Familles
(1er décembre 2011)
Qui vient jouer ce soir?
Saint Nicolas n'est pas encore vraiment reparti… Et Père Noël s'apprête à
enfourcher son traîneau. En cette période de fêtes, les jeux sont partout
dans les maisons et les magasins. Le mois de décembre semble donc idéal pour
se retrouver en famille autour des jeux et jouets, et passer ainsi de bons
moments.
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Philippe Turpin/Belpress |
En bois, de société, vidéos, de construction, coopératifs…,
les jeux et jouets se déclinent sous toutes les formes et pour tous les
goûts. A l'heure actuelle, l'offre dépasse tout entendement. Entre 700 et
800 jeux de société sortent chaque année. A l'approche des fêtes, les
catalogues des magasins en débordent. Mais sont-ils réservés à la jeune
génération? “Il n'y a pas d'âge pour jouer, s'exclame Michel Van
Langendonckt, président de l'asbl Ludo. Le jeu n’est pas réservé à
l'enfance. Certains adolescents, parfois sous la pression des adultes, les
délaissent, sous prétexte que ‘c'est réservé aux petits’. Ces jeunes sont
alors un peu perdus; ils n'ont plus d'exutoire ludique pour se défouler,
tester leurs limites et celles des autres dans un monde irréel où les
conséquences de leurs actes n'existent pas.”
Pour apprendre un peu de la vie
Le jeu reproduit les mécanismes inhérents à la société. Ainsi dès sa
naissance, l'enfant en apprend ses lois et son fonctionnement. Les règles,
le respect des autres, les négociations entre les partenaires… se retrouvent
dans ces loisirs, comme dans la vie réelle. Apprendre à perdre, à gagner, à
être fair-play… est très important dans le développement de chacun.
“Evidemment, un enfant n'apprend pas tout, tout de suite, précise Michel Van
Langendonckt. Les jeux à règles ne doivent être apprivoisés qu'à partir de
cinq, six ans. Et intégrer cette dimension de règlement prendra du temps. Il
ne faut pas trop vite cataloguer un enfant qui ne suit pas les règles. Il se
sentirait exclu de ce genre d'activités et donc cultiverait, parfois à vie,
un rejet pour les jeux.”
Pour s'amuser ensemble
Aïcha, 12 ans, joue régulièrement avec son frère et sa maman. “C'est
super gai.” Et sa mère renchérit: “J'ai toujours essayé de préserver ces
moments de complicité. On se retrouve souvent en famille autour des jeux. On
passe de bons moments ensemble.” Des rires, des cris… sont au
rendez-vous autour de la table. Aujourd'hui, c'est Aïcha qui gagne contre sa
maman. Les adultes ne sont pas toujours les plus forts. Certains jeux
demandent de leur part de réveiller l'enfant qui sommeille en eux: se
déguiser, jouer les yeux bandés à tâtons… met parfois les parents dans des
situations cocasses qui font bien rire leur progéniture. Il ne s'agit pas de
prendre à la légère les jeunes joueurs. La concentration est au rendez-vous.
Le pédopsychiatre français Maurice Berger préconise aux parents un quart
d'heure de jeux par jour avec leurs enfants: “Ils n'iraient ainsi pas
trop mal. Il pousse la réflexion jusqu'à affirmer qu’une France qui jouerait
avec ses enfants de moins de deux ans pendant quinze minutes par jour, la
télévision éteinte, serait une France moins violente.”(1)
Certains adultes rétorqueront qu'avec le rythme de vie qu'ils s'imposent, se
poser avec leurs enfants et partager ces moments devient impossible.
Pourtant, il ne faut pas disposer de longues heures d'oisiveté pour se
prêter aux jeux. Ceux-ci peuvent s'improviser dans la cuisine, au moment du
repas ou dans le bain, dans la voiture en rentrant du travail ou de l'école.
