Maladies
(15 juin 2010)
Cancer et soins esthétiques
Diagnostic de cancer. Le sol se dérobe sous les pieds. Dans la
confusion, les questions fusent. Les explications s'enchaînent. Les
traitements possibles… les effets secondaires aussi. A côté du combat
contre la maladie, et pour l'accompagner, soigner le bien-être sera bien
utile. Ainsi, ils ne sont pas anodins les soins du visage que proposent
esthéticiennes et conseillères en beauté… Plus que de faire pénétrer une
crème ou de redessiner un sourcil, celles-ci participent à l'acte de
soigner.
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© Marc Detiffe |
Prendre soin des visages
Myriam De Reus a préparé tout le matériel nécessaire.
Sur une longue table, elle aligne une quinzaine de miroirs sur pied. Ces
petits miroirs à inclinaison, qui peuvent aussi donner un effet loupe.
Face à chacun d'entre eux viendront s'installer des femmes de tous âges.
Dans la prudence pour certaines, dans l'excitation pour d'autres. Ça ne
se voit guère mais toutes ont un point commun: un cancer qu'elles
combattent ou ont combattu récemment. Aujourd'hui, elles participent à
une journée organisée par l'asbl "Vivre comme avant". Au programme:
conférence sur l'hormonothérapie et ateliers pour “penser un peu à soi”.
Diététique, activités physiques et soins esthétiques font partie des
choix possibles pour les participantes.
Pour les soins
esthétiques, c'est Myriam De Reus, esthéticienne et coordinatrice des
conseillères en beauté de la Fondation contre le cancer,(1)
qui assurera l'animation et proposera des conseils “maquillage”. De la
préparation de la peau au dessin des sourcils en passant par l'un ou
l'autre truc et astuce pour éclairer le visage ou camoufler les
rougeurs, les mines sont réjouies. A la maison, chacune, face au miroir,
pourra s'y réessayer.
Conseillères en beauté
Outre ces ateliers
maquillage, Myriam De Reus anime surtout des formations à destination de
volontaires, d'infirmières ou d'autres soignant(e)s qui, avec ce bagage
particulier, prodigueront des soins aux patients en traitement. Soins du
visage, nettoyage de la peau, massage de confort, masque, massage de
mains, conseils de maquillage sont étudiés pour être adaptés aux
personnes atteintes d'un cancer. Tous ces soins prennent en
considération les effets des traitements sur la peau. Rendue plus fine,
plus fragile, celle-ci ne peut être traitée comme à l'habitude. Les
soins sont adaptés aux indications médicales. Cicatrices, port-à-cath®(2)…
ne doivent pas être traités à la légère.
Mais attention, les
volontaires n'en deviendront pas esthéticiennes pour autant. La
Fondation les nomme conseillères en beauté (écrivons au féminin
puisqu'il s'agit en majorité de femmes). Leur intervention est limitée.
Quelques soins de base constituent leur champ d'action. Elles ne doivent
pas remplacer les professionnelles. Et même si leur formation est très
sérieuse et pointue, elle n'égale pas celle des esthéticiennes de
métier. Elles viennent soit en appui, soit pour combler un manque. Elles
sont une soixantaine en Wallonie et à Bruxelles aujourd'hui formées et
actives au sein de divers hôpitaux, à collaborer à ce projet de la
Fondation contre le cancer: “Paraître bien pour être mieux”
(3).
(1) Fondation contre le cancer: 0800 15 801 (appel
gratuit le lundi de 9h à 19h et du mardi au vendredi de 9h à 13h) -
www.cancer.be
(2) Dispositif implanté sous la peau pour assurer les
injections, les perfusions, etc.
(3) La liste des hôpitaux où sont actives des
conseillères en beauté est disponible sur le site:
www.cancer.be (rubrique:
“accompagnement social”, onglet: “soins et conseils de beauté” – “par la
Fondation”). Il s'agit pour certains de services de soins palliatifs.
Se soigner et… guérir
Le
registre du cancer (des cancers, faudrait-il peut-être dire, tant ils
peuvent être différents), dans l'image qu'il donne de ces maladies,
avance un chiffre de 50 à 60.000 nouveaux cas par an. Globalement, il
s'agit d'une augmentation, que le vieillissement de la population et le
meilleur enregistrement des malades viennent expliquer en partie. Ce
constat ne va pas sans une autre observation: la mortalité qui découle
d'un cancer est en diminution. Un cancer sur deux peut, selon les
estimations actuelles, être guéri. Les traitements ont fortement
progressé et sont toujours plus ciblés et plus efficaces. Le dépistage
précoce permet un traitement souvent moins agressif, et de soigner la
maladie à temps. Certainement, l'attention au bien-être du patient, au
travers d'une prise en charge multi-métiers, associant aux oncologues,
des psychologues, des kinésithérapeutes, des esthéticiennes… est un
plus. Si pas un plus qui guérit, en tout cas un soutien essentiel pour
traverser ces étapes de soins médicaux éprouvant tant le corps que la
tête.
