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A suivre... (17 octobre 2013)

Dis-moi quel est ton bistrot, je te dirai qui tu es

© Michel Houet/Belpress

Au café de la gare, de la paix ou chez Jeanine… Au café du matin, au Belga, au Piano Bar… Chaque taverne n’a-t-elle pas son public ? Certains cafés dit “branchés” s’implantent au cœur de quartiers populaires, dans la perspective de favoriser la mixité sociale. Est-ce mission réussie ou se retrouve-t-on plutôt “entre soi”, entre gens d’un même milieu ?

Pour boire un verre entre amis ou en solo, pour patienter dans les entre-deux de la vie quotidienne – entre deux rendez-vous, entre deux trains, entre deux achats…, pour discuter ou travailler hors du bureau, de la maison…, les raisons de pousser la porte d’un café sont multiples. Et même parfois contradictoires d’un client à l’autre. L’un est en quête de compagnie, l’autre cherche la tranquillité, tandis que le troisième espère y trouver l’inspiration. Difficile à concilier, tout cela.

Des discussions formatrices

Les troquets – dont certains sont devenus mythiques par le passage, à leurs tables, d’hôtes célèbres, écrivains, poètes, philosophes – constituent des étapes recommandées dans la découverte d’une ville, de son histoire, de ses habitants et de leur vie quotidienne.

Sans parler de la philosophie de comptoir. Une vraie mine de bon sens pragmatique, certes parfois édulcoré par les effluves d’alcool ou les recettes faciles. Ah, les bons vieux cafés populaires! Des cafés d’autrefois, on garde l’image d’un lieu où l’on boit bien sûr, où l’on joue aussi, aux cartes le plus souvent, où l’on chante et écoute chanter, où l’on danse le dimanche… “Mais l’essentiel est ailleurs, indique Christophe Granger, enseignant et historien, éclairant des aspects de l’éducation populaire en 1900. Dans ces parloirs contrastés, à la faveur des discussions (…), à la faveur aussi des réunions publiques (…), s’élabore, s’échange, s’apprend la maîtrise d’outils bien particuliers: la méfiance, l’aptitude à ‘se situer’, mais aussi, plus simplement, un art de prendre la parole, d’écouter, de convaincre, de mettre en ordre une opinion, d’émettre un point de vue, d’échanger des savoirs. Les cafés d’alors apprennent à se façonner un monde à soi dans l’épreuve immédiate des autres…”.

Peu de mélanges

Les salons du pauvre, selon l’expression du sociologue Joffre Dumazedier, sont aussi devenus les salons pour d’autres qui, eux, ont un salon à la maison, mais préfèrent jouir d’une ambiance particulière. Des entrepreneurs l’ont compris(1). Certes, aujourd’hui, le bistrot du coin subsiste vaillamment. Résistant aux modes de vie très rythmés qui laissent peu de place à la flânerie entre le boulot et le dodo. Mais de nouveaux cafés “branchés” fleurissent, s’appuyant sur un concept soigné, du design mobilier jusqu’au choix des breuvages. Ils seraient même sollicités par les politiques publiques d’aménagement du territoire – urbain principalement – pour “revitaliser les quartiers”. “Souvent présentés comme des espaces ouverts à la mixité et à l’échange, les nouveaux cafés ‘à la mode’ semblent pourtant n’être qu’un nouvel ‘entre soi’ destiné à un public très ciblé, observent les auteurs d’un dossier très instructif de la revue Bruxelles en mouvements. Aussi, le café ‘branché’, loin de s’intégrer dans les quartiers populaires contribue plutôt à les transformer(2). Entendez, l’embourgeoise ou le “boboïse”.

Les publics, en réalité, se mélangeraient peu. Le café populaire et le café branché n’attireraient pas les mêmes piliers de comptoirs ou leveurs de coude occasionnels. Les auteurs évoquent “une subtile logique d’exclusion et d’inclusion faite de ‘micro- ségrégations’”. De petits détails poussent ou non à entrer là prendre un café. L’écran de télévision et la machine à sous, bannis d’un côté, feront partie de l’équipement indispensable d’autres brasseries. Ils concentreront les regards, les plaisanteries, participeront de la complicité recherchée au café, d’un côté. Alors que de l’autre, ils seront exclus pour soigner l’ambiance plus intimiste, propice à la lecture (d’un roman, de la presse…).

Autre exemple? Les horaires d’ouverture, les attitudes – consomme-t-on au comptoir, ou celui-ci est-il un lieu où l’on vient seulement passer commande? –, l’occupation de l’espace… Autant de distinctions entre cafés dit populaires et cafés dit branchés. Les clients ne s’y tromperaient pas. Ils se trouvent là où ils se retrouvent, et vice-versa.

//CATHERINE DALOZE

(1) Lire “La légende de l’urgentiste des quartiers oubliés”, consacrée à Frédéric Nicolay, à l’origine de nombreux cafés bruxellois à la mode (comme le récent Flamingo, quartier de l’Alambra – Bruxelles-Ville). Voir www.ieb.be

(2)Service au bar”, dossier publié dans Bruxelles en mouvements, périodique édité par Inter-environnement Bruxelles, sept-oct. 2013. Voir www.ieb.be

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