A suivre... (2 novembre 2006)
Le choix de la solidarité
Alors que
l'Alliance Nationale des Mutualités chrétiennes s'apprête à fêter comme il
se doit son centenaire, les 2 et 3 décembre prochains, autour de la
solidarité, la CSC, en congrès à Ostende, vient de réaffirmer son engagement
pour une solidarité large, pour tous, financée par l’impôt, reposant sur une
sécurité sociale renforcée. Et fédérale!
"Nous
ambitionnons une société plus solidaire, offrant davantage de possibilités
d’épanouissement à chacun, (…) une société dont la finalité est de réduire
les inégalités, d’apporter un soutien à ceux qui risquent d’être laissés
pour compte, de créer une plus grande cohésion sociale.” Ainsi s’ouvre
le texte voté par la CSC, à Ostende, à l’issue de son 33ème
congrès consacré à la solidarité. Cette solidarité, à l’origine du
syndicalisme et des mouvements sociaux, la CSC veut l’entretenir, la
renforcer, la renouveler aussi parce que “les réponses d’hier ne sont pas
nécessairement toujours adaptées aux questions de demain.” Dans un monde
basé sur la concurrence et la “réussite” individuelle, cette option
constitue un vrai défi. Durant trois jours, les militants se sont attachés à
la définir et la traduire en résolutions; ce travail guidera l’action du
syndicat chrétien au cours des prochaines années.
Au-delà de la bienfaisance
Ce sera le fil conducteur des
négociations avec les partenaires sociaux et des positions à l’égard des
gouvernements. “Les travailleurs n’ont jamais rien reçu en cadeau. Leurs
droits n’ont jamais été des faveurs. Nous avons toujours dû travailler dur
pour maintenir et renforcer la solidarité” a déclaré Luc Cortebeeck,
président de la CSC. Le syndicat veut continuer dans cette voie et il opte
pour une solidarité structurelle, bien au-delà de la bienfaisance. Certes,
“il n’y a rien à reprocher à la bienfaisance et il est réjouissant de
voir des actions de bienfaisance s’organiser spontanément après des
catastrophes naturelles”. Mais cela ne suffit pas. “Notre solidarité
repose non pas sur des faveurs, mais sur des droits. Il repose sur le béton
armé des mécanismes structurels plutôt que sur les sables mouvants de
l’émotion suscitée par des images télévisées”, affirme Luc Cortebeeck.
La CSC unanime veut que les mécanismes fondamentaux de la solidarité
entre les travailleurs restent fédéraux. |
Pour tous et par tous
Cette solidarité-là doit être
aussi une solidarité large dont chacun peut récolter les fruits. “Les
systèmes réservés aux pauvres deviennent rapidement de pauvres systèmes
parce que les revenus moyens et élevés ne voient plus à quoi peuvent servir
les mécanismes de protection”. Mais si la solidarité doit bénéficier à
tous, son financement doit également être assuré par tous et l’impôt reste
le meilleur moyen d’y parvenir. Encore doit-il être prélevé de manière
équitable, progressive, en tenant compte de tous les revenus. “Que chacun
rende à César ce qui est à César, comme les travailleurs doivent le faire.
Faites-le à contre-coeur, soit! Mais faites-le avec civisme et en ayant le
sens de la solidarité” a affirmé Luc Cortebeeck.
Un premier pilier fort
La solidarité définie par le
congrès repose sur une sécurité sociale forte. “Le fait que les secteurs
essaient de développer une sécurité sociale complémentaire est une bonne
chose, comme c’est le cas en ce moment pour le deuxième pilier des pensions.
Il nous faut pourtant continuer à donner la priorité au renforcement du
premier pilier”, a souligné Luc Cortebeeck. Pour son organisation, c’est
“une priorité fondamentale au vu du vieillissement qui approche, du
chômage qui reste élevé. Le renforcement de la sécurité sociale reste une
priorité fondamentale.”
La CSC entend renforcer la partie
“recettes” de ce premier pilier grâce à une politique vigoureuse en faveur
de l’emploi et plus de garanties pour le financement futur. Mais elle veut
aussi en renforcer la partie “dépenses” de manière sélective (liaison des
allocations au bien-être, allocations familiales, pécule de vacances,
vieillissement) tout en sachant que “toute solidarité a ses limites”.
Sans cela, elle court immanquablement à la faillite.
Une solidarité fédérale
La CSC unanime veut que les
mécanismes fondamentaux de la solidarité entre les travailleurs - la
sécurité sociale, le droit au travail, les conventions collectives de
travail (CCT) interprofessionnelles - restent fédéraux. Vivement applaudi,
Luc Cortebeeck affirme: “Nous ne sommes pas nostalgiques de la Belgique
de papa. La CSC a suffisamment montré par le passé qu’elle entend participer
à la réflexion sur la refonte de l’Etat! Toutefois, nous sommes en droit de
nous poser des questions sur la surenchère communautaire actuelle. De
nouvelles régionalisations déboucheront-elles sur une meilleure politique?
Serons-nous mieux gouvernés? Les entreprises se porteront-elles mieux? Et,
surtout, le groupe des travailleurs dans son ensemble y gagnera-t-il quelque
chose? C’est sur ce critère que nous évaluerons ce qui nous sera présenté.”
Conscient que l’on n’évitera pas le débat sur la réforme de l’État, il
engage la CSC à garder la tête froide et à bien se préparer.
Pour aujourd’hui et pour
l’avenir
Tout ceci est évidemment en
contradiction totale avec l’idéologie prônée par l’extrême droite. C’est
pourquoi Luc Cortebeeck la pointe comme l’un des “destructeurs de
solidarité” qu’il est indispensable de stopper. “Est-ce notre rôle de
nous y opposer? Oui, c’est notre devoir. Car l’extrême droite conspue toutes
les valeurs que nous défendons. Elle présente une menace directe pour notre
type de syndicalisme solidaire. C’est un funeste parasite qui trouve ses
racines dans les périodes les plus sombres du XXème siècle,
infecte et pourrit la démocratie” a-t-il déclaré. Construire une
solidarité pour le présent et pour l’avenir passe “en politique, par une
bonne gouvernance, une bonne opposition démocratique et, dans les
organisations, par l’écoute des gens et de leurs problèmes, le dialogue, la
résolution de leurs problèmes réels et le choix de la tolérance”.
Anne-Marie
Pirard
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