Michel Van Langendonckt explique que “jouer avec un objet ‘jeu’ n'est
pas toujours nécessaire. Les plus compliqués et bien chers ne sont pas
toujours ceux qui amusent les enfants. Ceux-ci recherchent les moments de
complicité avec leurs parents d'abord et avant tout.” Improviser un “ni
oui, ni non” dans les embouteillages ou donner vie au canard en plastique
flottant dans la baignoire peut parfois être tout aussi apprécié des
chérubins.
Des moments pour jouer
plutôt que des jouets!
Jouer reste avant tout un plaisir à partager par tous. “C'est un état
d'esprit, continue le président de l'asbl Ludo. Si les parents prennent du
plaisir pendant les parties de jeux, ils trouveront facilement du temps pour
se consacrer à cette activité. Ils ne le feront pas seulement pour leur
progéniture mais, aussi, pour leur propre épanouissement. Certains adultes
se dédouanent de cette 'tâche' en offrant des jouets à leurs enfants. Mais
en faisant ce cadeau, ils induisent la promesse de jeu et de moments
partagés avec eux. Ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas.”
Prendre du plaisir ensemble, voilà la base de tous les moments ludiques.
Inutile de vouloir à tout prix trouver des jeux à buts éducatifs ou de
formation… Ils risqueraient de désintéresser petits et grands. Selon Jean
Epstein, psychosociologue français, l'enfant ne joue pas pour apprendre mais
il apprend parce qu'il joue. Des jeux pour conjuguer ou calculer…, ce ne
sont plus vraiment des jeux. Ce sont des supports à l'apprentissage qui
peuvent être exploités dans l'enseignement ou dans un but pédagogique, mais
pas pour la détente. Avec des règles trop complexes ou orientées vers le
didactique, le plaisir disparaît.
Cultiver ces moments de bonheur partagé reste important pour petits et
grands. Jouer en famille, c'est maintenir les liens entre ses membres, c'est
apprendre à mieux se connaître. Même le philosophe Nietzsche disait que
chaque homme cache en lui un enfant qui veut jouer. Le laisser s'exprimer
fera le bonheur de toute la famille. Une soirée “jeux” remplacera parfois
une bonne discussion dans laquelle chacun trouve sa place.
// Virginie Tiberghien
(1) Maurice Berger, Voulons-nous des enfants barbares?,
Ed. Dunod, 2008, 243 p.
La ludothèque, une caverne d'Ali Baba
Paradis pour petits et grands, les ludothèques sont des lieux où un
maître-mot s'affiche: “jouer”. Pas question ici de s'ennuyer. Des jeux de
société moins connus aux grands classiques, en passant par des petites
voitures, des playmobils®…, il y en a pour tous les goûts.
Pousser la porte d'une ludothèque, c'est découvrir un autre monde.
Du sol au plafond, les jeux débordent des étagères. “Toutes les
ludothèques n'ont pas les mêmes moyens financiers, précise tout de même
Sophie Hanozet, permanente à l'asbl Ludo, l'association des ludothèques et
ludothécaires de la Communauté française. Certaines achètent
régulièrement de nouveaux jeux pour offrir une plus large gamme. D'autres se
débrouillent en chinant des jouets en bon état et complets pour les ajouter
à leur collection.”
Si la ludothèque possède un assez grand espace, les plus petits mais aussi
les plus grands peuvent y tester les jouets. Même si l’on ne se connait pas,
c'est l'endroit idéal pour rencontrer de nouveaux compagnons de jeux, le
temps d'une partie.