“Paraître bien pour être mieux”, cahier de
conseils |
La Fondation
contre le cancer édite un livret de “conseils de beauté en cas
de cancer”. Tant pour les femmes, que pour les hommes (ils y
trouveront un chapitre “conseils spécifiques pour les
messieurs”, qui aborde notamment le rasage de la barbe), le
livret comprend des informations simples sur les modifications
physiques susceptibles de se produire et des conseils pratiques
pour y réagir. Une manière de permettre au patient de faire ses
choix, de prendre les décisions qui lui conviennent le mieux en
temps utile. “Les conseils de ce petit livre ne vous
guériront pas, annonce l'équipe de rédaction – vous devez
pour cela suivre votre traitement médical – mais ils vous
aideront certainement à vous sentir mieux malgré la maladie”.
Les
informations et conseils sont accompagnés d'une liste d'adresses
de perruquiers en Belgique, des services qu'ils rendent, et des
prix qu'ils pratiquent. |
>> Le
guide “Paraître bien, pour être mieux. Conseils de beauté en cas
de cancer”,
est
disponible
gratuitement auprès de la Fondation contre le cancer :
02/736.99.99 ou consultable
sur
www.cancer.be. |
Soins, détente et conseils avisés
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© Marc Detiffe |
A la Clinique et Maternité Sainte-Elisabeth de Namur, une
esthéticienne et une volontaire
– toutes les deux conseillères en beauté à la Fondation contre le
cancer – se partagent le local que Caroline Masset, l'esthéticienne,
a aménagé avec goût voici six ans. L'ambiance y est particulièrement
douce. Comme dans un cocon, on peut s'y détendre sous ses mains
expertes, et bénéficier gratuitement des six séances de soins que la
Fondation propose pour chaque patient en traitement. Pour beaucoup,
cela marquera une première. Elles (ils aussi – les hommes sont tout
à fait admis) ne sont pas des habituées des instituts de beauté,
n'ont jamais été maquillées; mais ont bien envie de découvrir, puis
ont aussi une foule de questions sur la perte des cheveux, des
sourcils…
“Les soins esthétiques ont d'abord été pour moi un plus. Puis, ils sont
devenus nécessaires, explique une ancienne patiente. Face à mon image
qui changeait. Car, même si tu es prête, même si on t'a parlé de ce qui
allait arriver, cette image change. Tu perds tes cheveux; ta peau n'est
plus la même… Le ‘plus’ devient un confort essentiel.”
Finalement, les
patients le savent: un peu de sérénité et d'apaisement seront au
rendez-vous. Ils trouvent alors l'énergie pour sortir de chez eux. Comme
l'explique cette dame qui a déjà poussé six fois la porte du local de
Caroline Masset: on arrange les horaires pour venir entre les soins
médicaux, les contrôles, les jours où on ne se sent pas trop mal; et
finalement, on est content d'y être allé, d'avoir vu quelqu'un, d'avoir
profité de ce temps de détente, d'avoir eu un échange.
Car, avec le soin,
dans le petit local esthétique, il y aura aussi des conseils éclairés.
“J'ai trouvé réponse à mes questions, explique cette ancienne
patiente. Ma peau changeait, était fragilisée, mes cils et mes sourcils
allaient disparaitre et la peur s'installait: que faire pour préserver
ma peau, pour me regarder dans la glace et me trouver jolie…”
La conseillère en
beauté lui a parlé des dangers de l'exposition au soleil, des types de
produits à utiliser ou à proscrire…, des effets des chimiothérapies
comme la perte des cheveux, des sourcils, de l'apparition de boutons…,
de ce corps qui change, de la manière d'en prendre soin. “Cela m'a
sauvée d'apprendre à me nouer un foulard sur la tête, témoigne une dame
à la sortie d'un soin. Ce n'est pas du tout difficile, mais si on ne
m'avait pas montré une fois, je ne m'en serais pas sortie”.
Puis pour
accompagner les mains, dans le soin, il y a aussi une oreille attentive.
Beaucoup se dit, des confidences, des angoisses, des espoirs… et c'est
le plus compliqué, explique Caroline Masset qui pourtant s'en sort à
merveille, loin de l'intrusion, pleine d'attentions. “Le soin peut se
passer aussi en silence”, explique cette ancienne patiente qui
préférait ne pas trop dire et qui a apprécié la discrétion de celle qui
lui prenait le visage entre les mains.
// Catherine Daloze
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