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A suivre... (17 février 2005)

 

Associations et innovation sociale

 

Avec plus de 100.000 associations, la Belgique est un des pays où la vie associative est la plus intense. Et pourtant, si le droit de s’associer a été reconnu dès la création de l’État belge, il aura fallu attendre 90 ans pour que cet article constitutionnel reçoive son cadre juridique (1) !

 

Pour les libéraux de 1830, la liberté d’association ne devait être que le prolongement de la liberté de pensée, d’opinion, d’expression, de presse, de culte… Mais le fait de se “coaliser”, notamment en milieu ouvrier, est resté longtemps un délit aux yeux du code pénal. C’est dans ce contexte de grande précarité juridique qu’ont été créées, malgré tout, les premières sociétés de secours mutuels afin d’assurer leurs membres “contre les éventualités imprévisibles et onéreuses” telles que l’accident, le décès ou la maladie. Juste tolérées, celles-ci s’organiseront également autour de la défense des droits des travailleurs (salaires, conditions de travail…) pour constituer des caisses de résistance, lesquelles, avec l’expansion industrielle, deviendront les syndicats ouvriers. Les associations patronales étaient également prohibées, mais à la différence des coalitions ouvrières, les dispositions qui les concernaient étaient bien différentes comme l’explique Xavier Mabille : “La coalition ouvrière était condamnable en toutes circonstances tandis que les patrons avaient la faculté de plaider le caractère ni injuste ni abusif de leur propre coalition…” Jusqu’en 1866, les statistiques de criminalité comprenaient une rubrique : “coalitions ouvrières”. La liberté d’association, y compris la liberté syndicale, sera garantie à partir de 1921.

 

Constatons que, près d’un siècle plus tard, dans d’autres circonstances certes, mais dans un contexte marqué également par le libéralisme économique, l’idée de créer un statut d’association européenne (SAE), apparue en 1986 dans le contexte de l’Acte unique (l’établissement d’un grand marché européen), se heurte toujours à l’opposition de plusieurs États qui estiment dangereux, voire inutile de doter les associations, les mutuelles, les coopératives, les entreprises d’économie sociale de statuts propres ! “Visiblement, constate Pierre Blaise, le statut d’association européenne n’est pas près d’être adopté alors que le statut de l’entreprise européenne a , lui, déjà été créé.” (1)

 

Des citoyens associés

Le droit d’association est toujours une conquête. Il n’est pas inutile de le rappeler brièvement alors que ce droit reste muselé dans de nombreux pays à travers le monde. Mais il est encore plus utile de dire, dans le contexte actuel, que la vraie démocratie se fonde sur la participation active des citoyens. Et que les associations sont l’un des lieux privilégiés de l’exercice de la vie démocratique car elles permettent aux citoyens de réagir aux grandes transformations sociales, économiques et culturelles.

Plus que jamais, la longue tradition associative s’impose comme un entre-deux incontournable entre le marché et l’Etat, comme l’écrivent Alain Caillé et Jean-Louis Laville (2) : “Marché et Etat ne sont plus en mesure, à eux seuls, de procurer emploi, activité, dignité et estime de soi à tous. D’où la nécessité de faire émerger, à côté d’eux et en interaction avec eux, un troisième pilier, à la fois économique, éthique et politique, la société elle-même en somme, dont le fer de lance serait constitué par les associations. Par les citoyens associés.”

 

Ecoles de devoirs, cours d’alphabétisation, groupes de réinsertion, groupes d’entraide et associations de patients, mutuelles, comités de quartiers, mouvements de femmes, Médecins sans frontières, restos du cœur, banque alimentaire, coopératives, banques éthiques, droits de l’homme, mouvements contre le racisme, observatoire des prisons, protection de l’environnement… une longue tradition sociale reconnaît au monde associatif une place essentielle dans nos sociétés modernes.

 

Penser le monde autrement

En Belgique, l’institutionnalisation de la société civile est tellement poussée que nombre d’organisations reconnues participent à l’élaboration de la décision politique par leur capacité de pression. Elles participent à la gestion d’organismes de sécurité sociale, à l’élaboration du droit. On les consulte comme experts dans leur domaine: la consommation, l’environnement, l’aménagement du territoire… : “La professionnalisation du monde associatif lui octroie des capacités d’action qui étaient sans doute inimaginables lorsque le fait associatif a commencé à être légalement reconnu en Belgique au début du XXe siècle, écrit Pierre Blaise (1). Mais elle le confronte depuis 2 ou 3 décennies à de nouvelles réalités…” Le monde associatif est appelé à trouver l’équilibre entre ses deux tendances : la participation et/ou la contestation. Le risque n’est-il pas aujourd’hui “de voir le monde associatif remplir davantage des missions reconnues et contrôlées par les pouvoirs publics (…) au détriment de sa fonction de révélateur, de critique et d’innovation?”

 

Christian Van Rompaey

 

(1) Dossier du CRISP (N°62 - 2005) : “Les associations sans but lucratif” (7,50 EUR)

(2) Une seule solution, l’association. Socio-économie du fait associatif. La revue du Mauss (1998).

 

On peut lire également :

Piliers, Réseaux et Démocratie. Les Semaines sociales du MOC. Editions Vista (2002)

Comprendre l’économie sociale et solidaire. Nicolas Bardos. Couleur livres (2004).

Du côté des associations. La Revue Nouvelle (Octobre 92)

Produire les solidarités. La part des associations. Editions du Ministère de l’emploi et de la solidarité (MIRE) (France 1998).

 

 

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