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A suivre (4 septembre 2003)

Liberté de concurrence et intérêt général

Le 21 mai 2003, la Commission européenne publiait un Livre vert sur les “services d’intérêt général”. Dans l’introduction, on peut y lire que “les services d’intérêt général… font partie des valeurs partagées par toutes les sociétés européennes et constituent un élément essentiel du modèle de société européen”. L’Union européenne aurait-elle accepté de nuancer quelque peu son credo libéral ?

Les services d’intérêt général se trouvent aujourd’hui au cœur du débat politique parce qu’ils touchent à “la question centrale du rôle joué par les autorités publiques dans une économie de marché, à savoir, d’une part, veiller au bon fonctionnement du marché et au respect des règles du jeu... et, de l’autre garantir l’intérêt général, notamment la satisfaction des besoins essentiels des citoyens et la préservation des biens publics lorsque le marché n’y parvient pas” (1). Mais, qu’on se s’y trompe pas ! La Commission des Communautés européennes ne se dédit pas pour autant de son credo libéral.

Après avoir affirmé l’importance des services d’intérêt général, elle insiste tout aussitôt sur les bienfaits de la mise en concurrence des “services d’intérêt économique général” dans les États membres en soulignant comment celle-ci a favorisé leur modernisation, l’intégration de ces secteurs et des réductions de prix pour les consommateurs : “Tel a été le cas des télécommunications, des services postaux, du transport et de l’énergie… Rien ne prouve, affirme la Commission, dans les informations disponibles que la libéralisation ait exercé un effet négatif sur leur performance globale, du moins en ce qui concerne l’accessibilité tarifaire et la fourniture d’un service universel.”

 

Toujours est-il que sur la base de ce Livre vert, la Commission européenne a organisé un débat sur l’utilité et la qualité des services d’intérêt général (SIG) (2), c’est-à-dire les services marchands et non marchands que les autorités publiques considèrent comme étant d’intérêt général et soumis à des obligations spécifiques de services publics (tels que la santé, l’éducation, ou les services sociaux). La Commission devrait tirer les conclusions de cette enquête dans le courant de l’automne et assurer le suivi par la présentation d’initiatives concrètes dans une directive-cadre. Les services d’intérêt général trouveront-ils place dans les futurs textes de la Convention sur l’avenir de l’Europe ? Et de quelle manière ? Ou resteront-ils comme une exception à peine tolérée aux sacro-saintes règles de la libre concurrence ?

 

Clarification

 

Dans les milieux européens des Coopératives, des Mutualités, des Associations et des Fondations (CEP-CMAF), on fait remarquer de fait que les services d’intérêt général (SIG), s’ils sont bien cités dans diverses communications de la Commission, ne disposent pourtant à ce jour d’aucune inscription dans les traités européens. Les SIG devraient donc être mentionnés dans le Traité instituant la Communauté européenne afin de disposer d’une base juridique comme les services d’intérêt économique général (SIEG) (3).

Les Mutualités, Associations et Fondations font également remarquer que la situation des organisations qui remplissent des fonctions sociales devraient être clarifiées. Les services d’intérêt général ne sauraient en effet se réduire aux seuls services publics ou services universels fournis par les autorités publiques.

 

Des organismes de droit privé, comme les Mutualités entre autres, prestent également des “services d’intérêt général”, réservés à leurs membres ou ouverts à tous, dans le souci d’offrir un service de qualité au prix le plus juste et non de rémunérer des investisseurs de capitaux. Or, bien que les Mutualités relèvent de la protection sociale et des soins de santé, la création du marché intérieur et l’application du principe de libre circulation des biens, des personnes, des services et des capitaux font que les soins de santé risquent d’être de plus en plus perçus comme une activité économique tenus au respect des règles du marché.

 

Ni le statut juridique de l’opérateur, ni son orientation à but lucratif ou non-lucratif, ni son financement ne suffisent à justifier leur exclusion du champ d’application des règles du marché intérieur. De la jurisprudence de la Cour de Justice de la Communauté européenne, il ressort en effet que les activités des institutions de sécurité sociale ne sont pas considérées comme économiques qu’à la condition d’imposer une affiliation obligatoire à un système solidaire de sécurité sociale obligatoire, basée sur des principes de solidarité mis en œuvre par des cotisations liées aux revenus, le financement par répartition et le droit aux prestations non liées aux cotisations payées.

Le risque est donc grand que l’Europe ne puisse reconnaître le rôle spécifique joué par les Mutuelles, Associations et Coopératives dans la réalisation d’objectifs de cohésion sociale et de solidarité en les considérant comme des opérateurs et des prestataires de services purement économiques. Les objectifs sociaux d’intérêt public comme le mode de financement des Mutualités, basé sur la solidarité, l’importance accrue de l’assurance maladie complémentaire et le non-recours à des pratiques assurantielles tel que la sélection des risques et l’exclusion, plaident pour une meilleure reconnaissance au niveau européen des principes mutualistes.

 

Christian Van Rompaey

 

(1) Introduction au Livre vert sur les services d’intérêt général (Commission des Communautés européennes). Téléchargeable Internet de la Communauté européenne.

 

(2) A ne pas confondre avec les services d’intérêt économique général (SIEG) de nature économique soumis à des obligations de services publics couvrant les services rendus par les grandes industries de réseaux comme le transport, les services postaux, l’énergie et les communications.

 

(3) Article 16.