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A suivre... (17 avril 2008)

 

Pour des citoyens politiques

La Semaine sociale du Mouvement ouvrier chrétien (MOC) a été l’occasion pour son président, Thierry Jacques, d’aborder la question du désintérêt voire du rejet de l’action politique par le citoyen lambda. Comme d’autres, il constate un déficit démocratique d’autant plus interpellant pour le MOC que le mouvement compte parmi ses missions celle de conscientiser les citoyens aux enjeux politiques. Une mission, en somme, qui reviendrait à “re-politiser la société”(1).

Thierry Jacques avance trois hypothèses à cet état de pénurie politique dans la société civile: un manque de compréhension du système politique, un problème de participation et l’inadéquation des réponses politiques aux soucis des gens.

Où prend place la construction collective d'une parole dépassant les intérêts personnels?

Certes, comprendre le fonctionnement de la politique relève souvent de la gageure. D’autant plus que le système belge, en l'occurrence, est complexe, se répartit sur plusieurs niveaux de compétences qui, par ailleurs, parfois se chevauchent.

Certes, la paupérisation et les situations de précarité sont interpellantes. D'autant plus que les conditions de vie apparaissent comme se dégradant, devenant toujours plus fragiles pour bon nombre de personnes.

Certes, il n'est pas étonnant que le MOC réclame une clarification des options politiques, plus de différenciation de la droite libérale. Pas étonnant qu'il invite à aller vers une majorité de gauche, en affirmant qu' “il est indispensable que des choix clairs soient présentés aux citoyens (...) en montrant bien que des politiques de gauche et des politiques de droite, ce n'est pas la même chose”. En effet, aux écologistes, aux centristes et aux socialistes vont les affinités du MOC. Et les politiques de haut rang présents au discours du président démontraient à l'évidence ces accointances. Seul manquait le banc libéral.

Mais c'est surtout la question de la participation qui aura retenu notre attention dans le discours de clôture de la Semaine sociale.

Dans les médias, fleurissent les espaces de “participation” à la vie politique: blogs ouverts aux réactions des citoyens, dialogues via Internet avec un politicien... Que de forums, que de zones d'expression ainsi dédicacées à la participation citoyenne! Est-ce cependant là l'exercice de la démocratie? Le point de vue d'un tel, accolé à l'avis d'une telle, puis succédé par l'opinion d'un troisième... Une kyrielle d'expressions individuelles se font connaître. Ce qui ne laisse d’abord en rien présager qu’elles soient entendues, ni même qu’elles participent d’un dialogue autre qu’un dialogue de sourds. Ce qui surtout ne crée pas les conditions pour qu’elles dépassent les one shot solitaires de ceux qui auront osé prendre la plume ou se saisir du micro.

 

Au-delà d’un alignement

d’opinions

Où prend en effet place la construction collective d'une parole dépassant les intérêts personnels? Où prend place le débat dans ce qu'il sous-entend d'expression des points de vue certes, de confrontation, de transformation, d'aménagement aussi pour faire aboutir un réel dialogue? 

“Le danger est grand de considérer la société civile comme l'accumulation d'intérêts particuliers ouvrant sur une cacophonie”, remarque Majo Hansotte dans son livre “Les intelligences citoyennes”(2). Le risque existe que se juxtaposent les attitudes NIMBY (not in my back yard – pas dans mon jardin); que ne puisse se construire la recherche du bien commun, de l’intérêt général; que les “je” oublient le “nous tous”.

Pour entrer en débat, créer et habiter des lieux d’échange, les associations d’éducation permanente ont un rôle central. Bien au-delà – voire bien différent – de celui de procurer une sorte de formation rapprochée au fonctionnement de notre société. Il s’agirait plutôt de s’interroger collectivement sur “ce dans quoi nous sommes embarqués”, sur “ce vers où nous voulons aller” (2). Dans la démarche, la vigilance doit être grande de ne pas instrumentaliser le collectif à des fins déjà pensées à l’avance, préconstruites en quelque sorte. Et le débat sera d’autant plus riche qu’il se souciera de mêler savoirs d’expériences et savoirs d’expertise.

De l’avis de Majo Hansotte, “on décourage souvent l’engagement citoyen au nom de la complexité”. Comme c’est complexe, l’immobilisme serait normal, l’impuissance politique au rendez-vous et les citoyens en présomption d’incapacité. “Il ne faut pas chercher à vouloir atteindre le complet, à vouloir ordonner la complexité et la multiplicité des situations; par contre il est indispensable de mener des actions consistantes dans une situation incarnée”, enjoint-elle.

 

Partir du quotidien, s’interroger collectivement sans craindre le conflit, expérimenter l’engagement collectif serait prendre le temps du vivre ensemble. En veillant à enrayer les logiques d’exclusion (4), à visibiliser ceux que le grand spectacle médiatique occulte, à faire entendre aussi les “sans voix”. Et puis, sans naïveté quant aux rapports de force entre citoyens, sans idéalisation de la société civile “comme un lieu mythique d’innocence et de perfection, refoulant l’âpreté inévitable des conflits d’intérêts”, comme un lieu spontané de justice…

Catherine Daloze

(1) Discours lisible sur www.moc.be 

(2) Majo Hansotte, Les intelligences citoyennes. Comment se prend et s’invente la parole collective. éd. de Boeck, 2005.

(3) Idem, Par où passe le devenir? Mouvements émergents et nouvelles modalités de l’engagement politique, février 2007. Document téléchargeable sur www.etopia.be

(4) “Réaffirmer sans cesse l’idéal d’inclusion”, recommande Loïc Blondiaux pour la mise en pratique d’une réelle démocratie participative. Voir Loïc Blondiaux, Le nouvel esprit de la démocratie. Actualité de la démocratie participative, éd. du Seuil, 2008.

 


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