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Editorial (6 décembre 2001)

La fin des ristournes et… des illusions

Depuis quelques jours, nos membres interpellent sans arrêt nos services au sujet de la dernière mesure annoncée par le Ministre Vandenbroucke : la suppression des ristournes accordées par certains pharmaciens en fin d’année. Désarroi, incompréhension, révolte même, face à une mesure qui déroute et met sans doute fin aux illusions sociales suscitées par ce gouvernement.

En interdisant aux pharmaciens d’accorder à l’avenir des ristournes sur le ticket modérateur payé pour les médicaments remboursables et en imposant aux pharmaciens de verser cet argent dans les caisses de l’assurance maladie, le Ministre Vandenbroucke a suscité le désarroi et l’incompréhension chez un grand nombre de malades. Les gens posent la question : “Qu’allez-vous faire, vous, mutuelles, pour nous défendre contre cette initiative inadmissible du Ministre, qui veut ainsi dépouiller les petits gens de quelques maigres montants accordés par des pharmaciens comme réductions sur des dépenses qui pèsent lourd sur notre budget et qui sont inévitables pour nous, puisque provoquées par la maladie et prescrites par les médecins ?” Nous ne pouvons que partager ce sentiment de révolte car si le but est de “responsabiliser” davantage le patient, nous devons bien constater qu’une fois de plus, c’est sur les épaules de celui-ci, comme dans le système de référence imposé depuis juin 2001, que tout le poids de l’effort repose.

Le Maximum à facturer (MAF) : un argument pernicieux

Le Ministre défend cette mesure en justifiant que l’argent de ristournes ainsi versé à l’INAMI (1,5 milliard) servira à rembourser tous les tickets modérateurs (y compris ceux des médicaments) qui dépassent 18.000 francs pour les personnes à faible revenu. Cet argument est vraiment pernicieux.

Tout d’abord, les moyens financiers pour intégrer les tickets modérateurs des médicaments dans le MAF étaient déjà prévus dans le budget 2001. Une économie supplémentaire – celle de la suppression des ristournes – n’était donc pas nécessaire pour pouvoir étendre le MAF. La population est trompée et le MAF est “vendu” pour la xème fois comme la solution sociale miracle.

Ensuite, il faut rappeler que le plafond des tickets modérateurs évoluera avec le revenu des gens et que, pour la toute grande majorité, ce plafond ne sera pas atteint. Dès lors, bon nombre de ménages auront des dépenses de médicaments relativement lourdes mais n’atteignant pas ce plafond, ne bénéficieront plus des ristournes accordées antérieurement par les pharmaciens. Ainsi, lentement mais sûrement, un système de couverture des soins à deux vitesses s’installe : pour les gens à faible revenu (13 % de la population belge) une meilleure couverture des tickets modérateurs élevés par le système du Maximum à facturer (MAF) et pour la toute grande majorité de la population une couverture réduite. Ainsi, la solution miracle devient une potion amère et nous entraîne dans la spirale des assurances complémentaires.

Le ticket modérateur deviendrait obligatoire : inadmissible et injuste

En interdisant aux pharmaciens d’accorder une ristourne sur les tickets modérateurs, le Ministre rend en fait ceux-ci obligatoires. Et pourquoi pas demain aussi rendre obligatoires les tickets modérateurs payés chez les généralistes ou pour les soins infirmiers à domicile? L’idée serait de responsabiliser davantage le patient en le faisant payer plus lui-même. On espère ainsi réduire la consommation inutile.

Mais qui prescrit les médicaments ? Qu’en est-il des énormes budgets marketing des firmes pharmaceutiques pour influencer la prescription? Qui hésitera encore plus d’aller chez le médecin quant celui-ci ne pourra plus être social, forcé de demander le ticket modérateur plein ? Qui pourra se permettre d’être soigné à domicile lorsqu’il faudra payer chaque jour les soins ? Ce n’est pas le patient, mais le médecin qu’il faut d’abord responsabiliser et sûrement pas lorsque les patients se trouvent en état de précarité. Nous avons toujours défendu que le ticket modérateur soit exigible, mais pas obligatoire et nous nous battrons sur ce principe.

 

La solidarité limitée aux malades n’a pas de sens

 

En interdisant les ristournes et en percevant cette recette chez les pharmaciens, le Ministre organise la solidarité entre malades : c’est grâce à la contribution de tous les patients consommant des médicaments que certains bénéficieront d’un meilleur remboursement par le MAF. Il aurait été beaucoup plus juste de financer ce meilleur remboursement en augmentant la cotisation sociale qui est proportionnelle aux revenus et payée par toute la population belge, malades et bien portants. Ce serait vraiment un recul social majeur si demain les améliorations en assurance maladie obligatoire devaient être financées par une plus grande solidarité… entre malades.

Le fait que des ristournes puissent être accordées par les pharmaciens sur les prix des médicaments indique que ceux-ci sont trop élevés. Pourquoi pas alors tout simplement diminuer le prix des médicaments du montant équivalent aux ristournes? Les patients paieraient moins et les dépenses de l’assurance maladie seraient aussi moindres. D’autres solutions techniques sont donc possibles. Encore faut-il que le Ministre accepte la concertation avec les mutualités qui ont été les premières à lancer le système de ristournes pour alléger le coût des médicaments.

Supprimer les ristournes chez les pharmaciens, rendre les tickets modérateurs obligatoires, accentuer les différences en couverture de soins en fonction des revenus ; après les vaches grasses viennent les vaches maigres… les dernières illusions sociales s’envolent.

 

Jean Hermesse

Secrétaire National