Santé
mentale
(17 mai 2012)
Se soigner les maux
de l’âme
Petit incident de l’existence, grand problème de la vie, il n’y a pas de
bonnes ou de mauvaises raisons pour consulter un psy. Une chose est
indéniable : à certains moments, on a besoin d’être écouté, d’être
accompagné ou de trouver une solution par rapport à ce que l’on vit. Entamer
un travail thérapeutique peut aider. Mais attention de ne pas se lancer à
l’aveuglette.
Lorsque nous sommes submergés par un événement comme une rupture, un
accident, un départ à la retraite, une naissance… Lorsqu’un problème
personnel (de couple, de famille, professionnel, de dépendance à l’alcool,
au jeu..) nous donne le sentiment de ne pas avoir les ressources pour le
surmonter. Lorsque le quotidien nous mine, que les angoisses nous
envahissent. Un travail thérapeutique peut avoir tout son sens.
Consulter un
psy : la démarche apparaît de plus en plus courante. Les idées reçues qui
cataloguaient ces soignants comme des “médecins des fous”, ont perdu du
terrain. Il n’empêche: les images du divan du psychanalyste qui se tient en
silence à l’écoute d’un patient allongé continuent de peupler les
imaginaires. Elles donnent pourtant une vue très partielle de l’univers des
psychothérapies. Surtout, envisager le recours à un psy véhicule encore
nombre de réticences : crainte de se confier, peur d’être pris pour un fou
par son entourage, appréhension du coût… La Mutualité chrétienne vient
d’éditer une brochure pour éclairer celui qui se demande s’il n’irait pas
consulter , et renseigner celui qui s’interroge tout simplement sur ces
“médecins de l’âme”.
Un thérapeute qui a appris son métier
Parmi les
conseils que les auteurs de la brochure donnent, le premier tient au choix
du psy. Quelle est sa formation? Quelle approche thérapeutique
développe-t-il? L’offre de services est large. Les sollicitations de
thérapeutes en tout genre invitent à la prudence. Certains métiers comme
celui de psychologue et de psychiatre s’acquièrent au terme de formations de
l’enseignement supérieur reconnues. Et, pour les psychologues par exemple,
une Commission veille en Belgique à la reconnaissance du titre. Par contre,
le titre de psychothérapeute n’est toujours pas protégé par la loi.
N’importe qui peut se l’attribuer et recevoir des patients en consultation.
S’il existe des cursus de formations pour acquérir les compétences
nécessaires à l’exercice de ce métier, il arrive aussi que certains
psychothérapeutes ne soient pas du tout formés.
Or, “pour être un bon
soignant, il est indispensable d’avoir appris à soigner, souligne le
psychiatre Christophe André (lire ci-dessous). D’où l’importance des diplômes
et formations”. Il conseille de toujours oser demander à son thérapeute quel
est son diplôme (psychologue, psychiatre, médecin ou autre), quelles sont
les méthodes qu’il propose, et en quoi elles consistent. “Un thérapeute
digne de ce nom prendra toujours le temps de vous répondre et de vous
expliquer sa manière de travailler”. On ne s’improvise pas thérapeute.
Ecoute et bon sens ne suffisent pas. Techniques, savoir-faire, repères
fondés sur la recherche scientifique, expérience apprise d’autres
thérapeutes… sont nécessaires.
Aussi une question de feeling
Autre conseil
pour trouver le professionnel ad hoc : en parler à son médecin traitant ou
s’adresser directement à un service compétent tel que les centres de
planning familial, les centres de santé mentale ou centres de guidance.
“L’expérience de votre entourage, d’un ami, d’un membre de votre famille,
constitue également une source précieuse d’information”, observe le service Infor Santé de la Mutualité chrétienne. Le bouche à oreille recèle de bonnes
adresses. Mais attention toutefois, la bonne relation thérapeutique est
aussi une question d’affinité, de “feeling”, et donc de personnalités. Un
même psy ne convient pas forcément à tous. La qualité de la relation
apparaît comme essentielle. Se sentir à l’aise, s’autoriser à interroger le
cadre, à parler librement, se sentir accueilli, voilà autant de points
d’attention pour se forger une opinion ; autant de conditions pour s’engager
dans le cheminement de la thérapie, accompagné par le professionnel de
l’écoute que l’on a choisi. “Faites confiance à votre bon sens et à votre
ressenti, sans pour autant tirer des conclusions hâtives”, enjoint Infor
Santé.
