de perspectives mobilisatrices pour les soignants et les acteurs du terrain. La situation financière de nombreuses institutions de soins est devenue mauvaise. Le moral des “troupes” est morose.

Il faut cesser de jeter le discrédit sur les médecins, les gestionnaires d’hôpitaux, les kinésithérapeutes. Ils sont conscients que les budgets sont limités. Il sont d’accord pour supprimer les abus et réduire les gaspillages mais ils demandent aussi un financement correct des frais qui augmentent de manière inéluctable à cause des charges salariales, des améliorations voulues des conditions de travail, du coût des nouvelles techniques, de nouvelles normes d’environnement et de confort…

Si ces réalités financières ne sont pas reconnues par l’État, ce sera “le sauve-qui-peut” individuel. Les patients n’auront plus de sécurité tarifaire. La médecine duale tant décriée par le Ministre dans ses discours s’installera un peu plus. Les inégalités d’accès, celles que le Ministre prétend combattre, sont en fait déjà en train de s’étendre.

Assez de réformes coûteuses en mobilisation administrative. Ce dont le secteur hospitalier a besoin, c’est d’un refinancement concret. Sans quoi, la voie s’ouvrira encore un peu plus aux suppléments, à la médecine duale… à une société à plusieurs vitesses.

Jean Hermesse,
Secrétaire National