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Éditorial (6 septembre 2001)

Eviter les conflits inutiles

La rentrée sociale ne sera pas de tout repos. Beaucoup de choses ont été promises et au même moment le ralentissement de la croissance réduit rapidement les marges budgétaires que l’on pensait disponibles.

Avec ce qui va rester comme marge, il ne sera pas possible de réaliser à la fois :

Une diminution des charges sociales et des impôts pour les entreprises. C’est ce que demande la F.E.B. (Fédération des Entreprises de Belgique). Une revalorisation des diverses allocations et pensions et notamment leur adaptation par un coefficient de bien-être. Cela fut réclamé avec force lors d’une grande manifestation des organisations sociales le 20 mai de cette année.

Une dotation au fonds de vieillissement telle que la réclame le Ministre du budget. C’est une revendication importante des associations de pensionnés en prévision des évolutions démographiques futures. L’accroissement des budgets soins de santé de façon à couvrir les augmentations des dépenses de santé constatées en Belgique comme dans les pays avoisinants.

 

La première demande qui propose une diminution des recettes ne peut plus être retenue compte tenu de ce qui a déjà été réalisé. Aucune diminution de charges sociales ne peut être envisagée sans qu’une compensation par d’autres recettes ne soit prévue. Par contre, les trois autres demandes sont incontestablement légitimes et les arbitrages ne sont pas faciles. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit souvent des mêmes personnes, ou en tout cas des mêmes catégories de personnes. On ne peut sauver les uns en sacrifiant les autres.

Augmenter les pensions en réduisant les remboursements de soins de santé, c’est reprendre d’un côté ce qu’on donne de l’autre. Et c’est même reprendre dans la catégorie des pensionnés les plus faibles, ceux qui souffrent de problèmes de santé.

Les dépenses de santé de l’assurance maladie ont augmenté de 5,1 % en 1999 et de 6,6 % en 2000 et on s’attend à une croissance quasi identique en 2001. Pour 2002, l’INAMI élabore des projections qui nous amèneraient autour de 594 milliards de dépenses. Ce qui est incontestablement élevé. Ces chiffres sont à comparer aux croissances du Produit Intérieur Brut de la Belgique : + 3,8 % en 1999 et plus 5,5 % en 2000.

La croissance des dépenses de santé dépasse donc chaque année la croissance économique même quand elle est forte. Des facteurs multiples provoquent cette situation : hausse des prix des médicaments, des implants, des prothèses, augmentations du personnel et des équipements, consommation plus élevée suite au vieillissement de la population.

 

Cette situation se retrouve dans les pays voisins. En France, par exemple, les chiffres de croissance des dépenses sont identiques. Tout cela met à rude épreuve nos mécanismes de solidarité. En soins de santé, 5 % de la population dépense 60 % du budget. Il est tentant de chercher à faire des économies en rejetant une partie de ces 5 % de grands consommateurs. C’est l’itinéraire proposé par ceux qui veulent privatiser l’assurance maladie en excluant ceux qui représentent des risques trop importants. Nous ne pouvons suivre cette voie.

La concertation est indispensable

Notre ligne d’action est claire. Il faut combattre toutes les dépenses inutiles, mais aussi donner les moyens financiers suffisants pour maintenir la solidarité d’ensemble qui permet aussi une régulation d’ensemble. La lutte contre les dépenses inutiles passe par une concertation et un travail en commun avec les acteurs, médecins et prestataires de soins, hôpitaux, pharmaciens et producteurs de médicaments. Depuis quelques années, les mentalités ont fortement évolué notamment en matière d’évaluation de la pratique par les prestataires eux-mêmes avec l’aide de nos experts et des importantes données que notre administration est en mesure de rassembler.

Hélas, aujourd’hui, les relations se tendent entre le Ministre des Affaires sociales et les prestataires. L’interventionnisme du Ministre est trop important. Il n’était pas nécessaire d’anticiper une récupération qui aurait dû, de toute façon, avoir lieu. D’autant plus qu’on fait porter cette anticipation sur le corps médical, mais qu’on ne l’applique pas sur l’industrie pharmaceutique où le dépassement est cependant plus important. Cela donne une impression d’arbitraire comme s’il fallait montrer qu’on a fait quelque chose. On oublie la part très importante des décisions du gouvernement dans l’augmentation des dépenses : nouvelles mesures sociales décidées par le Ministre, augmentation des prix des produits et augmentation des salaires du personnel soignant.

D’ailleurs, les gestionnaires d’hôpitaux se trouvent aussi en difficulté car des modifications de normes d’encadrement et des augmentations barémiques du personnel viennent déséquilibrer les budgets et compliquer leur tâche. Ces adaptations étaient sans doute nécessaires, mais encore une fois, elles se font, en grande partie, au-dessus de leur tête et, comme toujours, sans prévoir le financement réaliste de ces changements. Cela induit alors des " effets pervers " : pour équilibrer les budgets des institutions naît la tentation de " faire tourner " la production.

En cette rentrée nos craintes sont considérables. Si les conflits deviennent plus aigus, nous ne sommes pas à l’abri de dislocations qui finissent toujours pas se retourner contre les malades à qui des suppléments sont réclamés pour financer les soins. Les décisions budgétaires pour 2002 doivent être prises dans les prochains jours. Espérons que gouvernement, partenaires sociaux, mutuelles et prestataires de soins pourront dégager un large consensus dans la détermination de ce budget.

Edouard Descampe

Secrétaire général ANMC

(6 septembre 2001)