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A suivre... (1er mai 2008)

 

La crise alimentaire

était annoncée!

Le 17 avril 1996, il y a 12 ans, près de 2.000 paysans sans terre manifestaient pacifiquement à Eldorado dos Carajas, ville de taille moyenne du nord du Brésil. Ils revendiquaient le droit d’accéder à la terre et de pouvoir la travailler afin de nourrir leurs familles. Brusquement c’est l’horreur: 19 personnes sont assassinées par la police militaire, 70 sont gravement blessées.

En commémoration de ce massacre, la Via Campesina, mouvement paysan mondial, a fait du 17 avril la journée mondiale des luttes paysannes.  Eldorado dos Carajas est devenu l’un des tristes symboles de la violence dans les campagnes du Brésil. Plus de 1.600 personnes y ont été tuées depuis 1980. Ces meurtres, motivés par des conflits fonciers, ont encore considérablement augmenté ces dernières années.

 Ailleurs dans le monde, le nombre de conflits pour l’accès à la terre augmente lui aussi de jour en jour, comme est venu le rappeler PV Rajagopal, le leader indien des paysans sans terre, récemment de passage en Belgique (1). Celui-ci était là pour rappeler  les nombreux problèmes auxquels sont confrontés les tribus aborigènes, les adivasis: “Ceux-ci, dit-il, ont pour origine la prise de possession des terres par des groupes d'intérêts puissants. Systématiquement et brutalement, les adivasis sont expulsés de leur terre pour favoriser l'expansion de l'industrialisation, des entreprises multinationales et du tourisme” (1).

 Aujourd’hui, les besoins des populations se trouvent confrontés de manière de plus en plus brutale à l’omnipotence des marchés mondiaux. La division du travail entre grands propriétaires terriens - héritiers des oligarchies nationales des pays du Sud - et certaines transnationales mondiales résidant pour la plupart dans le nord est ici clairement établie, affirme OXFAM. Les premiers cultivent uniquement ce qui rapporte le plus aux autres.

 

Des prix qui explosent

Les céréales (blé, maïs, riz), qui constituent la base de l’alimentation mondiale ont quasiment doublé en un an alors que, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), les prix seraient restés relativement stables durant une trentaine d’années.

Les besoins des populations se trouvent confrontés de manière de plus en plus brutale à l’omnipotence des marchés mondiaux.

Dorénavant, les prix se rapprocheraient, dit-on, de leur valeur réelle et devraient devenir plus volatiles, avec des tendances plutôt à la hausse…

Les causes en seraient démographiques: il y a plus de bouches à nourrir et les habitudes alimentaires évoluent avec l’apparition de nouvelles classes moyennes dans les pays émergents (Chine, Inde…). Il faudrait aussi compter avec une légère baisse de la production en céréales au niveau mondial. Selon la FAO, la production des huit principaux pays exportateurs de céréales, assurant près de la moitié du volume mondial, aurait baissé de 4% à 7% en 2005 et 2006. Enfin, le réchauffement climatique aurait accentué ces mouvements. En réservant une part de la production agricole à la production d’agrocarburants (carburants produits à partir de plantes, dont des céréales), les Etats contribuent à maintenir la pression sur les prix. Selon l’OCDE, les agrocarburants seraient responsables d’une hausse potentielle de 20% à 50% des prix agricoles d’ici à 2016.

Jean Ziegler, ex-rapporteur spécial des Nations unies pour le droit à l’alimentation, accuse les pays riches d’être responsables de l’importante inflation qui touche les denrées alimentaires et dénonce l’objectif d’intégration de 10% d’agrocarburants en 2020 fixé par la Commission européenne. Un objectif auquel les Allemands ont déjà renoncé. Les cultures d’agrocarburants (blé, betteraves, colza)  détournent en effet l’agriculture de sa vocation première et accaparent des terres fertiles et les forêts équatoriales. Sur les marchés de l’économie néolibérale, seule la satisfaction de la demande solvable importe!

 

De graves conséquences

Josette Sheeran, directrice exécutive du Programme alimentaire mondial des Nations unies (PAM) parle d’un “tsunami” silencieux évoquant à la fois l’urgence et les graves conséquences qui ne manqueront pas de se produire à long terme. Aux 854 millions de personnes souffrant de la faim en 2007, s’ajoutent maintenant les 100 millions de personnes qui ont basculé dans la précarité ces 6 derniers mois. Mais à la situation d’urgence s’ajoutent les effets silencieux de la malnutrition: perte d’efficacité des traitements rétroviraux pour les malades présentant un fort taux de séropositivité, inflation, manque de moyens des familles pour assurer les frais de scolarité et/ou de santé… Les émeutes de la faim qui se sont déjà produites un peu partout dans le monde laissent entrevoir une instabilité croissante!

Mais comme toujours, il y a des “gagnants”, principalement du côté des pays céréaliers riches (Etats-Unis, Brésil, Argentine, Canada, Australie). Ceux-ci peuvent vendre leur production à des prix plus élevés. De plus, ils ont une clientèle intéressée par les agrocarburants.

Pour une organisation comme OXFAM, cette crise était prévisible: “Depuis des décennies, les politiques et l’économie mondiale favorisent la libéralisation au lieu de prôner la régulation des marchés (gestion de l’offre et de la demande au niveau régional et des Etats). Les marchés agricoles sont volatiles et ne peuvent être ‘gérés’ par la seule loi du marché ‘globalisé’.” Il faut donc recentrer le développement  sur les agriculteurs,  affirme le mouvement paysan Via Campesina.

 

Ce qui se traduit en Europe par des inquiétudes sur le pouvoir d’achat se traduit  en Afrique, en Asie du Sud Est et en Amérique Latine par des famines ainsi que par des “émeutes de la faim”.

Christian Van Rompaey

 

(1) Lire dans En marche: “La grande marche des paysans sans terre” (6 septembre 2007). Sur le site Internet www.enmarche.be (rubrique international) ou taper Rajagopal dans le moteur de recherche.

(2) Plus d’informations: http://www.french.janadesh.net/index.php

Sur Internet : http://viacampesina.org/main_fr/

 


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