Société : vie quotidienne
(1er janvier 2009)
Etes-vous
solidaire?
Il y a des
mots dont on se sert tellement qu’on ne prend même plus le temps de les
penser, tellement leur sens paraît évident. Ainsi en est-il de la solidarité
dont l’actualité fait un usage abondant.
A
la question: “Etes-vous solidaire?” chacun d’entre nous ne pourra répondre
que “Oui, bien sûr!”… mais il y a bien des manières d’être solidaire.
La solidarité est un
mot-valise, une idée complexe qu’on gagne à mieux comprendre. Pour vous y
aider, voici un test: “Comment êtes-vous solidaire?”
En répondant de manière
spontanée aux questions ci-contre et en comptabilisant les réponses
positives aux points A – B ou C, vous pourrez confronter vos résultats aux
commentaires.
Une
manière d’être,
un devoir moral, une question de justice…
La
solidarité est tout à la fois un mode de vie au quotidien, un devoir à
l’égard de ses proches, une préoccupation pour d’autres que nous ne
rencontrerons jamais, un contrat par lequel nous sommes les obligés d’autres
humains…
Roulons
solidaire, mangeons solidaire, marchons solidaire... Le mot d’ordre est
partout, mais “Attention!” nous dit la philosophe Marie-Claude Blais,
“derrière le rayonnement actuel de la notion de solidarité, se dissimule
l’héritage de deux siècles de réflexion sur les rapports entre l’individuel
et le social.” Alors, prévient-elle: “Pas de banalisation consensuelle!”
Certes, la solidarité
s’exprime naturellement par l’affection et le soutien moral, financier,
psychologique… qui régit normalement les relations dans une famille entre
parents et enfants, entre jeunes et personnes âgées, entre malades et
bien-portants… mais aussi entre voisins de quartier, entre citoyens, qu’ils
aient ou non du travail, qu’ils soient Belges ou d’origine étrangère. Comme
des citoyens du monde, nous sentons qu’il nous faut partager nos ressources.
L’eau, la nourriture, l’éducation, l’information… sont des biens qui
devraient être accessibles à tous. La solidarité ne connaît pas de
frontières et nous avons, au quotidien, un besoin profond de créer des liens
et de parler de la solidarité.
Est-ce pour autant qu’il n’y
a pas de souci à se faire? La solitude dans les villes, la montée des
inégalités dans la société, le sentiment d’insécurité dans les quartiers
mais aussi la progression lente mais certaine de l’insécurité sociale sont
d’autres signes d’une réalité tout aussi quotidienne.
Les libertés individuelles,
acquises au fil de l’histoire, ne profitent vraiment qu’à ceux qui ont les
moyens de les exercer, ceux qui ont des compétences, des revenus et une
bonne santé. Alors, “tant pis pour les autres” parce qu’ils n’auraient pas
eu de chance? Ou pire, parce qu’ils n’auraient pas fait au bon moment les
choix qu’il convenait de faire? Celui qui tombe malade n’aurait-il pas assez
pris assez soin de sa santé? Celui qui ne trouve pas de boulot, ne serait-il
pas assez débrouillard ou manquerait-il seulement de volonté?
Sans solidarité, il n’y a
pas de vie sociale qui tienne. On ne se bat pas seul contre les solitudes et
les inégalités. La solidarité doit s’organiser entre proches. Elles se
construit dans les quartiers, les comités, les associations qui,
elles-mêmes, se regroupent dans des mouvements plus importants. La
solidarité se vit du plus proche au plus lointain, du plus spontané au plus
organisé.
Le premier niveau de
solidarité, c’est certainement celui que chacun peut vivre immédiatement.
Près de chez soi. C’est le terrain privilégié de la compassion, de la
bienveillance. Cette solidarité de proximité est essentielle, mais on attend
d’elle beaucoup d’efforts aujourd’hui. Les famille sont essoufflées. Les
proches ne sont pas toujours en mesure de prendre en charge leurs membres
les plus faibles.
Heureusement , nous avons
appris avec le mouvement social à associer comme des poupées russes les
solidarités proches, familiales, communautaires (les micro-solidarités), les
solidarités associatives, organisées par des citoyens libres et actifs (les
méso-solidarités) et les solidarités longues (les macro-solidarités), celles
qui s’exercent par la médiation des grandes organisations sociales et par
les institutions politiques.
Au-delà de l’utilité des
gestes de compassion et de la nécessité de l’action humanitaire d’urgence,
une conception forte de la solidarité est bien celle qui, par son sens de la
justice, prend une dimension politique et sociale, celle qui a inspiré la
construction de la Sécurité sociale. Certes, la solidarité “officielle”,
organisée par l’Etat, ne doit pas se substituer à la solidarité “informelle”
mais appuyer les familles, les organisations de patients et autres
associations dans leurs efforts de prise en charge, reconnaissant ainsi au
moins la part qu’ils prennent à la solidarité collective.
Un impératif de justice sociale
En un seul mot, la
solidarité rassemble différentes manières d’être en société.
