Enseignement
(6 mai 2010)
L’égalité, un long chemin à parcourir
La lutte
contre les inégalités à l’école était au cœur de la semaine sociale du
Mouvement ouvrier chrétien (Moc), intitulée “Une école sans ‘classes’”. Ces
deux jours de débat ont été l’occasion de rappeler que la lutte pour
l’égalité est un long chemin à parcourir…
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Michel Houet/Belpress |
L’idéal d’égalité des chances est présent depuis le début de l’Etat
belge.
Chaque
avancée a suscité des luttes et des résistances. Cela a commencé
avec la lutte pour l'école gratuite et obligatoire pour tous,
acquise en 1914 (jusqu’à 14 ans dans un premier temps). Mais la
question de l'égalité entre élèves ne s'arrêtera pas à cette
première réponse. L'égalité ne se limite pas à l'accès pour tous à
l'école, encore faut-il que les conditions de scolarisation ne
soient pas disparates, qu'elles soient les mêmes pour chacun. Et les
mesures en ce sens vont se succéder. On pense à la mise en place
d'un “tronc commun” pour le primaire puis le début du secondaire.
L'égalité de traitement pointe son nez, elle vient s'ajouter au
souci pour une égalité d'accès à l'école.
La préoccupation se
poursuit sur la base du constat que tous ne disposent pas des mêmes atouts
de départ, que la même école ne convient pas à tous les élèves. Arrêtons
d'être indifférents aux différences, affirme-t-on dans le courant des années
70. Des politiques compensatoires sont alors organisées. On parlera de zones
d'éducation prioritaires (1989), desquelles découlera la notion de
discrimination positive dans les écoles (1998). Le principe est de
“donner plus à ceux qui ont moins”, concrètement en octroyant des moyens
supplémentaires aux établissements scolaires accueillant des élèves
provenant des milieux les plus fragilisés.
Si le soin porté aux
ressources données à chacun persiste, l'attention se dirige également sur
les résultats, sur les acquis réellement engrangés par les élèves. L'intérêt
va croissant pour l'après scolarité. On peut cependant s’interroger sur la
manière dont ces questions sont abordées. L’adaptation au marché de
l’emploi, l’employabilité des élèves ne prennent-elles pas le pas sur les
transmissions des savoirs et d’une culture? Ne prônent-elle pas
l'épanouissement personnel au détriment de l'engagement dans un projet de
société au profit des plus fragiles?
Le décret “Enseignement
différencié” (voir encart ci-dessous) est un des épisodes actuels de ce long
trajet. Le constat des chercheurs en sciences de l'éducation indique qu'il y
a encore du travail à accomplir. D'après leurs analyses récentes, les
indices socio-économiques des familles des élèves continuent de peser sur
leurs résultats scolaires. Et les études internationales tendent à démontrer
que le système scolaire belge reste l’un de ceux qui parviennent le moins à
compenser les inégalités sociales de départ. L'égalité des chances (y
compris celle des opportunités) est un objectif des plus ambitieux. Mais pas
de panique, comme le dira le directeur d'une école de la région de
Charleroi, l'important est de savoir que l'on avance vers cet objectif,
qu'il n'est pas pour demain, mais que l'on tend vers lui.
// AMP
et
CD
>>
Plus d’infos :
www.moc.be
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Le compte-rendu de la semaine sociale sera publié dans la revue Politique
(
http://politique.eu.org/ ).
Robin des bois, les riches et les pauvres |
Dernier avatar
du long et difficile parcours pour un enseignement plus équitable en
Communauté française: le décret “Encadrement différencié”. Son
principe est de donner plus de moyens – humains, financiers, etc. –
aux écoles qui accueillent un grand nombre d’élèves issus de
familles défavorisées. L’objectif est de mieux répondre à leurs
besoins pour favoriser la réussite scolaire et lutter contre le
décrochage.
Ce décret a été
adopté le 30 avril 2009. Le précédent gouvernement de la Communauté
française avait prévu un financement complémentaire de 40 millions
d’euros, phasé sur deux années scolaires. Mais la crise a modifié la
donne. Faute de moyens suffisants, le gouvernement avait imaginé un
financement fondé sur le principe des vases communicants: les écoles
les plus favorisées (60% d’après la ministre de l’Enseignement)
abandonneraient une partie de leurs moyens aux écoles les moins
favorisées (25%). En d’autres termes, il s’agissait de prendre aux
riches pour donner aux pauvres, d’où le surnom de “Robin des Bois”
attribué à l'opération. Ce nouveau mode de financement a posé
problème. Quand une école peut-elle être considérée comme “riche”?
Quelles conséquences, les ponctions financières allaient-elles avoir
sur l’organisation des écoles (offre d’options, taille des
classes…)? Au moment de boucler ces pages, la proposition a été
abandonnée par le gouvernement de la Communauté française.
“L’égalité
peut être facile dans un discours mais elle reste encore un long
combat dans son application et elle doit tous les jours faire face à
cet autre principe : 'l’égalité pour tous, les privilèges pour
moi !' L’égalité aurait bien besoin de l’excellence des acteurs”,
remarque Alda Greoli, secrétaire nationale de la Mutualité
chrétienne. |
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