En attendant la fin du travail de sa maman, Charles, cinq ans, vient jouer
tous les mercredis après l'école avec sa baby-sitter. Des moments
privilégiés pendant lesquels il se défoule en jouant. Quand un jeu plaît au
petit garçon, il lui arrive de le recommencer sans cesse. Certains jours, sa
mère l'autorise à en louer un ou deux pour prolonger ce plaisir avec ses
parents et sa petite sœur à la maison. Car la ludothèque fonctionne selon le
même principe qu'une bibliothèque : la location. Il suffit d'une
inscription, à un prix modique, auprès de l'établissement. Lors de chaque
prêt, une somme minimale (entre 0,5 et 2,5 euros) sera réclamée. Cette
démocratisation rencontre un des buts premiers de ces endroits : être ouvert
à tous et rendre le jeu accessible aux petits budgets. “On constate
malheureusement que les publics plus fragilisés fréquentent peu ou pas les
ludothèques, poursuit Sophie Hanozet. Les ludothécaires essaient alors
d'aller à la rencontre de ces familles en organisant des ateliers jeux…”
La pro-activité des ludothécaires envers leur public est de rigueur. Ils
essaient de créer un climat accueillant qui invite à découvrir les jeux.
Fréquenter une ludothèque, c'est aussi s'inscrire dans une démarche de
développement durable. Généralement, à la maison, les pièces de vie et salle
de jeux des enfants sont envahies par des bonshommes, pions, pièces et blocs
en tout genre. Certains jouets parmi eux ne seront utilisés qu'une ou deux
fois... ou parfois même jamais. Les emprunter permet aux enfants de pouvoir
renouveler régulièrement leur stock… Pas le temps donc de s'en lasser. L'air
de rien, le partage, le respect pour les objets… s'immisce en toile de fond
des ludothèques. Et si l'enfant réclame de louer souvent le même jeu, alors
les parents peuvent envisager de l'acheter, convaincus qu'il ne restera pas
au fond d'une armoire.
// VT
>> Infos :
02/733.85.00 -
www.ludotheques.be
Accro aux jeux vidéos |
Beaucoup de parents se désespèrent de voir
leur progéniture accrochée aux manettes de
leur console de jeux ou au clavier de leur
ordinateur. Les jeux vidéos sont-ils bons
pour le développement de l'enfant? Ou au
contraire, faut-il les bannir complètement
des foyers? |
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Philippe Turpin/Belpress |
En bois, de société, vidéos, de
construction, coopératifs…,Les
mœurs évoluent, les jeux aussi. L'ordinateur
et les consoles sont apparus il y a quelques
années et ont donné naissance à un nouveau
type de loisirs. Ils ont vite trouvé un
public friand de ces jeux par images,
dirigés par des manettes et même aussi par
les mouvements du corps. La génération des
jeunes parents a grandi avec ces jeux
vidéos, celle d'avant les a vus évoluer dans
les mains de leurs enfants. “Les adultes
doivent faire l'effort de s'y intéresser,
insiste Michel Van Langendonckt, président
de l'asbl Ludo. Tout n'est pas à rejeter
dans le jeu vidéo. Mais rien n'est bon à
excès.” Comme ce genre de jeux est
prenant (avec l'image, la tension
régnante…), il pourrait rapidement créer une
addiction. “Si un enfant ne peut se
passer des ces heures sur ordinateur ou
console, les parents peuvent lui proposer
des moments exclusivement réservés à
d'autres types de jeux, poursuit le
président de l'asbl. Je suis sûr que, même
s'il rechigne au début, il va s'épanouir et
trouver son bonheur dans cette alternative.
Ce sont des plaisirs complémentaires. Et les
'jeux traditionnels' ne sont pas ringards.”
En s'adonnant aux jeux, qu'ils soient vidéos
ou non, on développe certaines aptitudes :
le goût du défi, la stratégie, la prise de
décision rapide, les réflexes,
l'anticipation, l'esprit d'observation, la
persévérance, le respect des règles (1).
Seule la convivialité manque dans les jeux
vidéos, à moins d'y jouer à plusieurs. Avis
donc aux amateurs…
// VT
(1) Couples et Familles asbl, Qu'est-ce
que le jeu?, dans Le jeu, l'imaginaire, les
relations. Ed. Feuilles familiales, dossier
n°77 (3ème trimestre 2006), 96 p.
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