La sociologie nous dit que
les individus en société sont comme les rouages d’une horloge, comme les
membres d’un même corps, ou comme des gens qui se sont volontairement
associés. Mais ce n’est pas tout !
La solidarité ne dit pas
seulement que le lien social est nécessaire. Elle porte en outre un
impératif de justice sociale. “Elle apparaît dès l’origine comme le moyen
de dépasser une antinomie apparemment insurmontable entre l’intérêt
individuel et l’intérêt général…”, affirme Marie-Claude Bais (1). Mais
aujourd’hui, la solidarité revêt tellement d’habits différents qu’elle
risque bien d’y perdre son efficacité politique. Ainsi, on ne peut confondre
une solidarité “humanitaire” et une solidarité politique, créatrice
d’institutions justes et accessibles à tous.
Certes, “quel individu,
quel peuple n’acquiesceraient à l’impératif d’entraide en cas de désastre,
(…) mais autre chose est de faire jouer à la solidarité le rôle d’une source
de droit.”
(1) “La
solidarité. Histoire d’une idée”. Marie-Claude Blais. Editions Gallimard -
2007 - 22,50 EUR.
Comment êtes-vous solidaire? |
1. Un aveugle descend du
train... |
A
B
C |
Vous vous dites :
“Quand on est handicapé on ne voyage pas seul en train”.
Vous regardez autour
de vous pour vérifier si quelqu’un peut l’aider.
Vous lui proposez de
l’aider à traverser la gare. |
2. Pensez vous que la solidarité est
en recul… |
A
B
C |
Parce que nous
vivons dans une société de loisirs.
Parce que nous
vivons dans une société de consommation.
Parce que nous
vivons dans une société marchande où tout s’achète et tout se vend. |
3. Vous payez vos impôts: |
A
B
C |
De mauvaise grâce.
Par devoir.
Comme une
mutualisation des ressources. |
4. Que pensez-vous des
organisations humanitaires ? |
A
B
C |
A quoi bon? Il y
aura toujours de l’injustice, des inégalités, des pauvres…
Les organisations
humanitaires sont des palliatifs nécessaires.
Une solidarité
durable ne peut venir que d’un développement équitable.
|
5. Vous êtes engagé(e) dans une
organisation sociale.
Vous vous dites: |
A
B
C |
Bénévole.
Volontaire.
Militant(e). |
6. Qu’évoque pour vous le mot
“individualisme” ? |
A
B
C |
L’égoïsme.
La responsabilité
individuelle.
La liberté de
circuler, de penser et de s’exprimer. |
7. Vous vous battez pour un “autre
monde”: |
A
B
C |
En donnant du
bonheur à vos proches, autour de vous, dans la famille, la paroisse,
un comité de parents, ….
En vous engageant
dans des débats d’idées.
En rejoignant
l’action des grandes organisations sociales. |
8. Selon vous, l’accessibilité aux
soins de santé… |
A
B
C |
Doit être remise en
cause pour ceux qui prennent des risques avec leur santé.
Doit être
récompensée pour ceux qui prennent soin de leur santé (par des
réduction de primes, par exemple).
Ne
peut jamais être remise en question. |
10. Etes-vous d’accord pour dire que… |
A
B
C |
La solidarité ne
doit s’exercer qu’envers les plus démunis.
La solidarité se
joue à l’intérieur des classes sociales.
La solidarité est
synonyme de bien commun. |
11. Quelle expression vous définit le mieux? |
A
B
C |
Vous êtes un(e)
participatif(ve).
Vous êtes un(e)
médiateur/une médiatrice.
Vous êtes un(e)
battant(e). |
12. Selon vous, quel mot se rapproche le plus de la
solidarité? |
A
B
C |
La liberté.
L’équité.
La justice. |
Si vous avez une majorité de réponses A
Vous êtes plutôt
sensible aux problèmes des autres. Vous êtes prêt à intervenir, de
manière prudente, dans un environnement connu… Pour vous, le
prochain est au sens propre celui qui vous est proche, celui auquel
vous pouvez parler, que vous pouvez toucher… Mais qu’en est-il alors
de la bienveillance à l’égard des gens que vous ne connaissez pas,
que vous ne verrez jamais et qui vous sont étrangers?!
Si vous avez une majorité de réponses B
Vous êtes prêts à
vous engager dans l’associatif. Non seulement vous donnerez une
pièce à un chanteur de rue, vous achèterez peut-être un journal à un
SDF mais vous participerez aussi aux grandes campagnes de solidarité
telles que Cap 48 ou Télévie. Vous vous engagerez peut-être dans un
comité de parents, un groupe de patients, une association de
quartier, un comité culturel, un resto du cœur, des actions
d’entraide ponctuelles.
Si vous avez une majorité de réponses C
Vous êtes
franchement pour une conception forte de la solidarité. Celle qui ne
dépend pas d’un coup de cœur, ni d’une bonne volonté passagère. Vous
êtes plutôt du genre militant, revendicatif. Il vous faut “un autre
monde”. Votre projet est de participer à la construction
d’institutions justes, durables et efficaces. |
Christian Van Rompaey
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