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A suivre (16 juin 2002)

Éthique et évaluation économique

 Comme dans tous les pays industrialisés, des instruments de maîtrise des coûts ont été mis au point afin de maintenir les dépenses de soins de santé dans un cadre budgétaire acceptable. Ce faisant, ne court-on pas le risque de fonder la politique de soins sur des arguments purement économiques ? Telle est en substance la question posée par le Comité d’éthique de l’hôpital Notre-Dame de Grammont au Comité Consultatif de Bioéthique.

La question revenait à demander au Comité Consultatif de Bioéthique si la procédure qui consiste à déterminer la durée d’hospitalisation individuelle en se basant sur une moyenne nationale, calculée à partir des données rassemblées dans le système d’enregistrement du “Résumé Clinique Minimum” (RCM), est acceptable d’un point de vue éthique. Dans sa réponse, très circonstanciée, le Comité Consultatif de Bioéthique rapporte que la question inquiète aussi les patients : “Face à la politique généralisée de sortie plus rapide de l’hôpital, un nombre croissant de patients se demandent s’ils ne sont pas amenés à quitter l’hôpital trop rapidement et si cette politique ne risque pas de compromettre la qualité optimale du traitement de l’affection justifiant leur admission.”

Le “Résumé Clinique Minimum” (RCM), est un des outils importants de la maîtrise des coûts à l’hôpital. Celui-ci a pour objectif d’évaluer la lourdeur des soins, la manière dont ils sont réalisés et d’adapter le financement en fonction des besoins. L’État fournit pour une large part les moyens de fonctionnement du système de soins de santé. On ne peut donc lui reprocher de se donner les moyens de vérifier si ceux-ci sont bien utilisés. Mais, précise le Comité Consultatif de Bioéthique, “la procédure de collecte des données, la manière dont les résultats sont interprétés et les conséquences qui en découlent, par contre, soulèvent des remarques et des questionnements éthiques... La plus grande critique éthique que l’on puisse formuler(…) est que le système actuel, par le biais de pénalités financières et de gratifications (…) incite les responsables financiers des hôpitaux à réduire le plus possible la durée d’hospitalisation, indépendamment de l’évolution de l’état de santé du patient, pour être certains d’obtenir de l’INAMI un remboursement pécuniaire aussi favorable que possible. D’autre part, il n’est pas possible que les prestataires de soins puissent prolonger individuellement la durée d’hospitalisation, au cas où elle serait médicalement indiquée, sans entraîner un désavantage financier pour l’établissement au sein duquel ils travaillent.”

Dans ses recommandations (1), le Comité Consultatif de bioéthique fait remarquer que la distribution des soins doit être envisagée comme un tout. La diminution des journées d’hospitalisation autorisées, entraîne une surcharge de travail pour les soins à domicile, à cause du retour précoce des patients à leur domicile, alors que certains ont encore à des soins relativement lourds. Mais la charge de travail a également augmenté à l’hôpital. Les patients qui y séjournent sont en général d’un niveau pathologique plus élevé qu’auparavant.

Le Comité est particulièrement sensible à la prise en charge du patient isolé, lors de son retour à domicile. Les autorités, estime-t-il, devraient veiller à développer les soins à domicile. Une augmentation des lits dans les maisons de repos et de soins (MRS), la multiplication des possibilités de séjours de courte durée, la prise en charge de nuit ou l’hospitalisation de jour – selon les besoins – constituent aussi, selon le Comité Consultatif de Bioéthique (CCBE) une nécessité absolue.

Par ailleurs, le Comité reproche au système actuel de récolte des données d’être “malheureusement, purement statistique”, sans prendre en compte la qualité du résultat obtenu en termes de santé de l’individu et de la population dans son ensemble, ni le degré de satisfaction du patient et du soignant. Aussi, le CCBE plaide pour que les recommandations concernant la durée d’hospitalisation tiennent compte également du coût et des gains de santé qualitatifs et quantitatifs.

Le Comité attire encore l’attention sur le fait que la pression exercée sur le corps médical et le monde hospitalier pour réduire la durée d’hospitalisation peut conduire à un conflit éthique lorsque, sous la pression des autorités et parfois du gestionnaire, le médecin pourrait être tenté, voire invité à adapter la durée d’hospitalisation en fonction des contraintes économiques et statistiques. Il insiste aussi sur le fait que la collecte des données, en particulier à travers un système informatique, doit respecter de manière scrupuleuse l’anonymat des patients.

“Le système RCM, affirme enfin le Comité Consultatif de Bioéthique, a été instauré à un moment où l’on était globalement convaincu que la durée d’hospitalisation des patients dans les hôpitaux généraux était exagérément longue. Pour l’heure, la durée d’hospitalisation a diminué à tel point que l’on a atteint une situation critique. La réduire encore mettrait en péril la santé d’un nombre croissant de personnes, et en particulier de celles ne disposant que d’un faible revenu et dont la maladie chronique nécessite des traitements spéciaux.” Voilà pourquoi le Comité Consultatif de Bioéthique estime qu’il faut reprendre cette question pour l’évaluer en profondeur et la faire évoluer.

Christian Van Rompaey

 

(1) Avis n° 15 du 18 février 2002 concernant les questions éthiques relatives à l’impact du “ résumé clinique minimum ” (RCM) sur le nombre de journées d’hospitalisation des patients. Pour obtenir le texte complet : Comité Consultatif de Bioéthique, Cité administrative de l’État, Bâtiment Vésale - 4e étage, Bd Pachéco 19, bte 5 - 1010 Bruxelles - tél: 02/210.42.34 - fax: 02/210.42.27