Enseignement
(4 septembre 2008)
La
politique éducative flamande
plus performante?
Aux portes
de la rentrée scolaire, ils étaient quelques-uns à s’interroger: l’herbe
est-elle plus verte en Flandre en matière de politiques éducatives? A
l’heure des interminables débats politiques sur l’avenir du pays, voilà ces
participants aux rencontres pédagogiques d’été (1) en phase
avec l’actualité. A se demander ce que l’un pourrait apporter à l’autre,
quelles leçons tirer par delà les frontières linguistiques pour améliorer
l’éducation.
Les enseignements tant au Nord,
qu’au Sud de notre pays sont très inégalitaires.
Depuis
près de vingt ans maintenant, l’enseignement belge a été communautarisé.
Communauté flamande et Communauté française pilotent leurs enseignements,
chacune à leur manière. Et leurs résultats diffèrent quelque peu. D’après
les résultats de l’enquête PISA (2), l’enseignement flamand
se montre plus efficace, plus performant pour autant que l’on accepte de
rentrer dans le jeu des enquêtes internationales, résume Dominique
Lafontaine chercheuse à l’Université de Liège. L’enquête de 2000 avait
abouti à une moyenne de 500 points pour l’ensemble des pays, la Communauté
française présentant un score de 476 et la Communauté flamande de 532.
Tous deux très inégaux
Mais à côté de la
performance stricto sensu, la chercheuse poursuit l’analyse comparative et
relève un point commun: les enseignements tant au Nord, qu’au Sud du pays
sont très inégalitaires. La corrélation entre l’origine sociale et la
performance est forte, et les écarts entre élèves sont très marqués. Un
“tiraillement” pour l’enseignement de la Communauté française entre les
finalités qu’elle avance clairement comme égalitaires (3)
et le résultat de ses pratiques. Un “dilemme” aussi pour la Flandre,
explique Ides Nicaise, chercheur à la Katholieke Universiteit Leuven (KUL),
entre efficacité et égalité. D’aucuns craignent en effet de sacrifier la
performance moyenne à plus d’égalité, et ce, “aux détriments des élèves
les plus doués”. Même si aux yeux des chercheurs, l’exemple de la
Finlande atteste que ce n’est pas nécessairement le cas, que l’enseignement
peut combiner performance et égalité.
Le chercheur de la KUL
décrit le cercle vertueux des écoles de bonne réputation. Leur notoriété
engendre une forte demande, celle-ci leur permet de sélectionner les élèves
qui assureront la continuité de leur réputation. A contrario, un cercle
vicieux attend les établissements de faible réputation. De quoi questionner
le système tant francophone que flamand qualifié de “quasi-marché”, où la
compétition règne entre écoles et se base sur la réputation de celles-ci.
Avec des différences
Sur le terrain de
l’inégalité, la situation des Communautés n’est cependant pas totalement
identique. “Avec une population de jeunes globalement moins bien lotie
sur le plan économique et social, avec une proportion de jeunes issus de
l’immigration relativement importante en nombre, la Communauté française n’a
pas à relever les mêmes défis que la Communauté flamande”, écrivait
Dominique Lafontaine (4).
Aux yeux de Nico Hirtt de l’Adep
(5), la composition sociale n’explique qu’une partie des
écarts. Et de relever plusieurs autres facteurs influants. En termes de
pratique de sélection d’abord. “La Communauté flamande sélectionne plus
rapidement les élèves les plus “faibles” vers des filières de qualification.
La Communauté française pratique davantage le redoublement”. En termes
pédagogiques, où d’après l’analyse de l’Aped, les programmes d’études et les
socles de compétences sont beaucoup moins précis au Sud du pays.
Puis en termes de moyens
financiers: ceux de la Communauté française sont nettement inférieurs.
De quoi nourrir les
discussions institutionnelles.
Catherine
Daloze
(1) Organisées par Changements pour l’égalité, mouvement
sociopédagogique.
(2) PISA = programme international pour le suivi des acquis
des élèves de 15 ans. Ce programme, coordonné par l’OCDE, a pour ambition de
mesurer les connaissances et les compétences acquises par les jeunes de 15
ans. Cette enquête a lieu tous les trois ans (2000, 2003, 2006) -
www.pisa.oecd.org/
(3) “Assurer à tous les élèves des chances égales
d’émancipation sociale” compte parmi les objectifs généraux de
l’enseignement. Voir Décret “Missions”.
(4) “Le ‘miracle’ flamand n’est pas prêt-à-porter…”, dans
Traces de changements, n°156 – à lire sur
www.changement-egalite.be
(5) Appel pour une école démocratique -
www.ecoledemocratique.org -
lire: “Pourquoi les performances PISA des élèves francophones et flamands
sont-elles si différentes?”, 28 février 2008, par Nico Hirtt.
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