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>> Plus d’infos :
“Et psy j’allais consulter? Des conseils pour bien
choisir”, brochure réalisée par Infor Santé. Disponible gratuitement au 0800
10 9 8 7 ou sur www.mc.be |
Lire aussi “Un psy? Pour quoi faire?”, article
paru dans En Marche le 3 novembre 2005 –
www.enmarche.be |
Un choix sain dans un cadre sain
Une première séance permettra de se
décider. Elle ne suffit cependant pas toujours. Quelques rencontres
supplémentaires peuvent amener à confirmer ou infirmer la première
impression. Et, autre élément d’importance, le psy se doit de respecter le
libre choix de son patient notamment en ce qui concerne son droit à arrêter
la thérapie à tout moment.
Le premier rendez-vous sera aussi l’occasion de
s’informer des modalités pratiques quant au rythme, à la durée des séances,
au tarif que propose le thérapeute. A cet égard, la brochure “Et psy
j’allais consulter” détaille : en cabinet privé, une fourchette de prix
oscillant entre 30 et 50 euros semble raisonnable. “Toutefois, en fonction
de la situation financière de chacun, le psy peut parfois adapter ses prix”.
Quant aux structures comme les centres de santé mentale ou les centres de
planning familial, les consultations y sont organisées à des tarifs modérés,
adaptés aux situations financières. Dans certains cas, pourront être
pratiquées la rémunération par un euro symbolique, voire la gratuité.
De
l’investissement personnel
Néanmoins, “consulter a un coût” celui de
l’investissement en temps, observe José Gerard dans un dossier destiné aux
parents qui s’interrogent sur l’opportunité de consulter un thérapeute pour
leur enfant(1). Sa remarque vaut pour tous. Ainsi, il est conseillé de
penser à la localisation et à l’accessibilité du cabinet du psy ou du
centre. Trop éloigné de son domicile ou de son lieu de travail, il peut être
source de découragement dans la poursuite d’une thérapie.
Tout ne dépend
évidemment pas du psy, de ses compétences. “Débuter une thérapie, c’est un
engagement avant tout vis-à-vis de soi-même”, rappelle le service Infor
Santé. Pas de coup de baguette magique à attendre. Pas de solutions comme
mystérieusement venues d’ailleurs. Le rôle du thérapeute est surtout d’aider
le patient à trouver par lui-même des solutions vers un mieux-être.
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CATHERINE DALOZE
(1) “Faut-il consulter un thérapeute?”, éditions feuilles
familiales, 2e trimestre 2010, dossier n°92, 94 p. Infos: 081/45. 02.99 -
mcf@skynet.be
Les psy, des “surhommes” ?
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>> “Secrets de psys. Ce qu'il faut savoir pour aller bien”,
sous la dir. de
Christophe André, éd. Odile Jacob, 2011, 354 p. |
Les psys détiennent-ils les secrets pour aller bien ? Certaines personnes,
sous le poids de l'accablement, voudraient les voir comme des magiciens,
tandis que des blagueurs les diront plus fous que leurs patients. D'autres
encore, au fil des consultations, nourrissent de la curiosité à l'égard du
professionnel auquel ils se livrent. Le psychiatre Christophe André lève un
peu du voile. Avec l'aide d'une vingtaine de collègues, médecins,
psychiatres, psychologues, il décrit des trajectoires finalement très
humaines. “Des modèles fraternels en quelque sorte”: pas meilleurs au
départ, mais un peu plus avancés dans la démarche.
“Notre profession ne nous
immunise en rien contre la douleur”, rappelle Stéphany Orain-Pélissolo. La
psychologue parle d’expérience. Au début de sa carrière, elle a connu la
dépression dans un contexte de harcèlement moral au travail.
Des hommes et
des femmes comme les autres mais…
Tout le monde a des faiblesses, remarque
Christophe André en détaillant les convictions qu'il s'est forgées avec le
temps. Et les gens qui “vont bien” sont ceux qui composent intelligemment
avec ces faiblesses. Ensuite, autre conviction, savoir qu'on n'est pas seul
à avoir des problèmes est réconfortant; comme il est intéressant de savoir
comment les autres s'y prennent pour régler leurs problèmes. Les psys ne
sont certainement pas exempts de difficultés et la charge émotionnelle de
leurs métiers peut être lourde. Cependant, il est préférable “qu'au moment
où il soigne, le thérapeute n'aille pas trop mal dans sa tête”, précise le
psychiatre. “Il est malhonnête et mensonger de prétendre soigner des
patients anxieux ou déprimés si l'on est soi-même en pleine dépression ou
sujet à des attaques de paniques, ajoute-t-il. Il est malhonnête et
mensonger de prétendre soigner des patients alcooliques si l'on est soi-même
dépendant de la boisson”. Il ne s'agit pas d'exiger d'eux un certificat de
bonne santé mentale, ou une absence de troubles, mais d'attendre de leur
part qu'ils aient surmonté leurs fragilités, qu'ils aient une – petite –
longueur d'avance.
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