D’une abominable saignée sans la moindre goutte de sang. Louis, 12 ans, se
vide de son enfance dès lors que son père lui glisse à l’oreille un
insupportable secret. Six mots suffisent à le propulser dans un monde
beaucoup trop lourd pour ses épaules de gamin joyeux.
Pour son premier
long métrage, notre compatriote Frédéric Dumont voulait « un film qui
marque ». C’est gagné ! Les premières images de bonheur familial, tournées
dans un Maroc gorgé de soleil, sont vite effacées au profit d’un climat
d’oppression où la folie du père, jouée de main de maître par Olivier
Gourmet, se niche dans les recoins sombres d’une villa où la lumière et le
rire n’ont plus leur place. Comme une onde de choc sans fin, ce secret se
prolonge par chuchotements et regards furtifs au sein d’un espace délimité
par un citronnier, transformé en refuge et tour de guet pour l’enfant, et
une chambre qui sert de tanière à son père. Seule la poésie aquatique donne
un peu de répit au spectateur, écrasé par cette atmosphère oppressante.
Cette histoire –
vraie et autobiographique, jusque dans les bégayements du gamin – est sans
concession. L’explication du secret est absente et ne trouve qu’une ébauche
d’éclaircissement : la dépression du papa, abyssale à l’image des rêves de
Louis. Là est la force de ce petit bijou cinématographique où aucun comédien
ne dénote : nous forcer à la vigilance. Ne jamais laisser les choses
s’enliser jusque-là. Ni chez les adultes, ni chez les enfants. Salutaire.